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[rue] Chronique d'Iran


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  • Subject: [rue] Chronique d'Iran
  • Date: Wed, 1 Feb 2012 21:14:20 +0000 (GMT)
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Un curieux retour en Iran.... Nous sommes à Téhéran, dans un hôtel neuf et somptueux, occupé pour moitié par les services de sécurité du Président, qui a inauguré avant hier au soir un séminaire intitulé en anglais "The international seminary on the eminents women of the divine religion". Personne n'est fichu de nous dire quand se terminera ce grand raout hyper sécurisé, mais c'est assez pénible à vivre. D'ailleurs Téhéran est difficile à vivre. Ville incroyable, coupée en deux par une avenue de 30km. D'un côté, la classe besogneuse ou pauvre, de l'autre les classes aisées jusqu'aux classes supra aisée. Entre 12 et 15 millions d'habitants à Téhéran selon les heures de la journée... parce que les heures de pointe commencent à 10h pour se terminer vers 20h. La ville est totalement paralysée par le traffic des automobiles (des Pécan pour la plupart, pour ceux qui connaissent), très peu d'espaces verts, un bazar (ou souk) ou 1 million de personnes travaillent chaque jour sur une surface équivalente à un arrondissement de Paris. Très impressionnant ! Les photos "du Père Noel" sont partout, dans chaque bureau, à chaque coin de rue, dans chaque boutique, et sur les quatre chaînes de la télé quasi en permanence. ça ne donne pas envie de se faire pousser la barbe. On apprend plein de choses chaque jour, c'est passionnant, impressionnant, effrayant, incroyable et hallucinant. D'ici, à Téhéran, je ne raconterai que peu de choses, mais il y a aussi du cocasse. Dans la hiérarchie religieuse, il y a aujourd'hui une vingtaine de grands ayatollah. Ici, on les appelle les Dinosaures (ça ne vous rappelle rien ?).
Une plaisanterie court souvent ici "En général pour chaque pays, ou chaque individu, il y a trois époques. Ici, en Iran, nous en avons quatre : le passé, le présent, le futur, et l'époque du Shah."

Nous sommes ici pour participer au 30ème Fadjr international theater festival... Fadjr veut dire "l'aube" à cause de l'aube de la révolution. Tous les festivals, et il n'y en a pas beaucoup commencent par Fadjr. C'est symbolique mais je ne l'expliquerai pas aujourd'hui. Le ministère de la culture ne s'appelle pas seulement et simplement le ministère de la culture. Beaucoup plus futé que cela, il s'appelle "le ministère de la culture et de l'orientation islamique"... Est il besoin d'expliquer ?
Nous avons eu le bonheur d'être envoyé avant que le festival ne commence au Nord Est de l'Iran, à 30' de la mer Caspienne (que quatre pays se partagent) extrêmement pollué, dans une petite ville appelé Gourgan, et ou nous avons joué 2 fois devant un public totalement lâché et enthousiaste, avec un accueil qui nous a halluciné. Ce peuple est d'une bonté et d'un accueil que je n'ai jamais vu ailleurs à ce point poussé. Puis, nous avons joué dans la banlieue de Téhéran (30 km et 2 heures pour y parvenir) à Karaj avec un accueil tout aussi enthousiasmant. A l'issu des spectacles, nous sommes projetés sur une scène, un critique (plutôt bienveillant) et le public nous bombardent de questions pendant une heure. Les questions sont rémanentes : Que pensez vous du théâtre en Iran ? Pourquoi vous moquez vous des français ? Aimez vous notre pays ? Pourquoi n'y a t il pas d'histoire dans votre performance, mais juste une situation ? Quelle définition donneriez vous au théâtre dans la rue ? Est ce que le théâtre en France a une influence sur la vie sociale des gens ?.... Je vous passe les compliments !

En Iran le théâtre est à bout (et vous pouvez lire cette phrase dans les deux sens), pas de moyens, peu de soutiens (sauf dans la région de Karaj ou toutes les communautés cohabitent ensemble depuis fort longtemps (2 millions d'habitants)), et beaucoup de surveillance. Si le peuple est extrêmement cultivé, notamment dans l'apprentissage des langues, c'est pour "rêver" (et je pèse mes mots, et vous pouvez y ajouter un SE). Ici, on nous dit qu'on amène une énergie que les artistes n'ont plus, du coup, ça les revigore un peu, mais surtout ça les fait "rêver" (et je pèse mon mot).
Il y a deux autres compagnies françaises dans la programmation, mais ils joueront en salle et n'auront donc pas l'occasion de rencontrer "les gens". Ils étaient un peu inquiets, mais, comme nous, ils s'adaptent : "Au cul du loup" compagnie bourgo-marseillaise, dont le régisseur est encore dans un avion détourné sur Ankara, suite aux chutes de neige sur Istanbul, et dont le danseur Quentin souffre d'une hernie discale, alors que demain, ils doivent jouer à 18h devant le comité de censure (oui, oui, vous avez bien lu) et BP Zoom (Bernie et Philippe) dont une partie du matériel a été paumé en vol et qui joue après demain.

Bref, tout va bien... Et on se caille carrément moins que vous !

JLuc

 
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