Complètement d'accord avec toi Fabienne. C'est un des sujets que
nous mettons en avant, avec cette particularité de notre métier que
les processus de création s'y font souvent à ciel ouvert et avec un
public qui, de facto, contribue à nos productions. La société à tout
à gagner de ces frottements créatifs. Une alternative à développer
aux fameux et moins intéressants labos de boulot à l'écart du monde.
Ce qui nous fait demander qu'à côté de la culture du "résultat" (la
mise en lumière de l'oeuvre qui ne touche finalement que les
sempiternels mêmes) s'adjoigne et soit reconnue une culture de la
démarche.
Amitiés
Pierre
Le 26/07/2012 18:53, FABIENNE QUEMENEUR
a écrit :
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Salut Boueb,
Cette idée d'une vingtaine de dates pour roder un spectacle
dont parle aussi souvent Jacques serait peut-être à questionner.
Nous avons présenté un spectacle trop frais à Chalon l'année
dernière et durant cet hiver où de nombreux "partenaires"
demeuraient tout à coup injoignables, j'ai eu le temps d'y
cogiter : on manque sérieusement de moyens de création. Quand je
vois des amis qui bossent dans le théâtre en salle et qui font
leur statut d'intermittent qu'avec des cachets de répets et
sortent des spectacles certes un peu fragiles, qu'on aime ou pas
mais qui correspond à ce qu'ils voulaient faire, je me dis qu'on
a encore du chemin à faire pour être moins dépendants de la
diffusion. Le fait qu'il y ait trop de propositions démago ou
animatoires est aussi lié à ça. Il faut que ça tourne sinon la
barque coule. Dans le théâtre en salle ils répètent parfois six
mois pour jouer cinq dates et passer à une nouvelle création.
Attention je ne les envie pas, c'est bien dommage de ne pas
rencontrer le public après tout ce boulot.
Quelque chose me dit que le vent est meilleur, donc il
faudrait vraiment mettre l'accent là-dessus. On a besoin de plus
de sous pour creuser, peaufiner, vernir.
... Il faudrait aussi avoir plus de moyens pour se mettre en
jachère de temps en temps....
Et on le mérite !
A demain à Mulhouse (et ça y est on les a nos vingts dates au
compteur)
Fabienne Quéméneur
Le 26 juil. 2012 à 07:52, boueb a écrit :
Le 26 juil. 2012 à 07:52, boueb a écrit :
Bonjour !
On m'avait encore redit : "A Chalon, ça passe ou ça casse !"
En fait, pour les grands moyens et notre Grève du crime, comme
pour beaucoup d'autres : Chalon, ça passe ET ça casse.
On m'avait encore redit : "Ne va pas à Chalon l'année de ta
création... si c'est trop vert, ça ne prendra pas !"
Nous avions déjà réussi l'improbable pour une jeune compagnie
: vendre en pré-achat 8 représentations.
Ce n'est pas suffisant pour aller au bout du processus de
création.
Ce n'est pas, non plus, suffisant, pour espérer faire 20 dates
la saison suivante...
Alors nous tentons Chalon pour trouver des partenaires, avec
qui nous partagerions des risques pour parfaire notre travail.
Nous n'allons pas à Chalon pour chercher des acheteurs qui
saisissent une chance, un ticket gagnant, après que nous ayons
pris tout les risques, artistiques et financiers.
La Paperie, notre co-producteur principal, a eu l'intelligence
et la folie de nous ACCOMPAGNER depuis 2010 et jusqu'en 2013,
depuis l'écriture jusqu'à la deuxième saison. C'est une des
clefs de l'évolution des Arts de la Rue, une des solutions
contre le formatage. Sans une implication forte et durable des
co-producteurs, nous ne tenterons rien de plus que de faire un
truc qui tourne, un truc court, drôle avec des prouesses
spectaculaires, un truc qui ne coûte pas cher ni à créer, ni à
tourner, tant pis si le son est trop fort et pas très bon,
tant pis si nous allons à la pêche au rire : pourvu que ça
morde..., un truc sans prise de risque artistique, sans la
saveur du défi, sans le goût de la nouveauté, sans
l'excitation d'une conviction, ni la trouille de l'invention.
Sur la route de Chalon, j'avais l'impression d'approcher de la
fin de "Tournez Manège" (rappelez-vous, l'émission télé avec
Evelyne Leclerc). Là, à la place d'une demi-heure de
questions/réponses entre célibataires, c'est après trois ans
et demi de travail (recherche, montage de production,
écriture, création, diffusion...), que le rideau s'ouvre face
aux 18 programmateurs (pour la plupart debout au fond avec les
bras croisés) qui ont eu la bonne idée de venir nous voir à la
première de Chalon (la cinquième représentation au compteur de
Grève du crime !). Oui, le rideau s'ouvrait, non pas seulement
sur l'espoir d'une chaude aventure d'un soir, mais sur un
partenaire avec qui passer aussi des longues nuits d'hiver à
rechercher des instants de vérité théâtrale de rue. D'une
part, ça nous fait très plaisir d'avoir éveillé autant de
curiosité, d'autre part ça nous enthousiasme que certains
posent des options et que d'autres laissent leurs portes
entre-ouvertes et leurs porte-monnaie sous la main pour
soutenir les deux sessions de boulot que nous devrons réaliser
dans les mois qui viennent. Si nous avions donné un spectacle
aussi bon qu'à la deuxième, ces programmateurs auraient pu
tenter d'être les initiateurs d'un buzz. L'instant de vérité
est passé (et pas trop mal), une expérience théâtrale ne
pourra jamais se contenter d'un seul moment de vérité, que
d'une seule chance. La prochaine fois nous raterons mieux...
nous ne sommes pas idiots, à force d'essayer...
Avec la Fédé, nous devons faire comprendre aux directeurs et
co-directrices de CNAR, ainsi qu'aux Régions et aux DRAC, que
la création d'un spectacle n'est pas terminé avant, au moins,
la vingtième représentation. Si, à nos yeux, bons nombres de
créations ne sont pas aboutis, partageons-en les
responsabilités. Le premier soir, Bruno de Beaufort me glisse
qu'il "ne pense pas prendre Grève du crime, mais [qu'il
aimerait] accompagner le prochain projet". Super ! Merci, j'y
penserais (quand j'aurais le temps de relire mes notes, mais
j'y penserais). Le lendemain, il s'aperçoit que le CNAR qu'il
dirige a coproduit Grève du crime, avant qu'il n'en devienne
directeur. Pourvu qu'il plonge tout de suite, en se disant :
"le jeu en vaut la chandelle !" (_expression_ théâtrale de
l'époque des bougies, qui coûtaient chers et que l'on
remplaçaient par des neuves à la fin de chaque acte...).
Bref, nous ne cherchons pas des acheteurs, mais des
partenaires...
J'avais depuis le dépot de candidature dédouané Pierre Boisson
(directeur du Off à Chalon) du bide que nous aurions pu
prendre en pleine gueule à Chalon, et dont "les compagnies
mettent du temps à se relever". Après réfléxions, nous avons
candidaté au Off. Nous ne risquions pas une grosse chute,
c'est la chance qu'ont les jeunes compagnies : ne pas tomber
de haut. Alors, merci et bravo à toi Pierre, et bonne route !
(envoies nous ton CV, si tu cherches du boulot, nous avons nos
entrées dans une cantine SOGERES pour la période d'essai !).
Merci et Bravo aussi à Chloé, Sébastien et John, qui font un
énorme boulot, et à toute l'équipe du Off (avec un clin d'oeil
à Rebecca et Tof'). Off chalonnais qui dépasse les limites
soulevées par Pascal et qu'il faut réinventer, comme il faut
réinventer les relations entre les artistes, les "pros" (comme
si nous, ne l'étions pas) et les spectateurs.
Le Théâtre de L'Unité nous offre en ce moment quelques jours
de répit. Nous bivouaquons au Château d'Eugène Peugeolt, au
programme : repos, ostéo, mises au point et répétitions.
Bbientôt, nous rejoindrons Mulhouse (festival Scène de Rue),
où Fred Rémy (pourtant discret) prend des risques pour
proposer une programmation de caractère (à quand le label :
"festival de caractère" ?). Fred est attentif et sensible aux
parcours des artistes et aux errances de leurs
expérimentations. D'ores et déjà "Bravo Fred ! Pourvu que ça
marche, et pourvu que ça dure !"
Alors à toutes et à tous :
Merci, Bravo et Bon Courage !
Boueb
www.lesgrandsmoyens.com
> Message du 24/07/12
12:50
> De : "Jacques Livchine"
> A : "Liste Liste rue"
> Copie à :
> Objet : [rue] je t'écris de Chalon, je suis sur un banc
>
>
>
A toi qui lis encore des mels, un petit peu de
verbiage
>
Je n'ai pas l'impression que pour les festivals
ont puisse parler de cru. Ils se suivent et se ressemblent
pas mal, avec des évolutions, mais pas de révolution;
>
Ce qui est fou, et incroyable, c'est le public, il
y a un uniforme de festivalier, ça y est les
quinquagénaires ont leur siège pliant accroché dans le
dos, ils portent des bardas avec des thermos, ils ont des
nu- pieds, ils sont rouges à cause du soleil, ils ont des
vêtement amples, ils sont à l'aise, à l'aise, et ils ont
le journal à la main.
>
Ils regardent leur montre, ils savent qu'à 17 H
c'est au point 4, ils prennent le plan, et se mettent en
route pour le point 4. Ils ne savent pas ce que c'est,
mais si on arrive à l'heure, on n'a pas de place, alors
ils anticipent. Il ne faut pas être à l'heure mais une ou
deux heures avant l'heure.
>
Pour ce qui est de l'Unité, à 18 H on aurait pu
commencer, c'était plein alors que c'est inscrit à 19 H
sur le journal. (Jadis Royal c'était 3 H à l'avance).
Incroyable cet appétit de spectacle.
>
Ils seraient 1000, on s'en fout, on ne veut pas de
larsen, on refuse le micro, ça tue le jeu, tant pis
t'entendras rien , comme ça t'auras un manque.
>
Le public de Chalon est dangereux, ils te poussent
à la vanne, ils veulent se fendre la pêche, alors nous
tombons dans le piège pour leur plaire , et partout règne
une démagogie galopante, que je déteste. On va chercher
les applaudissements entre deux numéros. etc.
Le public est gentil : au moindre saut de carpe, il
est déjà en état d'orgasme, il est naïf, il est encore
étonné par un jongleur à 3 balles. L'effet indésirable,
c'est que l'artiste se croit bon et drôle, or il ne l'est
pas du tout, mais le curseur est vraiment placé bas. Pour
ne pas avoir de succès à Chalon, faut être fort, jouer du
Koltes, du Gatti ou du Jan Fosse.
>
Le public de Chalon veut être complice dans le jeu
de la compagnie. Il attend avec impatience le moment,où il
va être sélectionné, même si tout le monde va se moquer de
lui, il a été choisi. Il est heureux. Ah ça,
l'interactivité ça marche. Il est prêt à tout. Se faire
déshabiller, barbouiller de chocolat , il est promu au
rang d'acteur. Le bémol,c'est quand c'est déjà un acteur,
alors cet imbécile va surjouer montrant qu'il est comédien
et ça gâche tout.
>
Parfois on atteint la fête Rousseauiste, tout le
monde est acteur, ça prend la parole dans le public truffé
de barons on ne sait plus, et c'est bien.
>
Ensuite , c'est mon désespoir, ils viennent te dire
qu'ils ont passé un excellent moment , nous sommes leurs
amuseurs alors que je voudrais être leur poète.
>
Et moi qui ai sué sur le scénario et l'équilibre
le dosage du vulgaire pour entendre dire "j'ai passé un
bon moment". Quand tu lis du Baudelaire tu ne dis pas j'ai
passé un excellent moment".
>
Alors on avait dit au bureau "faut emmener cent
dossiers".
J'avais dit non, je suis superstitieux, quand je
pars aux champignons, avec un grand panier, je n'en ramène
aucun.
>
Alors on a préparé 10 dossiers de vente. J'en ai
ramené neuf.
>
Tout le monde te parle d'un Art qui dérange, qui
décoiffe, qui ose, y en a un seul qui a osé me le dire
"j'adore ton spectacle, mais tu comprendras bien qu'avec
la Mairie que j'ai, cela pose problème de te programmer".
>
Ce qui signifie que les Scènes nationales auraient
plus le goût du risque que les festivals ? On a joué aux
scènes nationales de Calais, Chateau Gontier, Montluçon,
aux déferlantes de Noirmoutiers sans aucune plainte, sans
aucun problème, bon, c'est désolant, cette frilosité, mais
c'est vrai perdre sa place pour une libido qui a du mal à
monter, c'est pénible.
je le sais bien à Audincourt, ils ont refusé
Cacahuètes comme trop dérangeant, et là, ils ont peur de
notre Bit Haïtienne, trop noir et ça parle de la mort .
Oui, c'est dans notre propre ville, qu'ils nous ont
demandé de faire du théâtre de rue, mais pas dans la rue.
>
>
Merci amis lecteurs d'être arrivés jusque là, une
autre fois je ferai un petit billet sur la fabuleuse
expérience de la Franc-comtoise- de rue.
>
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Jacques Livchine
metteur en songes
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Le théâtre de l'Unité c'est toujours autre chose
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Jacques Livchine
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Le théâtre de l'Unité c'est toujours autre chose
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