On se demandait
si on allait, ou pas, sortir une newsletter de janvier
et puis soudain l'info qui tue : « Bal tragique chez
Charlie. 12 morts ». On avait profité des vacances
pour repeindre le site en noir mais on n'avait pas
imaginé que cela serait autant de circonstance. Le
noir du drapeau bien entendu, celui des pirates, des
rebelles, des flibustiers de tout poil...
Nos héros d'enfance sont morts. Il va falloir assurer
la suite pour que ça continue un peu à déconner dans
les chaumières avant qu'on nous re-joue l'histoire des
peurs et du politiquement correct.
« Car il
n'y a qu'une chose qu'on m’apprenne ici, je le sais!
On m'apprend à avoir peur. » Georges Darien, Le
voleur.
Puisque que
tout le monde est Charlie, qu'on a des amis partout,
même anonymes, même invisibles, on va pouvoir enfin
faire dérailler le
train-train quotidien. Charlie et Hara-kiri ont
largement contribué à la liberté de penser et d'agir
dont nous nous revendiquons aujourd'hui. Charlie et
Hara-kiri, c'est mai 68, c'est la révolution, c'est
l'écologie contestataire, libertaire et anarchiste.
Entrons
dans le bal !
Alors
allons-y, entrons dans le bal. Remontons à l'origine
du complot, penchons-nous enfin sérieusement sur les
origines de la barbarie humaine, analysons 10 000 ans
d’anthropologie de l’aliénation humaine et de
l'enrôlement progressif dans la folie du monde
“civilisé“. Comment est-on passé du paradis de la
nature à l’aliénation contemporaine ? Décortiquer 2000
ans de guerres et d'obscurantisme dont on n'arrive
toujours pas à se dépêtrer pour comprendre comment on
en est arrivé là !
« Quand
la machine se met à tuer à l'aveuglette, nous avons
visiblement fait une erreur. Nous ne devrions jamais
oublier que nous sommes aussi ceux qui tirent. Nous
ne sommes jamais en face d'un ennemi, nous sommes
l'ennemi. » P.M. Bolo'bolo
No Talent
!
Depuis
quelques mois déjà, cette newsletter s'était
transformée en tribune irrévérencieuse. En termes de
retombée financière, on ne peut pas dire que cela soit
très efficace. Mais qu'importent les affaires, nous ne
sommes pas ici pour faire fructifier les talents.
Enterrons les talents ! « No talent », c'est la
politique du rebelle appliquée à la « parabole des
talents ».
« Avant
Bolo'bolo, l'argent était un contrat social dont
l'application était garantie par la police, la
justice, les prisons, les hôpitaux psychiatriques.
Ce n'était pas une chose naturelle ». P.M. Bolo'bolo
On voulait
profiter de ce changement d'année pour s'interroger,
savoir qui compte encore avec un calendrier Grégorien.
Les révolutionnaires avaient proposé un calendrier
républicain du paradis présent pour remplacer le
calendrier des morts sanctifiés, dans lequel chaque
jour de l'année serait caractérisé par le nom des
pâturages, des arbres, des racines, des fleurs, des
fruits, des plantes, pour que l'homme reste en contact
avec la nature...
L'indien
est de retour.
Au rythme
actuel de destruction de la nature, le scientifique
Hubert Reeves donne encore quelques dizaines d'années
à l'humanité avant de disparaître en partie de la
surface du globe. Bien entendu, nous allons continuer
parce que nous sommes aveuglés par notre petit confort
mythique d'esclavage civilisé. 35 000 morts de faim
chaque jour pour maintenir la croissance de ceux qui
font surtout croître le désert. Le seul espoir est que
notre « civilisation » disparaisse avant d'avoir
exterminé les derniers « sauvages ».
« Tandis
que l'Indien préfère l'odeur du vent, lavé par la
pluie de midi, ou parfumé par le pin pignon et
adoucie par les fleurs des prés, je m'aperçois que
l'homme blanc ne semble pas remarquer l'air qu'il
respire, qu'il est insensible à la puanteur. »
Retranscription média-transposée du grand chef
Seattle.
L'indien est
de retour et il reprend du terrain sur la
civilisation. C'est plutôt bon signe. Les robins des
banques et autres petits cro-magnons en herbe
font des émules, suivons-les. Allons construire des
cabanes dans les bois, occupons les bâtiments vides,
construisons des Bolo .
« Soyons réalistes, faisons – enfin – le possible ! »
Abandonnez vos voitures, éteignez la télé, fermez les
usines, qu'on respire un peu... Retirez vos gosses de
l'école, il va falloir leur apprendre à planter des
poireaux, ça sera plus utile pour demain et puis ils
profiteront du grand air pendant qu'il est encore
respirable.
« L'école
obligatoire, la scolarité prolongée, la course aux
diplômes, autant de faux progrès qui consistent à
produire des élèves dociles, prêts à consommer des
programmes tout à fait préparés par les « autorités
» et à obéir aux institutions. A cela il faut
substituer des échanges entre « égaux » et une
véritable éducation qui prépare à la vie dans la
vie, qui donne le goût d'inventer et
d'expérimenter. » Ivan Illich, Une société sans
école.
« Non un retour à la terre mais un retour sur
terre. (…) Revenir sur terre, c'est, pour commencer,
ne plus vivre dans l'ignorance des conditions de
notre existence. » A nos amis
Résister
!
La
révolution est là ! La question aujourd'hui n'est plus
de pallier les effets les plus néfastes de l'économie
capitaliste mais simplement de trouver les moyens de
s'en passer. « Il suffirait que les gens
ne les achètent plus pour que ça ne se vende pas. »
Coluche
« Il n’y a pas que dans les montagnes du Sud-Est
mexicain que l’on résiste au néolibéralisme. Dans
d’autres régions du Mexique, en Amérique latine, aux
Etats-Unis et au Canada, dans l’Europe du traité de
Maastricht, en Afrique, en Asie et en Océanie, les
poches de résistance se multiplient. Chacune a sa
propre histoire, ses spécificités, ses similitudes,
ses revendications, ses luttes, ses succès. Si
l’humanité veut survivre et s’améliorer, son seul
espoir réside dans ces poches que forment les
exclus, les laissés-pour-compte, les "jetables". »
Le sous-commandant Marcos, Armée zapatiste de
libération nationale (EZLN), Chiapas, Mexique. Le
monde diplomatique, août 1997.
L'illusion
occidentale
Depuis deux
millénaires, nous avons toujours été hantés par le
spectre de notre propre nature : une nature humaine si
cupide et si violente qu'elle livrerait la société à
l'anarchie si on ne la soumettait pas à quelque
gouvernement. Croire que nous sommes à la merci d'une
« nature » humaine qu'il revient à la « culture » de
contenir est « une illusion
occidentale » (Marshall Sahlins, La Nature
humaine : une illusion occidentale).
En anglais, ça donne « The western illusion of human
Nature ». Les cowboys font déjà partie du monde
civilisé. L'indien vivait libre et pénard avant que ne
débarque le cinglé blanc avec ses colts et ses
curetons. Le pire c'est qu'aujourd'hui encore on
continue le massacre. On veut encore éduquer et
évangéliser du sauvage tellement on est con-vaincu par
notre propre bêtise.
Alors les dérangés du ciboulot, les adeptes du travail
forcé et de la croissance, on vous laisserait bien
continuer tranquille à jouer dans un petit coin de la
planète, avec vos petites voitures, vos petits
soldats, vos guerres, vos petites arnaques et vos
grands profits, votre Monopoly grandeur nature, vos
éperons, vos goupillons, vos prophéties boursières et
vos croyances spéculatives, votre béton armé, vos
atomes explosés, vos autoroutes extra-planétaires,
votre culture de pacotille, « si vous
voulez mourir, continuez ! (...)Vous êtes prêts à
mourir pour vos libertés, je ne le suis pas pour vos
servitudes. » Marcel Duchamp
Cul nu !
Nous, tout
c'qu'on veut c'est être heureux, quitte à crever avant
d'être vieux. Tout c'qu'on veut c'est la liberté,
pouvoir se baigner cul nu dans des rivières qui ne
soient pas des égouts, continuer à respirer de l'air
pur, se rouler dans l'herbe non synthétique et bouffer
des légumes sans attraper la mort !
« La
nature de l'homme est d'être libre et de vouloir
l'être, mais il prend facilement un autre pli
lorsque l'éducation le lui donne.
Disons que si toutes choses deviennent naturelles à
l'homme lorsqu'il s'y habitue, seul reste dans sa
nature celui qui ne désire que les choses simples et
non altérées. Ainsi la première raison de la
servitude volontaire, c'est l'habitude. (…) La
liberté est donc naturelle ; c'est pourquoi, à mon
avis nous ne sommes pas seulement nés avec elle,
mais aussi avec la passion de la défendre. (…) Soyez
résolus à ne plus servir, et vous voilà libre. » Etienne
de La Boétie, Discours de la servitude volontaire.
Alors les
galopins qu'est-ce qui vous retient ? Il n'y a rien à
combattre, pas de guerre à mener, simplement ne plus
servir, juste tout abandonner pour venir vous rouler
dans l'herbe...
« Les
malheureux, en dépit de la chanson, ne sont pas
malheureux malgré eux. Ils ne le sont que parce
qu'ils le veulent bien. Ils ont eux-mêmes placé
leurs cous sous le joug, et refusent de les retirer.
Il est donc fort compréhensible qu'un certain nombre
d'hommes n'éprouvent à leur endroit aucune
compassion ; et qu'ils ressentent même de la colère
et du dégoût pour tant de sottise et d'avilissement.
Le peuple a des Amis. Qu'il les garde! Il sont
généralement dignes de lui. (…)
Je ne comprends pas qu'on puisse être à notre
époque, l'ami du Peuple. L'abominable et tyrannique
soumission populaire a pu avoir jusqu'ici des
excuses : l'ignorance, l'impossibilité matérielle
d'une lutte. Aujourd'hui le peuple sait ; il est
armé. Il n'a plus d'excuses. Qu'est-ce que le peuple
? C'est cette partie de l'espèce humaine qui n'est
pas libre, pourrait l'être, et ne veut pas l'être ;
qui vit opprimé avec des douleurs imbéciles ; ou en
opprimant, avec des joies idiotes ; et toujours
respectueuse des conventions sociales. C'est la
presque totalité des Pauvres et des la presque
totalité des Riches. C'est le troupeau des moutons
et le troupeau des bergers. (…)
La caractéristique du Peuple, de ses amis, c'est
leur obstination à placer hors d'eux-même, dans des
formules creuses ou des rêves, leurs espoirs et les
déterminantes de leurs tristes énergies. La
caractéristique du Hors-Peuple, en contraste, doit
être sa ferme résolution de placer en soi-même ses
mobiles et ses désirs. » George Darien,
L'ennemi du peuple.
No limit
« Si on
ne peut pas abolir le capitalisme, c'est-à-dire
l'économie, il faut le rendre superflu (...) La
Machine Travail Planétaire (MTP) doit être
démantelée soigneusement, parce que nous ne voulons
pas mourir avec elle.(...) Bien sûr il y a des
limites ! Mais pourquoi y aurait-il des limites au
plaisir et à l'aventure ? A cet égard, la modestie
et la prudence (académique) sont des vertus qui
risquent de nous désarmer. Pourquoi devrions-nous
être modestes face à une catastrophe imminente ? » P.M. Bolo'bolo
Si chacun
passe son temps d'aliénation « travail, télé,
internet » à butter des légumes, on n'est pas près de
crever de faim.
« La
violence d'un monde à créer va supplanter la
violence d'un monde qui se détruit.(...)
Au-delà du pillage éventuel de supermarché, auquel
risque de convier une paupérisation accélérée,
beaucoup de consommateurs menacés d'exclusion ne
manqueront pas de s’apercevoir que la survie n'est
pas la vie, que l'accumulation de produits frelatés
et inutiles ne vaut pas le plaisir d'une existence
où la découverte des biens de la nature s'accorde
aux attraits du désir. (...)
Nous allons inaugurer le temps où l'homme va assumer
sa destinée de penseur et de créateur en devenant ce
qu'il est et n'a jamais été : un être humain à part
entière. Et devenir humain signifie se nier comme
esclave du travail et du pouvoir pour affirmer son
droit de créer à la fois sa propre destinée et des
situations favorables au bonheur de tous.» Raoul
Vaneigem, L'état n'est rien soyons tout.
L'an 01
Je propose
que l'on déclare le 7 janvier 2015 comme jour 1 de l'an 01,
début d'une nouvelle ère basée sur le rire. Une
journée d'utopie, d'amour libre et débridé, le début
d'un « nouveau monde
amoureux » qui marquera la fin de la connerie
universelle civilisée.
Et pour ceux qui ricanent encore, je rappelle ceci :
« Un
homme qui aurait raison contre ses concitoyens
constitue déjà une majorité d'un. » Henry David
Thoreau, la Désobéissance civile.
Avec toute
notre irrévérence. Bonne année 01 ! |
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