Par
Etienne Guérin
Le masque dévoile, révèle, relie, bien
plus qu'il ne cache et ne
voile. Provocateur, il
appelle au visible quelque
puissance primordiale à
l'œuvre en chacun de nous,
puissance sacrée, animale,
ancestrale, humaine, trop
humaine… qui, de loin,
nous dépasse. Ce rapport à
la transcendance, à ce qui
ne peut se réduire à la
simple intellection, c'est
ce que nous enseigne le
masque balinais, masque de
bois, utilisé par les
danseurs pour focaliser
l'attention des foules
lors des cérémonies
religieuses, sacré par
nature, donc, et par
tradition mais, dans sa
forme et son utilisation,
fort peu conventionnel, et
toujours en
renouvellement, en humour
et en finesse sans cesse
réitérée, car
l'improvisation vient se
greffer aux formes
préétablies, interrogeant
tour à tour l'assistance
et la raison de sa
présence, là où le
divertissement sert la
prise de conscience. Nous
l'utiliserons pour établir
un lien, un pont avec le
masque de cuir de la
tradition italienne. Le
masque, son utilisation
dans le théâtre à
l'italienne, ou commedia
dell'arte, s'appuie
sur des archétypes et une
mécanique implacable, pour
libérer en nous le rire,
qui châtie et guérit, qui
dénonce et délivre nos
vices cachés, les
faiblesses de nos
caractères et la rigidité
d'une hiérarchie sociale
aliénante. Forme en
constante actualisation,
prenant appui sur les
travers de l'époque et du
lieu, elle est moderne par
nature, et combien
pertinente aujourd'hui !
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