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[rue] Rroms : un témoignage et une enquête


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  • From: valerie terrasson < >
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  • Subject: [rue] Rroms : un témoignage et une enquête
  • Date: Wed, 15 Aug 2012 09:00:45 +0000
  • Importance: Normal

Bonjour,

Rien à voir avec l'actualité des arts de la rue, mais je ne dois pas être la seule à connaître un immense malaise devant les destructions de camps de  Rroms et leur expulsion manu militari.


Je vous livre un témoignage d'un bénévole à Médecins du Monde qui participe au suivi médical dans les camps Rroms du 93 :

"J’ai constaté de visu les conditions quasi  « non-humaines » dans lesquelles ils vivent.

Une anecdote : Alors que, en février, dans le froid et la boue, nous faisions une action de vaccination dans un camp coincé entre une voie ferrée et une bretelle d’autoroute  (300 personnes vivant dans la boue, dans des baraquements  de fortune) arrivent 3 braves représentantes de la « DDASS » qui viennent s’enquérir de la situation sanitaire. Elles se félicitent de nous voir et de l’action de prévention qui y est menée.

Problème le camp n’a pas d’eau, pas de sanitaires pas d’électricité. Nous essayons de leur expliquer que vacciner c’est bien mais qu’un point d’eau courante et des WC de chantier cela vaut mieux que le passage hebdomadaire des médecins… Le « chef du camp» propose, de lui-même, de « payer » un compteur EDF. Refus immédiat des représentantes de la « Santé et du Social (avec un argument massue : « Si on les branche ils vont rester et seront encore plus nombreux... » .

Depuis ce camp a été détruit à la pelleteuse (à la fin de l’ère Sarko il est vrai...), le peu que ces familles avaient accumulé est parti à la décharge. Ils n’ont plus qu’à recommencer ailleurs. Ou demain au même endroit…

Qu’ils soient Roumains ou Bulgares (hongrois plus rarement) ils sont tous co-citoyens européens. Comme tels ils ont « DROIT A un SEJOUR  TOURISTIQUE »  de 3 mois. En toute légalité.  Mais pas le droit de travailler (sinon au black). Après quoi ils sont expulsables… et expulsés. On leur paye l’avion pour Bucarest…

Et quelque temps plus tard ils peuvent revenir à nouveau pour 3 mois mais de nouveau « sans rien ».

Or fin 2013 du fait des traités sur l’élargissement européen ils auront le DROIT de circuler de s’installer et de travailler librement dans toute l’Europe..

Quand on connait (j’y ai été 2 fois un mois)  l’état de la société roumaine et la situation qui y ait faite au Rroms il est évident que si  des gens choisissent de venir et de revenir en France dans les  conditions épouvantables qui sont les leurs, c’est qu’ils n’ont pas le choix, rester « là bas » est encore pire. Et, semble-t-il, de pire en pire. C’est tout dire."

Les articles (art. 3 : Interdiction des traitements inhumains et dégradants ; 8 : Droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile ; 14 : Interdiction de la discrimination, notamment)  de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales sont régulièrement détournés, de plein droit au nom de la sûreté public, des risques sanitaires, etc... Sur le site de la Cour Européenne des Droits de l'Homme, nous trouvons des notes sur des jurisprudences à ce sujet. 

Les expulsions réalisées récemment l'ont toutes été « en application de décisions de justice ».
La saisine de la justice (pour « occupation illicite » des terrains) qui a conduit à ces décisions revient aux collectivités locales concernées. Sans ces saisines pas de décision de justice et donc pas d'évacuation.

Sur la forme : La justice ne demande pas la « destruction » des camps et des quelques biens matériels de leurs habitants mais simplement « l'évacuation » des lieux. Elle n'interdit pas qu'avant d'expulser on se préoccupe du devenir des familles et de leur proposer des solutions d'habitat alternatives et un minimum de dignité, or là, interventions musclées !

La Loi BESSON (2000) fait obligation aux communes de plus de 5000 habitants de prévoir des terrains d'accueil des gens du voyage. La grande majorité de celles-ci ne respectent pas la Loi, sans sanction pour autant.


Que faire ? D'autant les messages d'espoir et de volonté de bien vivre ensemble de Lyon : " [...] des habitants de l'immeuble en face avaient suspendu à leurs fenêtres deux pancartes sur lesquelles était écrit : "Laissez-nous vivre ensemble » et « laissez nos voisins tranquilles ». (extrait d'un blog, texte complet : http://www.libelyon.fr/info/2012/08/les-roms-de-la-rue-montesquieu-%25C3%25A0-lyon-en-sursis.html) sont vite effacés par cette enquête de l'IFOP, là je suis plus que désemparée !!! C'est à vomir.
http://www.ifop.com/media/poll/1955-1-study_file.pdf

Valérie


P.S. : Pour conclure, en septembre 2009, j'ai participé à un Forum Culturel Européen initié par la Commission Européenne à Bruxelles (Il est défini comme un moyen de contribuer aux processus politiques de suivi et d'évaluation des politiques culturelles européennes par des membres de la société civile, des représentants des Etats Membres et des institutions européennes).  Au cours d'un atelier, un auditeur macédonien a interpellé la salle sur la question de la libre circulation dans les Balkans (entre les Pays Membres, les Pays Candidats, les Etats ayant vocation à adhérer). J'ai alors enchaîné  avec les Rroms (absence d'égalité de droits avec les autres communautés, droits fondamentaux bafoués, etc. Car choquée que dans une présentation d'expérience, dans un temps précédent, une jeune historienne roumaine (née dans les dernières années de l'ère Ceauscescu) déclarait primordial des systèmes éducatifs séparés entre Roumains et Rroms). Je ne sais plus si c'est à l'initiative de  l'animateur de l'atelier ou d'une personne de la Commission Européenne, mais l'atelier s'est arrêté là, sans protestation et dans un grand silence.



  • [rue] Rroms : un témoignage et une enquête, valerie terrasson, 15/08/2012

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