Liste arts de la rue

Archives de la liste Aide


[rue] réponse à Pascal KKhuètes sur Avignon


Chronologique Discussions 
  • From: Jacques Livchine < >
  • To: Liste Liste rue < >
  • Subject: [rue] réponse à Pascal KKhuètes sur Avignon
  • Date: Mon, 3 Sep 2012 14:59:58 +0100


Pascal


Bien sûr qu'Avignon IN, ce n'est pas populaire du tout, c'est le royaume de
l'entre-soi, des professionnels, les propriétaires des résidences secondaires
du Lubéron, les profs à la retraite avec un gros pouvoir d'achat (ils ont
tous acheté des baraques, quand on pouvait encore) .

Le Off a un public plus jeune, ils annoncent 1 million d'entrées. C'est
possible. 1000 spectacles par jour pendant 3 semaines, mais ils n'ont pas de
vraies statistiques.

Pourquoi vouloir être populaire ? Je réponds que lorsque l'assistance
n'est pas monocorde, n'est pas uniforme, les représentations sont
meilleures.
Le théâtre ne peut pas se passer du peuple, il est né populaire, pour la cité
toute entière, il doit rester populaire .

Les spectacles où il n'y a que des gosses, les spectacles où il n'y a que des
abonnés de plus de 60 ans, les spectacles où il n'y a que des pros, donnent
des représentations sèches, moroses et tristes.

Quand tu joues par contre devant le flic municipal, la postière, le
syndicaliste, la caissière du supermarché, le professeur agrégé, le
spécialiste de théâtre, deux ou trois élus, une dizaine d'enfants, les
garçons à casquettes renversées, une femme voilée, le pasteur du coin, la
vendeuse de fromages du marché, et des gens qui ne sont jamais allés au
théâtre de leur vie, il y a une sorte d'écoute contradictoire, les
perceptions se mélangent, certains rient , d'autres pas, les différentes
réactions finissent par former un cocktail étrange, le théâtre joue son vrai
rôle social. Les dédiés, les mimis, les momos, doivent être dans
l'assistance.

Est ce que ça arrive ? Oui, par exemple à nos Kapouchniks, c'est un public en
or, et qui nous porte, ce n'est sans doute pas du grand théâtre ce que nous
faisons, mais ça donne des représentations superbes, pleines d'une immense
ferveur. Les gens paient contents à la sortie. Notre record c'était le 21
avril, les oboles s'élevaient à 2660 €.

Cela arrive dans des villages où toute la population se retrouve.

Au théâtre du Rond point par contre, c'est triste, tout le monde a un haut
niveau social, c'est un tantinet snob ; je suis allé voir Baffie au Palais
Royal, là il n'y avait que des informaticiens fatigués de leur écran, venant
se bidonner à n'importe quelle vanne minable. Horrible.


Aurillac est de moins en moins populaire, même si ça reste encore familial,
il y a des festivaliers et peu de population, mais dans les rues il y a tout
un public qui vient taire la fête, sans se soucier ni du IN , ni du Off, ils
boivent et s'amusent, le festival n'est qu'un prétexte.


Aux Préalables d'Aurillac, j'enquêtais pour savoir s'il y avait des gens des
villages, oui , à peu près 10% du public, le reste c'était les festivaliers
avec leurs petits sièges portatifs.

A l'époque de Vilar, les comédiens du IN allaient rendre visite aux
entreprises du coin, je me suis trouvé à l'électro-réfractaire, les CE
vendaient des places pour le festival, mais c'est terminé. Les CE s'en
tiennent sur le plan culture à organiser des voyages à prix réduit à
Disneyland.

Vilar avait du génie , il bouleversait sans arrêt, les règles de son
festival. Au début ce n'était que sa compagnie, il a trouvé que ça
ronronnait, il disait que le public s'applaudissait lui même, il a retiré le
TNP. Un jour il a invité Béjart, ça gueulait chez les théâtreux, une autre
fois, il ouvre la porte en 1969 à 4 jeunes compagnies, c'était le choc. Après
il invite du théâtre musical etc. Le tout truffé de débats au verger, où il
était souvent là.


Une fois je discutais avec Paul Puaux, le premier successeur de Vilar, je lui
vantais le théâtre de rue, comme outil de théâtre populaire, il m'a rétorqué
: "du bruit et du feu" ce n'est pas ça le théâtre populaire.

N'empêche qu'à Aurillac pour Royal, les gens qui commencent à faire la queue
à midi pour 17 H c'était impressionnant. Ils sont tellement heureux de
rentrer, que l'enjeu c'est d'avoir vu Royal, pas s'emmerder à dire après que
ce n'est peut être pas le meilleur cru. Juste voir Royal.


Le public populaire il est au Géant Casino le samedi après midi, il est à la
fête de l'Huma, il est dans les campings, au marché de Malakoff. Mais dans
tous ces lieux, ils se fichent bien du théâtre, j'ai fait des essais tous
ratés.
On s'est mis dans une galerie marchande pour Gourmandisiaque, on ne retenait
les gens que 3 minutes à peine, la fête de l'huma, c'était dramatique, une
pollution sonore inouïe etc.

Nous venons de jouer avec les Haïtiens à une fête d'Audincourt, dramatique,
huit personnes qui jouent pour huit personnes du public.

Mais je ne suis pas pessimiste, les rues extraordinaires que nous faisions
touchaient un public vraiment populaire. Le Tchekhov dans les villages c'est
formidable de voir des familles de paysans observer ce que l'on fait de leur
pré et de leur paille.

et je ne parle pas des réveillons des boulons, où l'ensemble de la population
se retrouvait. La mairie passée à gauche, Moscovici l'ont supprimé sous
prétexte que ça avait été inventé sous la droite. Nul.

lls nous demandent un carnaval maintenant, avec participation des enfants.
Dur. Avec un budget minable. C'est notre prochain combat, leur dire non.

Je rêve parfois de faire des mélanges de public sophistiqués. Avoir dans un
festival des arts de la rue de la Musique classique ou des petits opéras,
mélanger du public bourgeois aux Oua Ouaches, je voudrais bien que l'on
greffe les arts plastiques, dans le temps, les villes s'habillaient de toute
une déco, ill y a Andrieu qui continue, c'est bien.
d'ailleurs à Avignon , l'événement c'était Sophie Calle, certainement pas le
théâtre.
L'année de Spencer Tunik à Aurillac, ça avait donné du punch au festival.

Je trouve que les fédés devraient se mêler d'artistique, faire des
propositions aux directions de festival sinon ça va s'endormir , on commence
à avoir le phénomène de festivals qui s'imitent eux -mêmes.

Il faudrait mettre un coup de turbo, ne pas s'endormir, il y a encore tout à
inventer.

L'expérience Franc comtoise de rue à Chalon, un repas - spectacle fabriqué
par 12 compagnies, était un pas en avant, intéressant.






Jacques Livchine
metteur en songes

Le théâtre de l'Unité c'est toujours autre chose









Archives gérées par MHonArc 2.6.19+.

Top of page