Je voudrais réagir aux projets d'expulsions de squatteurs sur Notre Dame des Landes: hier j'ai vu des scènes indignes d'un état de droit, avec une manipulation de l'information par les politiques et la préfecture. Les soit-disant expulsions se doublent d'atteintes graves à l'environnement (destructions d'espèces protégées) et de violences graves et volontaires à l'égard des opposants (tirs tendus de grenades lacrymogènes ou assourdissantes, tabassages injustifiés). On met en avant le nombres de blessés côté "forces de l'ordre" en oubliant de dire que le traumatisme auditif du garde mobile hier est dû à la grenade assourdisante qu'ils ont eux-même lancée, de même que la grenade lâché par un autre CRS avait blessé ses collègues, ou que le policier tombé d'un arbre avait négligé de s'attacher. Coté opposants, peu de blessés sont officiellement recensés et pour cause: la préfecture a refusé le passage des ambulances. La ligue des droits de l'homme de Nantes ayant téléphoné à la préfecture pour se plaindre de ce fait, s'est vu répondre qu'elle ne devait pas aider "ces gens là". Arrivée hier soir sur place, j'en ai compté plus d'une dizaine, certains sérieusement atteints, restés sur place, et ils ne pignent pas sur leur sort, eux! Plusieurs ont des éclats de grenades dans le corps, qu'ils garderont à vie!
J'ai 60 ans et je ne pensais pas un jour voir le PS devenir un parti liberticide, enfermé dans ses certitudes et voulant imposer coûte que coûte sa manière de concevoir la société. Je suis révoltée par la présentation que politiques ou médias font des opposants aux projets contestés: aéroport bien sûr, mais aussi gaz de schiste, nucléaire, projets de bétonnage ou d'industrialisation délirants sur le long terme.
Il parait que ce sont de jeunes ultra-violents formés aux techniques de guérilla, il parait que ce sont des fainéants vivants en parasites de la société. Ces jeunes qui se battent savent ce que vous ne voulez pas savoir, ils voient arriver ce que vous ne voulez pas voir: le pic pétrolier, c'est maintenant! le réchauffement climatique et ses conséquences, c'est une réalité! les limites à l'exploitation de la planète sont bientôt atteintes! Ces jeunes représentent toutes les composantes de la société et beaucoup travaillent ,quoi qu'on en dise! Ils voudraient bien se construire un avenir, mais ils ont peur de ce qui se profile.
Ils le voient déjà: comment faire des études quand ta famille a peu de revenus? comment te loger quand les éxigences des propriétairtes sont bien au delà de ce que tu peux gagner? comment te soigner si tu peines à payer une mutuelle? Accepter de sauter d'un emploi à l'autre, de ne pouvoir te construire une carrière (sauf dans l'armée ou dans les sphères politico-financières ou visiblement les décideurs sont indéboulonnables et indécrotables dans leur négation de la réalité). Comment construire une vie de famille alors que tu te demande comment tes enfants ou petits-enfants vont survivre dans ce chaos. Et quand ils voient ce qui s'annonce, et quand ils voient globalement ce qui se passe partout sur cette planète, comment ne pas désespérer? comment ne pas baisser les bras en te disant que c'est foutu et que ca ne vaut pas le coup de vivre?
A Notre Dame des Landes, ces jeunes, moi je les vois bien vivants, bien ancrs dans leurs luttes, parce que ces luttes sont justes et que c'est ça qui les fait vivre: l'amour de la vie quelle qu'elle soit, la solidarité, l'imagination, la créativité, l'humour, et l'espoir de trouver ensemble des solutions pour résoudre les problèmes. Et ils se débrouillent plutôt bien! Je les admire pour leur ténacité et leur capacité de résistance. La survie en milieu hostile, ils connaissent!
C'est peut- être ça qui fait peur à nos politiques, aux bourgeois bien assis sur leurs certitudes que le monde va continuer à tourner comme avant, qu'on sortira de la crise - même si c'est en éliminant une partie de l'humanité- pourvu que rien ne change dans leur quotidien: la maison, les deux voitures, la piscine, la pelouse à tondre, les courses au supermarché, les sorties dans les centres commerciaux, les vacances à la neige, ou au soleil ,et tout ça leur fait croire qu'ils sont bien vivants! Mais dans 10 ans, 20 ans ou même avant, une crise politique, une crise énergétique et leur beau monde s'éffondre! Il suffit de voir comment une grosse panne électrique ou une grève des éboueurs fout le bordel dans une ville.
Sortez-vous le cul de vos sièges de bagnoles, sortez-vous le cul de vos canapés ou de vos sièges de bureau et affrontez la réalité en face: le bétonnage ou la désertification des terres agricoles, la raréfaction des ressources naturelles, les conséquences des pollutions chimiques ou nucléaires, la raréfaction des ressources en eau potable, la marchandisation du vivant, la spéculation boursière... et les conséquences de tout ça: pauvreté croissante d'une grande partie de l'humanité, crises alimentaires, conflits pour la possession des ressources disponibles. Ouvrez les yeux et essayez de voir à long terme :20 ans, 30 ans.Dans quel état sera la planète? et l'espèce humaine?
Ces jeunes, vos enfants, nos enfants, sont les héritiers de cette planète et devront la gérer pour leurs enfants. En ce sens, ils sont effectivement squatteurs de la planète comme nous sommes squatteurs de cette planète en attendant les générations futures. Certains on peut-être une cagoule sur le nez mais dessous il y a des gens qui ne sont ni irresponsables, ni incultes, ni fainéants (il y a forcément des exceptions, mais ça c'est partout, entreprises et administrations comprises).
Il faurdrait peut-être faire un cours sur la cagoule ou le foulard: on le met pour éviter d'être pris en photo, parce que quand on est pris en photo sur des lieux de contestations, on est classé-catalogué agitateur, anarchiste potentiellement dangereux, terroriste. On peut même être mis en examen pour association de malfaiteurs alors qu'on défend des idées politiques et si l'on manifeste régulièrement sur des lieux différents mais qui rélèvent tous du même choix de société, alors vous avez la "casserole suprème" au cul!!! Et comme, de plus en plus souvent, les lacrymos volent bas et en grand nombre, le foulard ou la cagoule servent à mettre du jus de citron pour se protéger a minima. Donc sous la cagoule, il y a des gens, souvent plutôt jeunes, qui ont encore l'espoir de faire quelque chose de leur vie, donc pas envie d'être déjà classés " irrécupérable". En tout cas,, ils ont de la motivation et de la réflexion et pour les fréquenter depuis quelques années, je leur réitère mon admiration et mon amour.
Marie Palvadeau
