Salut Pierrot,
Je reprends les éléments utiles de ta réponse, sinon le mail va
vite devenir illisible.
"Merci pour les réponses rapides, il est vrai que les membres
de l'association ont paniqué un moment car la partie adverse
a transmis ses conclusions le vendredi 30 novembre pour
l'audience du lundi 3 décembre. Or il y a vice de procédure
car dans tous les cas, les pièces doivent être communiquées aux parties adverses 15 jours avant
l'audience (bon à savoir). Il y a donc report et l'association
va pouvoir tranquillement préparer ses répliques.
Je pense que cette discussion est pertinente sur la liste car
on voit souvent des histoire d'arnaques et il est important
que chacun comprenne bien les rouages juridiques subtils et
spécifiques à notre profession. Au Tribunal, ce n'est pas
toujours la justice qui est mise en oeuvre, mais l'application
des lois...
(...)
Je connais
cela, et là où le bât blesse, c'est que notre "ami" a acheté
le spectacle à l'association, et il l'a revendu, sans avoir ni
licence de spectacle, ni être inscrit au registre national
des agents artistiques à un autre organisateur. Dans les
faits, il a refacturé notre prestation dans notre dos, il a
encaissé l'acompte à la commande en nous mettant devant le
fait accompli, et à la fin, il a encaissé le solde final
sans nous en reverser la totalité.
Question: A-t-on le droit de "revendre" un spectacle quand
on l'a "acheté" à un producteur?
(...)
Nous avons eu affaire à un opportuniste usurpateur et
mythomane pour le montage rapide d'un projet. Une fois les
choses engagées, nous n'avons pu qu'assumer cet
"intermédiaire" nuisible et parasite afin de garder une
crédibilité vis-à-vis de l'acheteur réel du spectacle.
Je ne veux pas ennuyer tout le monde en partant dans des
détails sans fin. Ce que je peux dire, c'est que si vous avez
une proposition pour jouer dans le Tarn (81), chef-lieu Albi
avec un organisateur "privé", faites attention!"
Je passe sur le fait qu'en agissant ainsi, votre "ami" vous a
arnaqué et porté à votre association un préjudice qui se traite
devant le tribunal. Apparemment, c'est en route. Mais vu ce que
tu racontes, il y a du grain à moudre et de quoi pourrir
sérieusement la vie de votre "ami"...
Qu'il se prétende producteur ou organisateur, ce margoulin doit
obligatoirement disposer d'une licence. S'il ne se charge pas
lui-même de la billetterie, il ne peut se présenter comme
organisateur et il est bel et bien (re)qualifiable de
producteur. Le producteur qui, je le rappelle "est responsable
du spectacle, notamment de la rémunération du plateau
artistique". Cette phrase qui figurait jusqu'en 2008 dans
l'ordonnance de 1945 a été rejetée bien bas dans la hiérarchie
des texte juridiques, mais n'a pas totalement disparue.
Ce n'est pas rien d'être entrepreneur de spectacle: un contrat
de cession est au croisement du droit commercial, du droit du
travail, du droit fiscal et de celui de la propriété
intellectuelle. Pas étonnant que la profession soit réglementée.
C'est en entrant par le code du travail dans cette histoire que
ça va faire mal!
L'article L7122-2 du code du travail précise que: "Est
entrepreneur de spectacles vivants toute personne qui exerce une
activité d'exploitation de lieux de spectacles, de production ou
de diffusion de spectacles, seul ou dans le cadre de contrats
conclus avec d'autres entrepreneurs de spectacles vivants, quel
que soit le mode de gestion, public ou privé, à but lucratif ou
non, de ces activités. Les différentes catégories
d'entrepreneurs de spectacles vivants sont déterminées par voie
réglementaire."
L'article suivant (L7122-3) dit que: "
Toute personne établie sur le territoire national qui exerce
l'activité d'entrepreneur de spectacles vivants doit détenir une
licence d'entrepreneur de spectacles vivants d'une ou plusieurs
des catégories mentionnées à l'article L7122-2, sous réserve des
dispositions de l'article L7122-10". (Le L7122-10 parle
d'organisateur de spectacle étranger s'établissant en France. Si
c'est son cas, il doit avoir un titre équivalent à la licence.)
Donc licence nécessaire!
Or, l'article L7122-16 donne la sanction pour exercice sans
licence de la profession d'entrepreneur de spectacle. Et ça fait
mal!
"Le fait d'exercer l'activité d'entrepreneur de spectacles
vivants sans être titulaire de la licence prévue à l'article L.
7122-3 ou au 2° de l'article L. 7122-11 ou d'un titre d'effet
équivalent conformément à l'article L. 7122-10 ou sans avoir
procédé à la déclaration prévue aux 1° ou 2° de l'article L.
7122-11, est puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une
amende de 30 000 euros. La juridiction peut également prononcer
à titre de peine complémentaire : 1° La fermeture, pour une
durée de cinq ans au plus, du ou des établissements de leur
entreprise ayant servi à commettre l'infraction ; 2° L'affichage
du jugement aux frais de la personne condamnée dans les
conditions prévues à l'article 131-35 du code pénal et son
insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu'elle
désigne. Ces frais ne peuvent excéder le montant maximum de
l'amende encourue."
Bref, il ne serait peut-être pas totalement idiot
d'informer rapidement la DRAC de cette affaire!
De plus, comme on fait référence au code du travail et dès
lors que votre "ami" revend votre spectacle sans vous en
avertir, il sera considéré comme employeur. L'URSSAF devrait
bien s'amuser avec lui!
Quant à vous, en tant que salariés, vous subissez du coup
un préjudice. Ai-je évoqué les Prud'hommes? Je crois même
qu'il est possible de le poursuivre en référé sur ce genre
d'affaire. Un référé ne traite pas l'affaire sur le fond,
mais ça va le mettre très rapidement devant des juges. Il
faudrait se rapprocher d'une organisation syndicale qui
saura mieux vous renseigner que moi.
Ce n'est pas tout, le contrat de cession est soumis à une
TVA de 5,5% (article 279 bis du code des impôts). Encore
faut-il être en capacité de négocier une telle vente. En
revendant votre spectacle sans licence, votre ami gruge le
fisc!
L'addition commence à être salée...
Ah oui, au fait... Qui détient les droits sur l'œuvre que
vous interprétez? Et hop, une autre constitution de partie
civile possible.
Je crois que vous avez quelques angles d'attaques assez
pertinents pour lui faire passer le goût de l'arnaque.
Je suppose que votre avocat sait déjà tout ça. Mon conseil
est de ne pas chercher à vous faire justice mais à lui
parler de tous ces organismes qui comme vous sont victimes
de ce zigomar et qui devraient le savoir d'urgence. Ca vous
coûtera quelques coup de fils, voire un ou deux rendez-vous
pour les alerter; ça devrait lui revenir plus cher.
Comme tu l'as dit, cette discussion est pertinente sur la
liste, et on peut rappeler quelques principes à partir de ce
cas exemplaire.
N'hésite pas à nous raconter la suite de vos aventures, je
crois qu'il va y avoir du spectacle!
@+
Thierry