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[rue] 44 heures à Sotteville


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  • Subject: [rue] 44 heures à Sotteville
  • Date: Fri, 05 Jul 2013 12:36:01 +0200

Salularue !

Je tarde un peu à faire un retour sur notre virée à Sotteville, car je n'ai
plus
d'ordinateur...

Avec Amélie (nouvelle chargée de diffusion des grands moyens), nous sommes,
nous aussi
montés à Vivacité ; et nous étions bien remontés.

A une heure de route de notre destination, nous faisons une halte pour faire
le plein à
la station service et nous tombons nez à nez avec  Michèle, Claude, Caroline
et Sébastien
du Fourneau. Je leur présente Amélie, ils lui disent "tu peux noter "grève du
crime" au
jeudi du port à Brest en 2014 dans ton agenda !". C'est donc en winners
hilares que nous
débarquons à Sotteville.

40 bises pendant l'inauguration que j'ai du coup peu et mal suivie (un acte
de
"libération des carottes" dont je ne dirais rien à part que c'est toujours un
exercice
très casse-gueule). Encore 24 bises sur le chemin de l’hôtel de ville. C'est
marrant, les
normands commencent par la joue gauche, comme les marseillais (ce qui donne
un léger
trouble quant à l'intention de se rouler des pelles dès qu'on se rencontre).
Et encore 56
bises dans la salle "pro". La rencontre professionnelle a bien lieu, tu vois
des
collègues, des amis, des partenaires, des compagnons, des futurs clients
(ben, oui, ceux
qui achètent tes spectacles). Il y a tellement de retrouvailles que certaines
s'évaporent
dès qu'elles naissent : certains se jettent sur tes joues en disant "salut
Bouèb" et
repartent avant même que tu les identifies. Avec d'autres on prend le temps
d'échanger.
Il y a plus d'informations sur l'état des personnes dans leurs regards et sur
leurs corps
que dans le contenu des paroles. Quand tu demandes "ça va ?", beaucoup
comprennent
"alors, ça tourne ?" et s'empressent de faire bonne figure en te racontant le
bon plan de
l'année, en cachant leurs rames de galériens derrière leur dos. Dans notre
grande famille
de "rameurs dans la brume", ça veut dire : "ouf qu'on n'a pas pris de récifs
de plein
fouet..." Beaucoup ne te demande pas même "comment tu vas ?", mais "combien
tu tournes
?". Les programmateurs craignent d'être toujours pris à parti par les
compagnies : "Viens
voir ceci, viens voir cela. Il est beau et il est bon mon spectacle !", alors
qu'ils
savent déjà ce qu'ils vont voir et préféreraient parler d'autres choses avec
les
artistes. C'est comme une relation amoureuse : si tu veux coucher, apprends
d'abord à
danser, rare sont celles qui se glissent sous tes draps si tu leurs donnes un
tract en
disant "ce serait super que tu viennes ce soir !"

Je farcis Amélie de noms, de visages et d'histoires : là c'est Philippe, elle
Ingrid, ici
Olivier, lui Pascal, là Fatma, tiens Françoise, Serge, Agnès, voilà Thomas,
ici les
Z'amis, ... Elle engrange, mais je crois que je lui donne la migraine.

Le vendredi finalement, je ne vois qu'un spectacle, mais un bon. C'est
Virginie, le
spectacle "petit" de la compagnie "rouge". Elle joue vraiment la rue, "à main
nue" comme
dit Jacques. Elle s'amuse avec l'espace et tisse des belles relations avec
les personnes
qui la suivent. Elle a une douceur, une fragilité, et une brillance naïve qui
me fait
penser à Claire Ducreux et Léandre. C'est chouette, c'est généreux. On la
suit dans les
rues à la poursuite de détails rouge dans la ville.

Je mange une galette complète (normande !) au bistrot Raspail (tenue d'une
main de maître
par la super Peggy) avec Brendan de Frichti Concept, il prépare une grosse
forme avec 14
danseurs et vient pour rencontrer et convaincre des compagnons sur la route
de la
production. Mais il parait que c'est la crise... mais les envies résistent.
Nos assiettes
s'envolent, un crachin breton fait sortir des capuches.

Je rate le lancement de la BOUM pour cause de retrouvailles prolixes avec Yo
du milieu
(slameur de Caen, cf "où est l'outrage") qui file un coup de main à
L'Albatros qui font
un bon spectacle de cirque que j'ai vu le samedi : deux hommes, un grand et
un petit, une
histoire de la rue, une rencontre de "manchards", un tendre et un teigneux,
une contre-
basse et des tours de jonglage atypique (plus une danse d'objets d'ailleurs).
C'est bien
fait, bien ficelé.

A la BOUM, on fait encore quelques bises à ceux qu'on a pas vu (Laetitia,
Chtou,
Bélinda...). On attend longtemps pour boire une dernière bière. La musique
est bonne, le
danse floor bouillonne, le son est fort, mais il est bon. On suit Mohammed
jusqu'à chez
lui, il nous héberge chez lui et c'est très gentil.

Presque à chaque rencontre, on nous lance :
"Salut ! Vous jouez ou vous venez en touristes ?
- ... ?! ... On s'amuse en travaillant, je crois ! Enfin, comme d'habitude."
Je n'aime pas trop être touriste et quand je prendrais des vacances, je
n'irais pas sur
une rencontre professionnelle des arts de la rue. Il faudra quand même que je
pense à
prendre des vacances.

Le samedi matin, il y a plus de 50 personnes pour écouter l'aventure de
"Ouagadougou".
Des belles histoires de rencontres et d'expériences, et une analyse
intéressante de la
fille de Daniel Andrieu (je suis désolé pour "la fille de", mais je ne me
souviens pas de
son prénom). Jean Digne n'est pas d'accord avec les piques qu'elle lance sur
le "post-
colonialisme" et "l'impérialisme culturel français" (je simplifie très
grossièrement, ce
qui est la pire des choses à faire avec les paroles universitaires, mais je
me réveillais
tout doucement et il restait plein de viennoiseries bourratives).

On enchaîne avec un buffet "Nord-mandie", ou quand Sotteville rencontre Vieux
condé, dans
l'allée du parc. Les élus locaux sont tendus et partent presque perdants pour
les
prochaines municipales (il y a scission au PS local). Je discute avec des
habitants qui
pensent que si ces élus partent, Vivacité s'arrêtera. Des rumeurs qui peuvent
jouer en
faveur des sortants...

Je file voir la CIA parce que je les aime bien ces "anciens", des
"camarades". On échange
sur le croisement des réseaux : "quand le petit milieu des arts de la rue
boude ton
spectacle, comment aller se faire voir ailleurs en restant debout et digne
?". Avec "Rien
que des hommes", ils touchent un sujet important, ils ont plus que des bonnes
pistes,
même si ils se prennent un peu les pieds dans les plis du tapis à cause d'une
imbrication
complexe. Ils touchent juste, ils m’attrapent quand les acteurs sortent de
leurs perso et
racontent des morceaux de leurs vies. Cette proposition pourrait encore
s'étendre à de la
mise en débat, voire du passage à l'action collective. Il y a de l'agora dans
l'air, un
goût d'université populaire, de débat public... ça m’intéresse.

Puis je fais un peu de repérage pour jouer "Grève du crime", forcément en
dehors du parc
mais idéalement à proximité, alors les choix sont limités. Pascal me montre
les photos et
le making off de "flash flesh", une démarche unique qui leur va très bien.

La compagnie numéro 8 pose des tableaux très forts avec ses "Monstres
d'humanité". Ils
font ressortir l'animalité féroce des grands, des riches. Ils poussent loin
(dès fois un
peu en force) des montées de sentiments, ça me donne très envie de les
rejoindre, de
jouer ce jeux, ça doit être très grisant. Les spectateurs, d'origines très
diverses à
Sotteville, sont pris dedans, ils vivent les scènes avec appétit et
écœurement. Les
images sont fortes, des scènes sont marquantes : humiliation, fauves,
buffet... Quand les
danseurs ont quelques choses à dire, ça déchire !

Du coup je rate les deux spectacles du pudding, je ne suis décidément pas
touriste, et
encore moins festivalier. La ronde des bises continue dans des tourbillons de
discussions
sur la Fédé, le rôle à jouer aux municipales, la place du cirque, des grandes
formes,
celle du théâtre, les processus de production, les stratégies de diffusion,
l'intermittence, le ministère, la ministre, le départ à venir de Daniel
Andrieu... C'est
prématuré, mais je lui tire déjà mon chapeau, car même si les temps étaient
plus propices
à la construction, il fait parti des bâtisseurs qui ont semés et fait pousser
du solide
sur leurs passages. Nous, la relève, nous pouvons (et devons !) toujours
inventer, mais
que pourrons nous construire ?

Arrive l'heure des grandes formes, dont je ne raffole pas, mais qui sont une
figure
imposée de Vivacité et des grands festivas. Les festivaliers du coin me
parlent encore
des "Anges" du Nouveau cirque de Marseille, 4 ans après leur passage ! Des
milliers de
personnes se pressent devant l'immense plateau des anglais (Wired areal
theatre). Je me
souviens avoir assisté à une présentation du projet lors d'une rencontre d'In
Situ, dans
laquelle il y avait tellement de superlatifs ("amazing, magic, fantastic...),
que je n'y
ai pas cru. Et bien, finalement le défis est relevé, au moins techniquement.
C'est du
propre et bien léché. Les danseurs, volants à plus 20 mètres de haut sur un
écran vidéo
sont d'une précision bluffante. On plonge dans le cauchemar planétaire d'une
fin du monde
lente et programmée.

Malgré l'heure tardive, nous prolongeons la soirée. Amélie met le feu de sa
danse funk
devant "la gueule des chevals". On me lance : "Elle déchire grave ta nouvelle
chargée de
diff' !". On se retrouve pour boire un dernier verre à l'atelier 231. Puis
nous rentrons,
et là, on retrouve mon petit camion tout ouvert, tout allumé, tout retourné :
plus
d'ordinateur, plus de sacs, plus de papiers, plus de clés... Il est 4 heures
du matin et
nous fouillons les recoins du quartier, les buissons, les poubelles à la
recherche de nos
affaires qui ne sont utiles qu'à nous... en vain. Après 4 heures de sommeil,
on passe 5
heures à l'Hôtel de Police et on rentre en looser à Rennes. La piqûre de
rappel est amère
: il ne faut pas faiblir, à la moindre faille, les rapaces se jetteront sur
toi.

Rhû !

Bouèb.

les grands moyens
théâtre de rue
http://www.lesgrandsmoyens.com/


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  • [rue] 44 heures à Sotteville, boueb, 05/07/2013

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