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[rue] des nouvelles de nos voisins


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  • To: Le Fourneau < >
  • Subject: [rue] des nouvelles de nos voisins
  • Date: Mon, 10 Feb 2014 21:58:05 +0100

Emeutes massives en Bosnie-Herzégovine

Par Jean-Arnault Dérens
Des émeutes violentes secouent la Bosnie-Herzégovine La situation échappait vendredi à tout contrôle. Les centres de Sarajevo, de Tuzla et de Zenica ressemblent à des champs de bataille. Les bâtiments publics sont incendiés, les manifestants réclament la démission de tous les dirigeants du pays

> C’est vers 14 heures, vendredi après-midi, que les manifestants ont investi le siège du gouvernement de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. Dossiers et ordinateurs ont valsé par les fenêtres avant que le feu ne soit mis au bâtiment. Deux heures plus tard, des flammes jaillissaient aussi du bâtiment de la Présidence collégiale de l’Etat. L’immense foule massée sur le plateau de Skenderija, en plein centre de Sarajevo, bloquait les pompiers, qui se sont vite résolus à faire demi-tour. En milieu d’après-midi, les bâtiments gouvernementaux des cantons de Tuzla et Zenica étaient également en flammes, tandis que des manifestations étaient recensées dans une bonne vingtaine de villes du pays – y compris en Republika Srpska, «l’entité serbe» de Bosnie-Herzégovine.

> La mairie de Tuzla a également été incendiée, tandis que les unités de policiers antiémeute déployées pour la défendre fraternisaient avec les manifestants. Si le centre de Sarajevo et de Tuzla ressemble désormais à un champ de bataille, ailleurs, les policiers, débordés, n’ont souvent même pas tenté de s’opposer aux manifestants. Partout, une seule revendication fédère les colères: «qu’ils s’en aillent tous». Les manifestants réclament en effet la démission de tous les responsables politiques, des maires, des députés, des gouvernements cantonaux, du gouvernement de la Fédération et de celui de l’Etat central… «Cela fait vingt ans que l’on dort, il est temps de se réveiller», répètent les manifestants.

> Les responsables politiques sont aux abonnés absents: le premier ministre du canton de Tuzla a démissionné, mais les plus hautes autorités du pays restent muettes et invisibles. Vendredi après-midi, le maire de Brcko, dans le nord du pays, a tenté de s’adresser à la foule, avant d’être brièvement pris en otage. Des manifestants ont chassé le maire de la petite ville de Gornji Vakuf à coups d’œufs pourris et aux cris de «Voleur! Nous voulons des changements!» Quelle que soit la couleur des élus, nationalistes ou sociaux-démocrates, c’est un même rejet qui frappe l’ensemble de la classe politique. Les ambassades occidentales et le Bureau du haut-représentant international en Bosnie ont lancé, vendredi après-midi, un timide appel au calme, qui n’a guère rencontré d’écho.

> Le mouvement est parti mercredi de Tuzla, la grande ville industrielle du centre de la Bosnie-Herzégovine, quand quelque 600 chômeurs se sont rassemblés devant le siège du gouvernement cantonal. Ils ont été rejoints par des employés d’entreprises publiques où les salaires ne sont plus versés depuis des mois, puis par des jeunes, rassemblés par le groupe de Facebook intitulé «50 000 personnes dans la rue pour un meilleur avenir». Les manifestants ont investi le siège du gouvernement cantonal, mais la violente réaction de  la police a contribué à durcir le mouvement. Au soir, on dénombrait 23 manifestants blessés et 27 arrestations. Jeudi, les manifestations ont pris un tour encore plus violent, les bâtiments officiels ont à nouveau été investis, des combats de rue ont ravagé tout le centre de Tuzla, tandis que plusieurs unités de la police fraternisaient avec les manifestants.

> «Au début, les plus déterminés et les plus violents ne sont pas les jeunes, mais les gens de 50 ans, qui ont perdu tout espoir», note une journaliste de Tuzla, en rappelant que le chômage touche officiellement 43% de la population active du pays, plongé dans une interminable crise économique. Toutefois, à Sarajevo, l’assaut de la présidence semble bien  avoir été donné par des jeunes, notamment des supporteurs de football, tandis qu’à Tuzla certains habitants tentaient, vendredi soir, de protéger les bâtiments publics de la fureur des protestataires.

> Dans cette étrange révolution sans leader ni programme, les réseaux sociaux semblent la seule boussole et, sur Facebook, la dernière mode consiste à publier des photos de manifestants au coude à coude, brandissant des drapeaux bosniaques, serbes et croates. Si la mobilisation reste la plus forte dans les régions majoritairement bosniaques, elle s’étend aussi à plusieurs villes serbes ainsi qu’à Mostar. Des rassemblements sont même annoncés pour les prochains jours dans les petites villes croates d’Herzégovine occidentale.

> Non sans ironie, certains rappellent que la Bosnie-Herzégovine n’avait jamais été ainsi unie depuis exactement trente ans… et l’ouverture des Jeux olympiques d’hiver de 1984. Sur la façade d’un bâtiment incendié de Tuzla, un graffiti a fait son apparition vendredi après-midi: «Mort au nationalisme».




  • [rue] des nouvelles de nos voisins, communication-annibal, 10/02/2014

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