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[rue] Re: [listenationale] Frais de mission du TNB


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  • Subject: [rue] Re: [listenationale] Frais de mission du TNB
  • Date: Wed, 24 Sep 2014 10:06:06 +0200

Bonjour Jacques.
J'ose à peine le dire mais je ne mets jamais les pieds au TNB.
Le Pilloüer pour moi, c'est un de ces glaçons chromé des beaux quartiers, qui passe en voiture luxueuse sans m'accorder un regard.
Le TNB pourrait abriter Standard and poor's derrière ses vitrages arrogants.
C'est aussi gros que la gare, plus gros que l'opéra, on y rentre comme dans un palace, en culpabilisant un peu de fouler le tapis rouge avec ses godasses.

Leurs affiches de saison sont rebutantes.
Souvent, on y voit un plateau froid et gris, avec des gens aux traits douloureux qui prennent des positions absurdes.
On y affiche des noms pédants d'auteurs disparus, ceux là même dont à l'école on me disait qu'ils étaient les plus grands, alors que deux pages suffisaient à m'empoussiérer toute passion.
Le TNB pour moi c'est la messe en latin, le satisfecit de l'élite, la sacralisation du théâtre culte.

Oui, je pense qu'ils doivent bien y amener des bus de scolaires.
Convaincus que le théâtre c'est vieux et chiant, ils doivent caresser la DS dissimulée dans leur poche avec affection, sur le trajet du retour.

J'ai un ami qui a fait l'école du TNB.
Il m'a expliqué comme il a été pris, dans la grande sélection des comédiens.
Principalement parce qu'il n'était pas très bon, ce qui assurait aux formateurs une matière vierge à formater.
D'autres comédiens de ses amis, bien plus puissants et singuliers que lui avaient été refoulés.
De ces années il retient que comme à l'ENA, l'enseignement compte moins que le réseautage.
Immergé au coeur du milieu du théâtre national, il s'est construit un carnet d'adresses, et a pu tourner de nombreuses années sur les scènes les plus prestigieuses de la nation.
Il apparaissait sur ces programmes en papier glacé, il était Comédien.

Pendant ces années-là, j'avais un goût vomitif de kerdane dans la bouche, je dormais en tente dans des campings municipaux, pour économiser sur ce que l'on gagnait au chapeau, et à Noël j'avais un peu honte d'expliquer comment je vivais, me drapant d'une fierté populaire qui ne convainquait personne.

J'étais déjà bien loin de la réalité de cet ami comédien, et à quelle distance de celle de Le Pillouër...
Bien sûr, la réalité est multiple, et composée de mondes adjacents.
Dans le leur, les un pour cent se sentent légitimes, avec cinq cartes bleues, cent amis influents, cent soixante mille euros de petits fours et l'unicité de leur mission culturelle.
Malgré la révolte qui me brûle au ventre, mes idéaux de justice s'émoussent au pied de leurs tours, trop hautes pour percevoir mes cris.
Alors je prends soin de mon monde.

Aujourd'hui mon ami est au RSA.
Il cherche désespérément quelqu'un pour l'embaucher, et pense à se recycler ailleurs que dans cette filière périlleuse.
Zéro dates. Pas de contacts. Juste un CV, que d'autres, plus jeunes, ont rempli aussi bien que lui.
Il n'est que comédien de scène nationale, autant dire qu'il ne sait rien faire.

Moi j'ai des amis, des vrais. 
On sait se débrouiller, on à appris à tout faire, on sait conduire, souder, conter, rouler, tomber et se relever, et je me sens en totale sécurité.
Même si l'intermittence s'écroule, je saurais toujours faire un cercle, faire rire, étonner, émerveiller, sans théâtre.
J'ai mille spectacles à venir, et même pas le temps de les monter, parce que je tourne, je rénove ma baraque, je me paye le luxe de faire de la musique, de voyager, d'écrire.
Je remercie l'adversité, je remercie l'alternative.

Alors Le Pilloüer peut bien passer comme un souffle au centre-ville, j'habite loin de là, ma fille est dans une école alternative, je milite alternatif, je mange alternatif, j'ai une banque alternative, je me soigne, je m'informe, je consomme alternatif, et je vis, heureux, comme tant de mes amis, de théâtre de rue.
Ses cinq cartes sont moins bleues que le ciel!


Finalement, le un pour cent, c'est nous.










Le 19 sept. 2014 à 23:09, Jacques a écrit :


 Amis des espaces infinis, et chère Présidente de la fédé Nationale 


J’espère que vous avez tous lu ce qui passe à Rennes au TNB, la cour des comptes a découvert des frais de mission astronomiques. 
La direction de la maison de la culture a un train de vie extravagant, il ne s’agit pas d’enrichissement personnel, mais de la vie de tous les jours. 5 cartes bleues, et 160 000 € de voyages, de réception, d’invitation de journalistes en 2009,  et plus de 100 000 € en 2012.

Le ministère de la culture ne dit rien car Le Pilloüer a été longtemps président du Syndéac et que la mairie PS de Rennes le protège.

Et puis comme partout, les salles sont remplies de scolaires qui laissent croire à une bonne fréquentation. C’est la cour des comptes qui le dit, mais peut être Chtou, ou Bernard Colin peuvent ils le confirmer. 

Je n’ose même pas demander une transparence sur  les salaires des directeurs des scènes nationales,  je sais qu’il y a des excès graves, c’est un sujet tabou. 

Je n’ose pas trop cracher dans la soupe car justement comme nous donnons un Shakespeare, nous sommes un petit peu programmés dans quelques scènes nationales. 

Mais quand on voit la misère de nos compagnies, je pense qu’il faut vraiment se battre pour un ré équilibrage des subventionnements , les inégalités sont écoeurantes. 

Je n’ose pas crier trop fort, je l’ai trop fait, et pour être programmé, il faut la fermer. 

Et puis si tu critiques on te dit que t’es un populiste  sur les positions du FN, car pour le FN c’est un cadeau  ce genre de révélations. 

Le délégué théâtre du Ministère Le Boueddec est de Rennes, il y a dix ans il était justement une compagnie dans le sou à Rennes, peut- être qu’il faudrait l’interpeller et profiter  de l’arrivée d’une nouvelle ministre. 

Bref, faut pas se laisser faire, c’est fatigant à la longue.


Jacques Livchine
Metteur en songes 












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