Gildas, tu me mets dans une
situation à la con avec ta question: oui j'ai
envie de te fournir une petite bagnole bien
fichue, autonome techniquement, avec quelqu'un
pour la piloter, tout ce qu'il faut et tout et
tout. Oui j'ai envie d'apporter ma patte à
un"croisement de talents". Oui je veux bien
proposer autre chose que du divertissement.
Oui, oui, oui....Mais......Il devait bien
arriver ce MAIS: mais à qui sert on la soupe
et pourquoi la sert on? Qu'est ce qui
pourrait bien motiver ma structure à rejoindre
un festival qui a refusé la dite bagnole. Et
puis déontologiquement ce festival pourrait il
l'accepter après l'avoir éconduite?
Je ne conteste jamais le fait même
d'un refus, mais parfois certaines motivations
m'interpellent. Par exemple le spectacle qui
va avec cette petite bagnole a été retoqué non
pas parce que: "c'est pas pour mon public" ou
"tu comprends on a de moins en moins de
budget" ou un plus franc et très rare "j'aime
pas". Non. Ce spectacle a été retoqué parce
qu'il n'est ni passé par un financement public
ni par un accueil institutionnel. Ce spectacle
a été retoqué parce qu'il s'est fait en
autoprod...Et ça c'est aussi une "prise de
risque". "Tu n'ai pas passé par chez moi? Tu
n'existes pas" pourrait être une devise
accolée aux frontons de nos centres nationaux
(pour ceux qui ont des murs!) Mon constat est
que "le CNAR sert le CNAR" et pas grand chose
d'autre finalement.
Alors qu'est ce que je fais? Je le
fais parce que c'est toi? Ou je ne le fais pas
parce que c'est eux?
Ni aigre, ni revanchard, (je n'avais
sollicité personne pour cette auto prod) je
t'ai livré simplement ce fait. Je vais
rencontrer bientôt B2B, que j'apprécie par
ailleurs, pour lui présenter quelque chose
pour 2017/2018. Pas dupe, comme toi, il faudra
bien que je rentre dans le rang. Et à mon tour
je dirais peut-être:"j'adore les CNAR".
Amicalement.
"
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Mes doigts se sont suspendus un
moment au-dessus du clavier, réalisant ce
que j'avais à vous dire serait mal perçu par
plusieurs centaines de personnes sur cette
liste, qui pensent que les Cnar sont des
citadelles hautaines, s'accaparant les
subventions qui devraient revenir aux
compagnies, déconnectées de la réalité de
notre terrain, et sourdes à nos réels élans
artistiques.
D'autant que plusieurs centaines
d'autres personnes, et parfois les mêmes,
pensent également que les programmateurs
sont généralement des cons, qu'ils se
connaissent tous entre eux et forment une
mafia amicale, ne prennent aucun risque et
cantonnent leur programmation à des formes
politiquement présentables pour maintenir
leurs privilèges.
Mais à vous tous qui vous
reconnaissez dans ces opinions, je dois vous
dire que j'ai vécu récemment une expérience,
qui tend à prouver que deux d'entre eux
échappent à cette sourde malédiction.
C'est là une nouvelle
suffisamment heureuse pour que je vous la
raconte.
Je partageais un repas avec un
directeur de Cnar, celui de
Poitou-Charentes, puisque je travaillais mon
nouveau spectacle dans les hauteurs cossues
de sa citadelle, qui s'avéraient être en
fait les sous-sols spartiates d'une salle de
spectacle communale.
Je n'allais pas me priver de
dire tout ce que je pense, et j'attaquais
sur mon agacement à entendre parfois dire
que les artistes ne prennent plus de
risques, que les spectacles se formatent
selon le cadre des festivals, que l'art de
rue se commercialise et perd de sa fougue
créatrice originelle.
Je lui soutenais que ce fameux
temps originel c'était celui d'années
infiniment plus clémentes politiquement et
financièrement, que les artistes aujourd'hui
étaient plus que jamais aux abois, en
danger.
Que c'étaient eux, les Cnar et
les programmateurs qui ne prenaient pas de
risques, car c'étaient eux qui avaient les
moyens financiers et politiques de laisser
la place à la création! Eux qui pouvaient
nous accorder des moments de rencontres
artistiques où nous serions libres de mêler
nos talents, sans regard vers la vente de
spectacles, eux qui avaient les coudées
franches pour nous offrir des moments
uniques et sans contrainte pour rencontrer
le public en sortant des cadres, en laissant
libre cours à notre art!
Eh bien il a dit d'accord.
Il en a parlé à ce fameux
programmateur (directeur de Coup de Chauffe
à Cognac) qui n'est pas franchement un
mafieux du milieu des arts de la rue, et
figurez-vous que celui-ci, audacieux, a
relevé le défi.
Au final de l'édition prochaine,
je vais donc avoir le plaisir d'inviter bon
nombre des artistes programmés dans le
festival à croiser leurs talents pour une
forme unique, joyeuse et inattendue, comme
une carte blanche.
Je fais donc aujourd'hui appel à
ceux qui pensent que c'est une initiative
positive, et qui disposeraient de structures
déambulatoires.
Vous en avez peut-être qui
s'empoussièrent dans vos hangars; combien
les arts de la rue ont-ils créé de
structures déambulatoires qui dorment
actuellement?
Il s'agit d'accorder la part la
plus importante du budget à l'artistique et
aux cachets, j'en recherche donc, que je
pourrai modestement vous louer.
Je cherche tout simplement une
structure à suivre que je puisse équiper en
lumière et son, sur laquelle serait juchée
un comédien.
Je vous remercie d'avance de
votre solidarité.
Salut la rue,
Chtou