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«Moi, le mois dernier, on m’a envoyé dans le centre de la Boulangerie, dans le XVIIIe arrondissement. J’y suis resté une heure, avant de fuir. Là-bas, c’est sale, dégoûtant. C’est la Libye. C’est la honte de la France. Pouvez-vous passer une nuit entouré d’ivrognes, de drogués, de malades ? Dans les locaux, il y a des souris, de la pisse et de la merde. Restez-y une heure, vous allez tomber malade. Dans chaque CHU [centre d’hébergement d’urgence], les gens m’ont pris par le coude, m’ont dit "Restez, on va trouver un coin pour vous". Sérieusement ! Trouver un coin ? Si vous deviez choisir, pour passer la nuit, entre la rue et des toilettes sales, où iriez-vous ? Dans la rue, bien sûr ! Alors sachez que certains centres d’accueil sont pires que des toilettes. C’est pour ça que, quand il neige, certains préfèrent marcher dans la rue ou dormir dans le métro. Ceux qui y vont encore [dans les centres délabrés, ndlr] ont abandonné toute dignité. Ils sont en dessous de tout ça. Voilà pourquoi nous sommes autant dehors en hiver. Ce n’est pas un choix. Loin de là. Je veux garder ma dignité, monsieur. Je ne veux pas passer mes nuits dans les gares. Je ne suis pas en colère contre vous, monsieur le Président, mais il faut nous aider.»

(Recueilli par Paul Leboulanger)