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RE: [rue] le plein emploi


Chronologique Discussions 
  • From: François Mary < >
  • To: "'Marie-do Freval'" < >
  • Cc: < >
  • Subject: RE: [rue] le plein emploi
  • Date: Thu, 17 Jan 2019 02:07:20 +0100

Oui, merci Marie-Do. Texte largement diffusé sur internet et relayé sur le
site de Politis -

https://www.politis.fr/articles/2019/01/un-intermittent-repond-a-la-lettre-demmanuel-macron-39841/?fbclid=IwAR1m38R9FMXEfeNQ8pq-hX8sW0LBx3jS-Ixy7sXo5oUa7n5tCiRnmJrfdBI

Bien à toi,
François

-----Message d'origine-----
De : Marie-do Freval
[mailto: ]

Envoyé : mercredi 16 janvier 2019 09:05
À : francoismary
Cc :

Objet : Re: [rue] le plein emploi

Très beau texte / belle analyse !
Bien d’accord pour ma part
Merci François

Marie Do Fréval
Directrice artistique de la Cie Bouche à Bouche
0687274847
www.cieboucheabouche.com

> Le 15 janv. 2019 à 23:09, francoismary
> < >
> a écrit :
>
> A PARTAGER SI VOUS LE SOUHAITEZ
>
> Réponse à Emmanuel Macron
> Paris le 15 janvier 2019
>
> Monsieur,
>
> Vous m’avez écrit le 13 janvier dernier, il était donc tout à fait normal
> que je vous réponde. Pour commencer et avant de développer plus amplement,
> je tenais à préciser que je ne me sens pas faisant partie de « votre peuple
> ». En effet, et il me semble que cela est peu relevé, vous employez souvent
> l’expression « mon peuple » pour parler des habitants de France. Si je ne
> conteste pas mon appartenance au peuple, je revendique le fait de ne pas
> faire partie du vôtre. D’ailleurs faudrait-il se poser la question : aussi
> qu’entendez-vous par « mon peuple » ?
> Cette précision faite, je voudrais essentiellement vous répondre sur un
> sujet qui devrait à mon avis être au cœur du débat : celui de l’emploi à
> tout prix et de la valeur travail dont vous parlez tant. Votre phrase «
> tous les français n’ont pas le sens de l’effort » en est une parfaite
> illustration. S’il est vrai que le mépris dont vous faites preuve
> régulièrement envers celles et ceux qui sont au chômage n’est pas partagé
> par tous, l’hypothèse jamais remise en cause de « l’emploi à tout prix et
> sa valeur travail » fait l’unanimité dans la classe politique. L’emploi à
> tout prix est même une obsession chez vous puisqu’il est au cœur de toutes
> les phrases pleines de morgues, devenues célèbres, prononcées du haut de
> votre grandeur sur un piédestal devenu bien fragile. Pour rappel, car les
> mots ont un sens et la parole est performative :
> « Le meilleur moyen de se payer un costard, c’est de travailler » (Ecole
> numérique de Lunel dans l’Hérault, 27 mai 2016)
> « Une gare, c’est un lieu où l’on croise les gens qui réussissent et les
> gens qui ne sont rien » (Halle Freyssinet Paris, 29 juin 2017)
> « Je ne cèderai rien, ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes »
> (Ecole française d’Athènes, 8 septembre 2017)
> « Certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux d’aller regarder
> s’ils ne peuvent pas avoir des postes là-bas » (Corrèze, 4 oct. 2017)
> « Je traverse la rue et je vous en trouve » (à propos du travail, adressé à
> un chômeur, jardin de l’Elysées, 16 sept 2018)
> Et ajoutons sur les « migrants » :
> « Le Kwassa-kwassas pêche peu, il amène du comorien » (Ethel, Morbihan, 1er
> juin 2017)
> Personne n’a relevé que derrière la violence inouïe de ces propos se
> cachait une idéologie hélas partagée par une grande majorité. Cette
> idéologie est posée comme hypothèse jamais remise en cause, elle est le
> fondement de toutes les politiques et l’obsession des commentateurs :
> rétablir le plein emploi afin que chaque citoyen s’épanouisse.
> Tout d’abord monsieur, le plein emploi n’existe pas et n’a jamais existé.
> J’ose espérer que pendant vos nombreuses années d’études, vous n’avez pas
> séché ce chapitre. En effet, vous n’êtes pas sans savoir que le plein
> emploi que la France a connu était un plein emploi fictif : une époque
> (années 50 et début années 60) où presque la moitié de la population
> n’était pas employée à savoir les femmes. Et c’est d’abord une mise au
> point à faire : si nous voulons comprendre l’enjeu de ce débat, il faut
> impérativement différencier l’emploi et le travail. Ces deux termes ne se
> recouvrent pas.
> L’emploi est obligatoirement sanctionné par une fiche de paye. Après avoir
> dit cela, on comprend parfaitement que bon nombre de personnes travaillent
> sans être employées.
> A commencer par l’immense majorité des femmes après-guerre qui ont
> énormément travaillé (élever les enfants, tâches ménagères, etc. etc.) sans
> être employées. En vous écrivant je travaille sans être employé. La liste
> de celles et ceux qui travaillent sans être employés est immense, à
> commencer par tous les étudiants.
> Pour comprendre l’aberration du plein emploi tant souhaité par beaucoup, il
> suffit de poser les chiffres :
> Il y a 6 millions de chômeurs dans ce pays (source les échos : chiffre au
> plus bas si l’on considère uniquement les inscrits à Pôle Emploi). Même si
> l’on arrivait à créer 1 million d’emplois (ce qui serait énorme), il
> resterait encore au minimum 5 millions de personnes précarisées. On en fait
> quoi ? On en parle ou elles sont quantités négligeables ?
> En ce domaine, force est de reconnaître que vous n’avez pas l’exclusivité
> des recettes à coups de baguettes magiques. Certains sur votre gauche
> préconisent l’interdiction des licenciements et le partage du temps de
> travail. Je n’ai rien contre ces propositions, mais elles sont mensongères
> quand elles prétendent résoudre le « problème de l’emploi ». D’autres sur
> votre droite avancent la funeste préférence nationale sur le thème « les
> émigrés dehors, les français d’abord ». Inutile de dire à quel point les
> défenseurs de cette thèse sont aussi dangereux que menteurs. Tous ces
> programmes sont souvent résumés en une phrase : « Avec moi, le retour au
> plein emploi ».
> Ces promesses sont et seront toujours un mensonge. Mensonge aussi énorme
> que de supprimer le remboursement des médicaments sous prétexte que
> personne ne sera plus malade.
> Ainsi pour vous et la plupart de vos collègues, le salarié proche du
> licenciement est un « client », un sujet digne d’intérêt. Vous allez à
> grands renforts de déclarations dénoncer la fermeture de certaines usines,
> même si en tant que libéral votre religion vous interdit d’être trop
> véhément. Mais quand ce même salarié se trouve au chômage, il passe à vos
> yeux de victime à coupable ! Non seulement vous le négligez mais pire :
> vous le méprisez, le contrôlez, le harcelez et le forcez à accepter
> n’importe quel petit boulot à n’importe quel prix. Et cela au nom de la
> sacro-sainte valeur « travail » qu’il faudrait d’ailleurs appeler « emploi
> ». Car voyez-vous la méprise est dans ce mot. La valeur travail dont vous
> parlez, l’immense majorité des chômeurs la partage. Mais ils n’en ont pas
> la même définition que vous. Lorsqu’ils sont autour des ronds-points à
> parler politique, lorsqu’ils font des propositions sur une fiscalité juste
> assortie de services publics renforcés et non dégradés, lorsqu’ils élèvent
> leurs enfants, lorsqu’ils font partie d’une des milliers d’associations
> sans lesquelles la France n’existerait pas, lorsqu’ils aident leurs amis,
> lorsqu’ils participent au grand débat national que vous organisez, …, ILS
> TRAVAILLENT.
> Mais au fait, pourquoi la valeur travail ou plutôt la valeur emploi
> serait-elle prioritaire ? Pourquoi serait-elle supérieure aux autres
> valeurs ?
> Voyez-vous, je revendique tout autant salutaires et indispensables les
> valeurs repos, partager du temps avec ses amis, ses enfants, aller au
> spectacle, au cinéma, lire un livre, écouter une chanson, regarder la télé,
> manger un bon plat, aller en vacances, aller au musée, échanger, aimer … La
> liste n’est évidemment pas exhaustive. Ce que vous appelez « valeur travail
> » est souvent synonyme d’emploi pénible très mal payé, d’emploi à temps
> partiel loin de chez soi, d’emploi subi et non choisi. En quoi la valeur de
> ces boulots asservissants serait-elle supérieure à une seule des valeurs
> citées ci-dessus ?
> Et pourtant, au nom de cette sacro-sainte valeur, votre collègue et ami
> Nicolas Sarkozy pouvait tranquillement humilier le « chômeur qui se lève
> tard » et l’opposer au « smicard qui se lève tôt », Manuel Valls tout comme
> Laurent Wauquiez pouvait surfer sur la rhétorique des « droits et des
> devoirs », et vous pouvez maintenant fustiger le manque d’effort de
> certains français autrement dit en langage courant des fainéants de
> chômeurs.
> C’est encore au nom de cette « valeur travail » que la France dépense plus
> de 100 millions d’euros par an pour l’emploi à tout prix, allant même
> jusqu’à financer Alstom pour des TGV qui ne serviront à rien puisque promis
> à des lignes régionales non équipées. Cette folie de l’emploi a notamment
> conduit au CICE, ce fameux plan d’aide aux entreprises qui devait créer 1
> million d’emplois et qui n’a de fait eu pour conséquences que
> l’augmentation obscène des marges des plus riches !
> Voyez-vous monsieur Macron, je peux pardonner toutes celles et ceux qui
> croient en ces âneries comme on croit en la théorie du complot ou en
> d’autres sectes largement répandues, mais en ce qui vous concerne, je sais
> que vous savez.
> Je sais que vous savez que vous êtes en train de détruire toutes les
> fondations mises en place par le Front Populaire et le Conseil National de
> la Résistance, que votre but est notamment de participer au transfert de
> fonds de la sécurité sociale vers les mutuelles, une sorte de privatisation
> bien masquée, de piétiner le principe de retraite par répartition, de
> continuer de détruire un à un les services publics en les privatisant (et
> les gilets jaunes ont bien raison de pointer le scandale de la
> privatisation des autoroutes, car vos prédécesseurs ont évidemment commencé
> le travail).
> Je sais que vous savez que le fameux « modèle social français » ne sera
> bientôt plus qu’une ligne dans les livres d’histoire.
> Je sais que vous savez que les petits boulots sont pénibles, non
> attrayants, très mal payés, mais qu’ils sont nécessaires à votre politique.
> Je sais que vous savez que lorsqu’on s’attaque au droit des chômeurs, des
> plus précaires, on s’attaque aussi au droit des salariés à l’emploi
> stable. En effet moins les chômeurs ont de droits, moins les salariés en
> CDI ont le choix de dire « non ». Auquel cas on leur répond : « y’en a 200
> qui attendent ta place ». L’attaque contre les chômeurs a des conséquences
> directes sur les salaires et conditions de travail des autres travailleurs
> : ils sont forcés d’accepter n’importe quel boulot à n’importe quel prix
> pour ne pas vivre l’horreur du chômeur stigmatisé, méprisé et sans argent.
> Je sais que vous savez qu’en organisant la guerre contre les chômeurs, vous
> favorisez le dumping social et les employeurs peu scrupuleux qui soutenus
> par vos réformes n’hésitent pas à pratiquer l’esclavage moderne.
> Je sais enfin que vous savez qu’en pratiquant cette politique injuste, vous
> contribuez à creuser le fossé entre les inclus et les exclus, entre vos
> amis et les laissés pour compte de plus en plus nombreux, entre ceux qui
> ont « amis bien placés » et ceux qui n’en ont pas, entre ceux qui auront
> toujours des emplois attrayants et les autres, entre les centre villes et
> les campagnes, entre les « bien nés » et les autres, je sais en effet que
> vous savez que le ruissellement n’existe pas, que l’eau est croupie depuis
> déjà longtemps et que vous n’avez aucune volonté de la renouveler.
> Pour toutes ces raisons, je vous trouve immonde (vous comme dirigeant
> politique pas comme homme) de vous attaquer encore aux plus faibles, d’oser
> demander 4 milliards d’euros d’économies en 3 ans sur le dos des chômeurs
> à temps partiel, et comble de tout de qualifier vos réformes de « justice
> sociale ». Car, voyez-vous, il n’est pas de plus grande injustice que de
> massacrer ceux dont vous pensez qu’ils seront incapables de se défendre.
> Je terminerai cette lettre en répondant à votre appel. Vous me demandez de
> participer au grand débat national, je ne ferai qu’une seule proposition :
> Sur le principe du régime général de la sécurité sociale chère au Conseil
> National de la Résistance donnant des droits inconditionnels attachés à la
> personne, je propose une assurance chômage inconditionnelle. Cette réforme
> permettrait à des millions de personnes de vivre dignement (au -dessus du
> seuil de pauvreté) et entraînerait la revalorisation des emplois pénibles.
> Cette réforme est tout aussi possible que la mise en place de la sécu. Ce
> n’est pas une question de financement, vous vous évertuez à dilapider les
> fonds publics pour des gens qui n’en ont pas besoin. C’est une question de
> priorité absolue.
> A bon entendeur
>
> Samuel Churin
>
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