Subject: [rue] Allo la Rue? C'est pour signaler un massacre...
Date: Wed, 26 Jun 2019 19:28:18 +0200
Qu'on se le dise!
Les annexes VIII et X ne sont pas touchées car nous entrons en
période estivale!!
Donc, nous ne sommes pas ENCORE touché.e.s...
Alors, si on ne se bouge pas pour nous, bougeons nous pour elles
et eux.
Pour nos gosses et les leurs ...
Avant de se plonger dans l'article, n'oublions pas que:
on
peut comptabiliser 10 à 14 000 décès par an en France du au
chômage.
Le
rapport 2018 du CESE confirme ce chiffre et précise: 500 à 600
suicides directement liés au chômage.
La
question du chômage est aussi une question de santé publique:
les maladies, rechutes de cancer, dépressions augmentent avec
le chômage. Le taux de mortalité s'aligne avec celui du
tabagisme.
Et très vite, si vous êtes sages, un aperçu en mode Avant/Après
de la nouvelle convention d'assurance chômage... on a fait une réu
d'info lundi à Toulouse (Syndicats PE, MNCP & CIP) c'est à se
tirer une balle... on est dessus, ça arrive...!
Assurance-chômage, les discrètes
manœuvres financières derrière la réforme
23 juin 2019, 22:19 CEST
La ministre du travail
Muriel Penicaud (à gauche) et le premier ministre
Édouard Philippe lors de l'annonce de la nouvelle
réforme de l'assurance chômage, le 18 juin 2019. Lucas
Barioulet/AFP
Sur le plateau
de BFM TV, face à Jean‑Jacques Bourdin, la ministre
du travail Muriel Pénicaud a déclaré le 19 juin : « Si on
ne fait pas d’économies, dans 10 ans on n’aura plus de
quoi indemniser les chômeurs ». Cette phrase-choc fait
suite à plusieurs
discours approximatifs qui ont pour objectif de
légitimer un plan de réduction des droits des chômeurs (à
hauteur de 3,4 milliards d’euros).
La réforme annoncée touche en effet en premier lieu les
allocataires, alors que plus de la moitié des inscrits à
Pôle emploi ne
perçoivent déjà aucune indemnisation. Elle rehausse
de 4 à 6 mois de la durée minimale d’activité requise pour
être indemnisé, dans les 24 derniers mois au lieu des
28 derniers mois. Par exemple, une personne qui a occupé
un emploi entre janvier et mai 2017 ne pourra plus
prétendre être indemnisée, bien qu’elle ait cotisé à
l’assurance-chômage. La reprise d’un emploi de courte
durée durant la période de chômage ne permettra plus de
prolonger la durée d’indemnisation, sauf si le contrat
excède 6 mois.
Autre mesure prévue : les indemnités-chômage seront comptées
d’une nouvelle façon. Au lieu de prendre les
salaires journaliers en référence (multipliant les
salaires perçus chaque jour de travail par le nombre de
jours du mois, ce qui protège les personnes avec des
contrats courts ou émiettés), le gouvernement entend
prendre le salaire mensuel pour base (la moyenne des
salaires par jour, en comptant les jours sans salaire).
Ainsi, une personne qui a travaillé 10 journées pour
500 euros, soit 50 euros quotidiens, est indemnisée sur la
base des 50 euros multipliés par 30 jours dans le mois. Sa
base fictive d’indemnisation est à 1 500 euros, pour une
durée bien sûr très réduite. Désormais, elle touchera une
allocation calculée à partir de 500 euros pour le mois
entier, quel que soit le nombre de jours travaillés,
c’est-à-dire divisée par trois.
Ces orientations sont rapportées par la ministre à un
impératif budgétaire. Qu’en est-il vraiment ?
Un rapport de force bouleversé
Avant tout, qu’est-ce que l’assurance-chômage ? Il s’agit
d’une institution qui récolte des fonds auprès d’actifs
chaque mois, afin d’indemniser ceux qui ont perdu un
emploi. À sa tête, l’Unédic assure la gestion quotidienne.
L’assurance-chômage repose sur une logique de risque
(chacun participe un peu au cas où il perdrait son
emploi), de mutualisation (les secteurs en expansion
aident les secteurs en difficulté), de contribution (le
niveau d’indemnisation dépend des derniers salaires) et de
redistribution (les faibles salaires sont mieux indemnisés
que les hauts salaires).
L’allocation d’aide au retour à l’emploi n’est pas un
secours payé par la collectivité aux chômeurs, mais un
droit ouvert aux salariés une fois qu’ils ont mis une
certaine somme au pot commun. En somme, c’est leur argent
qui leur revient. Cependant, l’allocation médiane,
c’est-à-dire que la moitié des chômeurs gagnent plus
tandis que la moitié perçoivent moins, est de 950 euros.
Les versements effectués aux chômeurs dans ce cadre
proviennent de deux sources : la cotisation des employeurs
prélevée sur les salaires (4,05 % du salaire brut) ainsi
qu’une partie de la CSG activité (1,47 point). Cette
dernière a remplacé au 1er janvier 2019 les
cotisations salariées – à part pour quelques catégories
comme les intermittents du spectacle ou les salariés
monégasques. Le régime d’assurance-chômage est donc
composé de flux financiers différents. L’un regroupe les
cotisations patronales, assises sur les salaires. L’autre
est voté chaque année par le parlement, via la loi de
financement de la sécurité sociale.
Cependant, le remplacement des cotisations salariées par
la CSG a bouleversé le rapport de force : désormais, seuls
les employeurs (qui acquittent les cotisations) et l’État
(qui gère la CSG) ont leur mot à dire. Les représentants
des salariés ont été placés
en marge du processus. Le statut des chômeurs se
joue donc désormais essentiellement entre les
organisations patronales et le gouvernement. Cette réforme
de l’assurance-chômage est d’ailleurs la première depuis
1982 à être intégralement décidée par l’État seul.
Manœuvres financières
L’Unédic est-elle donc en crise ? Pas du tout ! Sa
situation financière est même plus qu’équilibrée, si l’on
retient uniquement la tâche d’assurance. En effet, pour
2019, les bilans comptables prévoient 2 milliards d’euros
de manque dans les caisses de l’Unédic. Mais précisons que
cette dernière est contrainte de verser 10 % des
cotisations recueillies à Pôle emploi pour des frais
de fonctionnement. Cela représente plus de
3 milliards d’euros annuels, transférés de
l’assurance-chômage à Pôle emploi (55 % des frais de
fonctionnement de ce dernier – les salariés financent deux
fois plus Pôle emploi que l’État).
Cela correspond aussi exactement au montant que le
gouvernement entend faire supporter aux chômeurs. En
conséquence, sans cette ponction discutable et
indépendante des chômeurs, le budget est excédentaire
d’1 milliard. Au bout du compte, l’ensemble des
contributions d’actifs suffit à couvrir l’ensemble des
indemnités versées aux chômeurs. Le régime contributif
fonctionne et se finance seul. En cessant d’imputer le
financement de Pôle emploi à l’assurance-chômage, il y
aurait même assez de ressources pour verser une prime
exceptionnelle de 150 euros à chacun des 6 millions
d’inscrits.
L’amélioration du solde de
l’Assurance chômage confirme que l’équilibre de
moyen terme est assuré.Unédic
Cette situation structurelle s’ajoute à des manœuvres
financières plus discrètes, comme la substitution décalée
de la CSG et des cotisations-chômage. Ainsi, en 2018, la
hausse de la CSG sur tous les revenus a été décrétée au
mois de janvier, alors que les cotisations chômage n’ont
été baissées d’un montant comparable qu’en octobre. Ces
neuf mois d’intervalle ont permis de lever près de
6 milliards d’euros… qui ont été soustraits à l’Unédic
pour financer le budget étatique. Cela représente près du
double de la somme annuelle que veut récupérer le
gouvernement avec sa réforme !
Dans l’état actuel de ses prérogatives, l’Unédic connaît
un déficit depuis 2008. La grande récession économique,
suscitée par la crise bancaire privée, a durablement
bloqué le niveau des emplois et les salaires, amputant des
ressources. L’assurance-chômage est en effet cyclique :
lorsque la situation de l’emploi est favorable, elle
provisionne des excédents, tandis qu’elle subit des pertes
lorsque la situation de l’emploi est défavorable.
Contrairement à une idée reçue, elle n’est pas
spécialement généreuse par rapport autres pays
européens. En Belgique, en Italie, au Portugal, au
Luxembourg, en Suisse ou en Allemagne (avec enfant), le
montant d’indemnisation-chômage à l’inscription est plus
élevé qu’en France.
« Politique des caisses vides »
L’invitation à couper dans l’indemnité des chômeurs est
toutefois contradictoire. D’un côté, le gouvernement
annonce la diminution à 8 % du taux de chômage (au sens du
BIT). Comment peut-il simultanément agiter le spectre
d’une dégradation des comptes de l’assurance-chômage,
malgré un surcroît d’emplois et, donc, de financement ? Ce
paradoxe est renchéri par les prévisionnistes de l’Unédic,
qui jugent probable un retour à l’excédent pour
2021. Où est l’urgence à rogner les droits des
allocataires ? S’agirait-il plutôt de profiter du déficit
maintenant pour comprimer les revenus des chômeurs, avant
tout retour à l’équilibre ?
D’autant que plusieurs mesures politiques récentes ont
accru les difficultés de financement de
l’assurance-chômage. D’abord, une « politique des caisses
vides » a largement réduit les cotisations disponibles, en
jouant sur deux leviers. D’une part, la suppression
des emplois aidés et l’explosion du nombre de
travailleurs français en situation
de détachement a réduit le nombre de cotisants,
tandis que le recul de l’âge de la retraite a accru le
nombre de chômeurs allocataires.
D’autre part, le gel
des salaires dans la fonction publique (point
d’indice) et le secteur privé (smic) ont bloqué le volume
de cotisations. La facilitation du recours aux contrats
hors CDI, via les ordonnances Pénicaud, est aussi venue
renforcer les déséquilibres financiers de
l’assurance-chômage. En 2015, les cotisations tirées
d’emplois en CDI rapportaient 29 milliards
d’euros, tandis que les chômeurs ayant perdu un CDI
recevaient 19 milliards d’euros d’indemnisation. Le ratio
s’inverse totalement pour les détenteurs de CDD ou
d’intérim, qui reçoivent bien plus d’allocations qu’ils
n’ont le temps d’en verser durant leurs emplois
temporaires.
Dans ces conditions, la résilience de l’Unédic est plutôt
flatteuse… et les mesures gouvernementales qui figurent
dans la réforme pour tenter de juguler les contrats courts
apparaissent non seulement contradictoires, mais légères.
L’ajout d’une taxe
de 10 euros sur les CDD d’usage ne représente jamais
qu’une heure de smic brut en plus sur un contrat de
plusieurs semaines… surtout avec l’exonération prévue de
deux gros secteurs pourvoyeurs, le bâtiment
et la santé.
Les profits du déficit
De plus, les 3,4 milliards d’économies sur les chômeurs
feront sans doute l’objet de vases communicants. Une
partie des individus exclus de l’assurance-chômage
s’adresseront aux départements ou au régime d’assistance
pour faire valoir leur éligibilité à des prestations de
survie. Alors que le nombre de chômeurs représente plus de
20 fois le nombre d’emplois disponibles, l’inéligibilité
aux indemnités-chômage va les conduire soit à la
paupérisation, soit à l’assistance publique, soit aux
deux.
Mais le débat achoppe aussi sur la notion de déficit. Un
déficit désigne une situation où les dépenses d’argent
excèdent les recettes. Or, les discours publics actuels
focalisent uniquement sur le volet « dépenses » (trop
élevées), en oubliant le volet « recettes ». Pourtant, les
cotisations patronales n’ont presque pas évolué depuis
2003, fixées alors à 4 % du salaire brut. Elles pourraient
même baisser encore bientôt, puisque la contribution
patronale exceptionnelle de 0,05 % instaurée en
octobre 2017, est censée expirer avant le 30 septembre
2020. Les chômeurs paient-ils aujourd’hui un futur cadeau
fiscal offert à certains employeurs ?
Les déficits de l’Unédic sont-ils un problème pour tout
le monde ? Non, bien sûr. Au lieu de passer par la dette
publique, l’Unédic a émis ses propres titres financiers
afin de lever les fonds nécessaires dans les années de
pénurie. Un montant de 35 milliards d’euros s’est ainsi
accumulé, au terme de plusieurs années de crise de
l’emploi. Forte de ce fonds, l’Unédic
est entrée sur les marchés financiers. Dans ce
système opaque, le directeur de l’Unédic lui-même explique
ignorer « qui
sont les vendeurs et les acheteurs » des produits
financiers.
Au bilan, certains ménages ou sociétés ont acheté de la
dette Unédic et se sont enrichis par l’argent des
cotisations sociales ou de la CSG, à hauteur de
400 millions d’euros annuels d’intérêts. C’est le cas de Sicav-Fis,
fonds luxembourgeois qui détient environ 8 millions
d’euros en titres de l’Unédic… et pratique l’optimisation
fiscale dans son pays d’origine. L’assurance-chômage est
donc aussi devenue un terrain d’investissement lucratif.
Ce que les employeurs ne versent pas en cotisation est
donc payé, au prix fort, sous forme de taux d’intérêt.
Chercheur postdoctorant, CENTRE DE
SOCIOLOGIE DES ORGANISATIONS, associé au LABORATOIRE
INTERDISCIPLINAIRE POUR LA SOCIOLOGIE ECONOMIQUE,
Sciences Po – USPC