Filles et garçons du vingt et unième siècle
Nous avons tous rêvé de la même chose
j’arrive sur la place du village avec un tambour et j’annonce la représentation du soir,
“apportez votre chaise “
C’est la tournée de Molière sur ses tréteaux, le chariot de Fracasse etc
Philippe Fenwick l’a fait, au sortir de l’école du théâtre du jour de Debauche à Agen, en marchant à pied de villages en villages du nord de la France au sud
Et le cirque Bidon parcourait l’Italie et la France avec leur roulotte, leurs chevaux. Pas de portable à l’époque, pour les retrouver fallait suivre le crottin.
Je sais, vous n’aimez pas les souvenirs des anciens, mais ça m’amuse d’y penser.
Je ne dis pas que c’était mieux avant .
Nous avions honte d’être totalement marginaux, en dehors du système, gratuit.
Quand on parlait de nous, c’était pour nous traiter d’ amuseurs publics, de trublions etc
personne ne devinait, ni ne percevait la moindre démarche artistique.
C’est Michel Crespin qui nous a affublé du joli vocable : Arts de la rue. “Art”, ça te classe un peu.
Le seul avantage, comme nous étions peu nombreux, une douzaine, nous étions dans les douze meilleurs.
A l’époque il y avait deux personnages remarquables : Gintzbuger et Peter Bu et Danièle sa femme, Chacun avait son écurie avec un catalogue et ça partait dans le monde entier.
Cacahuète, Ilotopie, Generik, Off, Transsexpress , CIA , Oposito, les grooms et tant d’autres, on voyageait comme des malades.
La 2CV théâtre prenait le bateau pour la Corée ou le Texas, la Guillotine prenait l’avion pour l'Australie, Royal je n’en parle pas, ils sont hors concours -.
Jouer à l’étranger, c’est ce qu’il y avait de plus valorisant.
Je répète sans arrêt qu’un document raconterait le théâtre de rue français, sur le plan international, montrer que nous sommes un vrai mouvement artistique,
tous ensemble, nous présentons une force qui dépasse tous les Opéras, les théâtres nationaux, la Comédie Française.
Si on additionnait toutes nos tournées, on construirait une légende qui dépasserait celle du Tour de France.
Allez Artcena, sortez nous quelque chose, un album à Acte sud, vous avez des gens compétents.
Je prétends que le mouvement des arts de la rue, est la seule innovation théâtrale de la fin du vingtième siècle.
Le problème IN ou OFF, c’est de l’épicerie.
Quand j’étais au bureau de la fédé je voulais que l’on mette ça au programme des réflexions, j’étais tout seul, personne n’avait à se plaindre de ce système;
On paie bien à la Foire de Paris pour avoir un stand, alors on paie pour se montrer là où il y a du pro.
Ce qui me gêne c’est que lorsque en 2003, le Off d’Avignon avait quasiment disparu, les commerçants hurlaient : revenez, sans vous on meurt !
Aurillac ou Chalon avec 12 spectacles, sans Off, ce serait la mort assurée;
Nous faisons la joie des commerçants.
Je l’ai toujours dit : nous sommes les premiers financeurs des grands festivals, à ce titre la fédération Nationale pourrait tout de même faire partie des CA, ce serait le minimum.
Et puis, il faudrait remettre en question le concept des festivals -mastodontes.
Que les directeurs s’entourent de penseurs, de sociologues, de compagnies pour réfléchir à un nouvel élan.
En vingt ans, rien n’a changé… à part les préalables d’Aurillac.
Vous avez le droit de me contredire, je serais très content.
Quant à la presse, je suis “vieux jeu”, j’y crois encore un peu
120 000 spectateurs pour Avignon IN, 400 articles, France Culture toute la journée etc
Festivals des arts de la rue : Disons 800 000 spectateurs en additionnant tout ce qui existe.
Je ne vois jamais rien passer.
Thierry Voisin, tu as droit à combien de lignes dans Télérama ?
J’ai l’impression de radoter, mais j’ai le droit, je suis votre doyen, 76 ans, (46 ans dans la rue )
Faut faire bouger les lignes, Réfléchir ensemble
Ce sont les gens malheureux qui font avancer le monde
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