Des annulations, des reports, des réunions, du chômage partiel, des projets avortés, du télétravail et ...du silence. Nous n'aurons pas d'été et l'été c'est notre théâtre alors forcément ça fait chier ! On attend docilement le feu vert de Castaner pour nous remettre à la rue et travailler à la suite mais cette pause imposée a un petit goût de pavé dans la marre qui n’est pas pour me déplaire.
Et après...
Faudra t’il augmenter notre puissance de frappe et devenir encore et toujours plus incisifs pour dégoter des contrats, des coprod, des reports, des places dans les plaquettes ?
Allons-nous courir deux fois plus vite vers les 507h et les 10 pré-achats ?
Devra t’on mettre un peu plus sous pression nos chargé(e)s de diff pour vendre notre cam ? Envoyer deux fois plus de mails, distribuer encore plus de fly, encoller toujours plus d’affiches ?
Allons nous nous précipiter sur la saison 2021 comme des confinés sur du PQ ?
Faudra t’il construire de nouveaux garages à Avignon, de nouvelles ruelles à Aurillac ?
2021 sera t’elle une saison deux en un ?
Et si la deuxième vague était plus longue, deviendrons-nous tous des lecteurs en gros plan, des spécialistes du facebooklive pour clientèle culturelle confinée en mal de divertissement ? Des youtubeur en quête de likes ? Des rigolos sur les réseaux ?
Et puis..
Est-ce que les travaux que nous menions avant cette suspension auront encore du sens demain ? Devrons-nous raccrocher les wagons, rafraîchir nos créations comme on recharge une page web, entrer dans la course de l’édition spéciale ?
Que signifie un retour à la normale ?
Le théâtre a t’il besoin d’un plan de relance ?
Le théâtre doit-il creuser la dette pour se creuser la tête ?
Les arts de la rue auront-ils encore droit de cité dans un espace public mis sous cloche ?
Nos festivals baignent déjà dans une atmosphère sécuritaire. Les barrières Vaubans, les vigiles privés, les kilomètres de rubalise et les dispositifs anti voiture bélier font désormais partie intégrante de nos terrains de jeux. Devra t’on ajouter à cette liste des tonnes de plastique sanitaire, des hectolitres de gel hydro-alcoolique ? Nous avons eu l'exemple avec l'état d'urgence, nous savons qu'une fois installées les restrictions des libertés deviennent la norme. Comment et à quoi allons nous jouer demain ?
Après rue vide viendra rue libre, il faudra rebattre les cartes et réinventer les règles.
Et si ce bordel donnait un nouveau souffle, faisait éclore de nouvelle forme ?
Dandinons notre culture et son joli petit cul,
Dépoussiérons-nous, profitons-en, prenons le bol d’air qu’il était grand temps que l’on prenne
Dé-sclérosons-nous, dé-DRACssisons-nous, désabonnons-nous
Brûlons le plancher, le carton pâte et les rideaux avec
Cédons les CDN aux sans papiers, aux sans abris, au sens commun
Gardons le masque, jetons la plume et enfilons le gilet de sauvetage
Créons du théâtre de jungle, jouons sur des embarcations de fortune
Le théâtre (de rue) deviendra peut-être une zone d’immunité collective, le dernier endroit où l’on pourra s’injecter de l’utopie manufacturée main
On a du pain sur les planches, on trépigne, laissez-nous sortir...
En marche ? Ils ont dit En Marche ? Yallah !
Cie Du grenier au jardinFabrice Richert - artistique