Et Machine se barre :)

Adieu la liste rue !

Le mar. 23 août 2022 à 16:49, Chtou Gildas puget < " target="_blank" rel="noreferrer"> > a écrit :

La façade de l’hôtel de ville, dans sa cape organgée, toise la foule massée devant elle. 

À pleins poumons, Machin inspire le bonheur, et expire l’anxiété… Punaise, il est excité comme une puce, littéralement ! 

Une énergie bleue électrise ses membres, il pourrait faire des bonds de dix mètres, et à la fois il se sent minuscule, et il a un peu la pétoche…

Au pied de cette idole de pierre, on n’est jamais qu’un éphémère artiste de rue.

Dans le bain de cette foule, on n’est que le plus petit qu’un autre, on patauge avec ardeur, on essaye de se trouver une place, on se laisse porter au milieu de ses pairs.

Machin grimpe sur la fontaine, et au loin il voit Arnaud Aymar, en tenue de Tartare, se faire remettre les clefs de la ville par le maire.

Il adore Arnaud, bien entendu. C’est un génie. Quelle joie de le trouver à cet endroit !

On n’entend rien, le son est pourri, Machin est sans doute trop loin, de toute façon par principe, c’est toujours raté les inaugurations. 

Il prend la mesure du bonheur de revoir une inauguration ratée… 

Il va à nouveau pouvoir râler comme un nanti, maintenant qu’enfin, on y est. Le soleil ne nous brûle plus, l’air est doux et humide. L’aventure commence.

Oui, ça y est.

Machin a retrouvé Aurillac.

Le maire est vraiment quelqu’un de super.

Il apprécie Machin, il vient souvent voir son spectacle avec des amis ou de la famille. 

Il est revenu cette année, il est passé dans les loges juste avant l’entrée en scène, ils se sont serrés fort dans les bras, en se remerciant pour ce qu’ils faisaient pour les gens, l’un l’autre. 

Tu te rends compte ? C’est quand même beau, le maire, il affronte tous les mécontents, il prend des risques électoraux, il se bat pour le théâtre de rue, et il le remercie lui, Machin, le petit saltimbanque. 

Ce type est vraiment de notre bord. Il nous aime, tous.

Machin est également venu écouter le discours de la ministre de la Culture, au pot du off. 

L’entendre dire qu’elle a participé plusieurs fois en tant que festivalière, et qu’elle dormait sur un matelas à l’arrière de son camion… Quelqu’un qui a fait cela ne peut pas ignorer totalement ce que nous sommes !

Bien sûr, elle ne peut pas grand-chose, mais tout de même, Machin trouve cela super encourageant. 

Tant de beaux signes, tant d’espoirs pour les arts de la rue se révèlent.

Tant de gens qui nous aiment s’avancent.

Qui nous aiment toutes et tous.

Machin est optimiste, il a confiance dans l’avenir pour la profession.

Machin a retrouvé Aurillac.

Il se rappelle, il y a vingt ans, en 2003…

C’était la grève, l’intermittence était sur la sellette, ça débrayait, ça annulait, les compagnies se déchiraient, elles splittaient en pleine tournée.

Des bandes partaient empêcher les autres de jouer, des escouades sillonnant le festival venaient faire du bruit et hurler pour arrêter les spectacles en cour !

Là, oui, c’était vraiment la guerre, entre nous.

Machin lit ses copains, ses copines, s’envoyer du mépris et des vulgarités en pleine figure… C’est un peu triste, de se laisser aller comme cela à la malhonnêteté et à la violence.

Il se demande pourquoi certains veulent aveuglément faire croire qu’il y aurait deux camps qui s’affrontent. 

Les choses lui semblent infiniment plus nuancées que cela.

Il se dit : on était moins touché par Vigipirate, le vaccin et le passe sanitaire…

Et puis machin repense aux amis.

À tous ces frères et sœurs qu’il a croisés, tous ces professionnels comme lui qui partagent l’amour de l’art, l’envie de villes vivantes, l’humour, l’engagement dans les luttes, la passion du beau, la vie de nomades, le plaisir du collectif, le désir de communion, il pense à toutes ces convictions qui les rapprochent, qui les unissent.

Il sait que ceux qu’il lit, tout rouges, sont, quand il les rencontre dans le réel, des gens sympas, passionnés et passionnants. 

Tous. 

Machin serait prêt à passer un mois sur une île avec n’importe lequel d’entre eux.

Il pense enfin aux gens.

À ceux qui sont venus par centaines à son spectacle, rire, pleurer, applaudir à tout rompre, et lui dire tout leur amour des arts de la rue et de leur folle liberté.

Alors Machin se dit que c’est cela qui compte, plus que tout, plus que ce qui nous divise d’incompréhensions et de maladresses, ce qui compte, c’est notre chaos.

La liberté passe avant tout, la liberté est notre source.

La liberté de parole, la liste non modérée, la liberté d’_expression_, l’impertinence, la provocation, les jugements à l’emporte-pièce, les trolls, les cuites, les débordements, les jauges explosées dans les cours, les punks, les engueulades, les embrassades, la vie, la vie, la vie, la Rue !

Machin sourit, et reste abonné.

Machin a retrouvé Aurillac.

Chtou 

www.qualitestreet.com

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