Le 5 sept. 2023 à 13:26, François Mary < > a écrit :
Les bénéficiaires du régime d’assurance chômage savent que le maintien des annexes 8 et 10 tient à la mobilisation des personnes, organismes et syndicats. La renégociation prochaine avec la mise sur la touche de Mathieu Grégoire est un signal négatif. Face au Medef et à la macronie, mobilisation à suivre et à venir.
Manifestation interprofessionnellle et intersyndicale le 13 octobre.
J'apprends par les syndicats (cf le communiqué de la CGT Spectacle ci-dessous) que j'ai été écarté par le gouvernement du comité d'expertise sur le régime des intermittents du spectacle. Surtout - information beaucoup plus importante ! - j'apprends que j'y suis remplacé par Pierre-Michel Menger (un collègue sociologue du prestigieux Collège de France qui s'est intéressé aux intermittents il y a une vingtaine d'années).
Du point de vue collectif, et du point de vue de l'avenir des intermittents, cette annonce n'est pas un bon signal du tout. Pour ceux qui ne le connaissent pas, Pierre-Michel Menger c'est le sociologue qui a accompagné intellectuellement la réforme MEDEF-CFDT de 2003 (à partir de données non représentatives, de séries non homogènes, dont j'ai eu l'occasion à l'époque de montrer tous les biais). C'est aussi le sociologue qui a accompagné la réforme médiatiquement et politiquement en mettant l'accent de façon univoque sur les "abus" des intermittents. Pas encore assez restrictif à ses yeux après cette réforme de 2003, il prophétisait alors la nécessaire "explosion" du régime des intermittents et des déficits qui allaient s'aggraver de façon inévitablement "exponentielle". Vingt ans plus tard, l'histoire a montré l'inanité de telles analyses : l'accord de 2016 a fait l'inverse de ce que PMM souhaitait en revenant à des critères d'éligibilité moins restrictifs et, malgré cela, nulle explosion, nulle augmentation exponentielle du déficit dont il avait entretenu le fantasme n'ont été constatées.
Sa nomination peut sembler logique compte tenu de la proximité idéologique/politique entre le sociologue et le gouvernement actuel. Mais ce qui est plus étonnant et plus inquiétant, c'est d'abord que le gouvernement (dont on pensait qu'il ne souhaitait pas de vagues avec les intermittents) nomme quelqu'un qui a un réel projet pour les intermittents: un projet de démantèlement du dispositif actuel au profit d'une caisse professionnelle nécessairement beaucoup plus élitiste ou beaucoup plus restrictive en termes de droits. Ce qui est inquiétant et étonnant ensuite, c'est que Pierre-Michel Menger qui professe au Collège de France, l'institution la plus prestigieuse de l'université française, accepte cette mission relativement technique et ingrate. Pourquoi irait-il dans cette galère s'il n'avait l’espoir (et quelque assurance ?) que son projet pour les intermittents soit enfin mis en œuvre?
Du point de vue personnel - qui n'a pas beaucoup d'importance - c'est une page débutée lors du conflit de 2014 qui se tourne. J'ai été très honoré de la confiance accordée par les différents acteurs, les syndicats de salariés, les syndicats d'employeurs, les coordinations, les pouvoirs publics et par les premiers concernés. J'ai beaucoup bataillé pour promouvoir une analyse froide et dépassionnée de l'intermittence et de son indemnisation. Ça n'a pas été toujours de tout repos face à des organisations ou des personnes qui avaient délibérément décidé de se faire la peau des intermittents ou, plus communément, étaient absolument coincés dans une approche idéologique et morale : les "abus", les "optimisations" d'intermittents partant aux Bahamas dès leur seuil d'heures minimales pour renouveler leurs droit atteint, le "déficit" des intermittents qui vivent sur le dos des caissières, les intermittents qui ne peuvent désirer qu'un CDI (même s'ils l'ignorent et qu'il n'y a pas de CDI dans leur discipline/secteur). Les services de l'Unedic de l'époque en particulier m'ont donné du fil à retordre: davantage dirigés en mode "tontons flingueurs" que comme une instance au service de la démocratie sociale et de la scientificité, ils ont objectivement été des interlocuteurs-adversaires farouches.
Mais participer - à ma modeste place d'expert - à la négociation qui a conduit à la mise en place d'un nouveau régime en 2016, au retour au critère des 507h avec date anniversaire (dont la mise en cause avait suscité l'immense mouvement de 2003) a été passionnant.
Mais, puisque le gouvernement en a décidé ainsi, je recommencerai, comme en 2014, à participer au débat public de l’extérieur.
https://www.calameo.com/cgt.../read/004319747f51e81583296...
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Bien à vous,
François
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