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Re: [rue] dialogue avec Cacahuètes


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  • From: "Franck Halimi" ( via rue Mailing List) < >
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  • Subject: Re: [rue] dialogue avec Cacahuètes
  • Date: Sun, 10 Jun 2018 09:50:01 +0200

Salut, c'est Franck de Bourgogne.

Hé ben... moi, ça m'intéresse bigrement tout ce que je viens de lire là.

Que ce soit l'échange Jacques <=> Pascal ou le retour de Boueb, j'y vois les bouts de ficelle par lesquels on est capable d'entrer dans le champs de La Rue, par un côté ou par un autre.

Oui, il n'y a certainement pas Une Vérité ni Une Histoire, mais plusieurs façons de vivre et de faire vivre, de bouger et de faire bouger La Rue et les territoires.

Et si vous ne m'avez jamais vu venir avec un spectacle dans les grand-messes de La Rue (je ne suis jamais allé à Chalon, Aurillac, Sotteville,... que pour y porter le débat sur nos droits sociaux collectifs), c'est parce que ça ne m'intéresse pas de présenter les fruits de notre travail dans de telles conditions.
Parce que nous n'aimons rien tant que creuser des sillons dans des territoires où arts et cultures (au pluriel et en minuscules) ne vont pas de soi.
Parce que nous vivons, toujours avec des émotions différentes et à chaque fois renouvelées, la découverte par des publics bien loin de toutes ces considérations-là, notre rapport à la représentation.
Parce que c'est un choix que nous avons fait et que nous avons toujours assumé (Christophe des Grooms pourrait en témoigner, car nous les avions fait venir à Flavigny/Ozerain et Alésia pour une manifestation intitulée "Promenons-nous dans les voix" en 2009).
Parce que ce qui nous a toujours importé, bien au-delà de notre tout-à-l'ego bel et bien présent, c'est le souffle de la rencontre avec nos semblables si différents, dans les conditions exceptionnelles que notre travail est en mesure de créer, que ce soit en milieu rural dans le Morvan, dans les quartiers de La Havane, en hôpital psychiatrique à Dijon ou dans une prison pour femmes de Santiago du Chili.
Fin de la parenthèse perso et retour au débat. ]

En fait, ma vision de tout ça, c'est que nous, artistes, qui sommes à la fois les imaginateurs et les inventeurs, les constructeurs et les détonateurs, les impulseurs et les fabricants, le moteur et le carburant, le grain et la paille,... de tout un secteur d'activité qui génère des milliards d'euros de chiffre d'affaires, nous restons immanquablement les parents pauvres et les dindons d'une farce pas drôle du tout.

Car, sans nous, et quand je dis "nous", je parle des artistes au sens large du terme, et pas simplement ceux de La Rue (car pour ma part, en tant que auteur, coordinateur artistique, chanteur, comédien, producteur, chargé de production, de diffusion et de communication, metteur en zen, j'en passe et des meilleures..., je ne suis ni de La Rue, ni du Théâtre d'Intérieur, ni du Conventionné, ni du Privé, ni de l'Intervention en milieux scolaire, urbain, carcéral, rural ou hospitalier,... mais un artiste protéi-formes, sorte de pâte à modeler que j'ai appris à devenir au fil des expériences qui m'ont été données de vivre, qui se doit de s'adapter au milieu dans lequel il va intervenir et ne pas venir plaquer une modélisation rigide sur un territoire lambda), sans "nous", les artistes, que serait donc ce secteur d'activités si florissant ?

La culture contribue sept fois plus au PIB que l'industrie automobile

Dans un rapport commun au ministère de la Culture et au ministère de l'Economie paru début 2014, le gouvernement constate que l'impact de l'industrie culturelle total atteint 104 milliards d'euros, soit près de 6% de la valeur ajoutée dégagée en France. Une dépense à perte la culture en France ? Ce n'est pas ce que montre le dernier rapport conjoint des ministères de l'Économie et de la Culture. Selon ce rapport, la culture contribue à hauteur de 57,8 milliards d'euros au PIB (valeur ajoutée). Il s'agit de la valeur ajoutée directe, c'est à dire du seul fait des activités culturelles. Ce qui équivaut à 3,2% du PIB, soit sept fois la valeur ajoutée de  l'industrie automobile. Ces chiffres sont basés sur les calculs de l'Insee. Le chiffre ne paraît pas exagéré puisqu'une autre étude du cabinet privé Ernst & Young parue en novembre 2013 avait évalué le chiffre d'affaires direct des industries culturelles et créatives à 61,4 milliards d'euros.

670 000 emplois directs
Les choses sont dites : la culture rapporte au pays. Et pas seulement de l'argent mais aussi des emplois. Les seules entreprises culturelles emploient quelque 670.000 personnes, que leur profession soit culturelle ou non, soit 2,5% de l'emploi dans le pays.
À
​ ​
cela s'ajoutent les 870.000 professionnels de la culture qu'emploient les entreprises non culturelles.

Une étude inédite qui lie économie et culture
Le but d'une telle étude inédite, qui allie deux ministères que l'on a peu l'habitude de voir travailler ensemble était de calculer une sorte de "PIB culturel", explique-t-on au cabinet de la ministre de la Culture Aurélie Filippetti. Le meilleur moyen de faire reconnaître le poids économique de la culture.

Mais
​,​
pour avoir une vision claire de l'impact économique des activités de la culture, il fallait déjà définir ce que sont ces activités. Chose qui étrangement, au pays de l'exception culturelle, n'avait jamais été faite. Il a donc fallu s'appuyer sur les méthodologies de l'Union européenne et de l'Unesco. Résultat, l'étude prend en compte les valeurs ajoutées du spectacle vivant, du patrimoine, des arts visuels, de la presse, du livre, de l'audiovisuel, de la publicité, de l'architecture, du cinéma, des industries de l'image et du son ainsi que l'accès au savoir et à la culture, c'est à dire les bibliothèques et les archives par exemple.

L'intervention de l'État compte pour 13,9 milliards sur les 57,8 milliards

Un panel large qui permet à la fois de savoir ce qui rapporte, mais aussi ce qui coûte. Car l'étude a pris aussi soin de calculer ce que l'État et collectivités territoriales dépensent dans la culture. L'intervention de l'État représente un total de 13,9 milliards d'euros par an, et celle des collectivités territoriales 7,6 milliards d'euros dont une part en dotations de l'Etat. Des dépenses justifiées par l'intérêt que représente les activités culturelles pour l'économie, selon le cabinet d'Aurélie Filippetti.

"On parle beaucoup du poids nouveau des collectivités dans la culture mais l'Etat reste l'acteur principal", souligne le cabinet.

L'audiovisuel est le secteur qui capte le plus de soutien de l'Etat (5,5 milliards), notamment grâce à la redevance. Les secteurs les moins aidés sont les industries de l'image et du son, l'architecture, le livre, les arts visuels.

Nécessité d'accompagner la numérisation de la culture

La part de la culture dans la valeur ajoutée a régulièrement augmenté entre 1995 et 2005, date à laquelle elle atteignait 3,5%. Mais depuis, elle a reculé de 0,3 point.

Cette érosion, en pleine transition numérique, a diverses origines: évolution des marges, effondrement du marché du disque, mutations des lectorats, crise économique. Mais aussi la "captation" d'une part de la valeur ajoutée par les plate-formes numériques (Apple, Google, Amazon...) chargées de l'intermédiation entre les créateurs et les consommateurs.

"Elles se retrouvent en position de force pour attirer les ressources publicitaires et pour imposer leurs conditions aux créateurs", souligne l'étude.

​ ​
"Cela conforte nos réflexions sur l'acte II de l'exception culturelle", qui consiste à faire évoluer les outils de la politique culturelle à l'heure du numérique, relève-t-on au cabinet de la ministre.

L'impact total de la culture compte pour près de 6% de la valeur ajoutée de la France

Un enjeu d'autant plus important que les activités culturelles ont aussi un effet d'entraînement sur le reste de l'économie de l'ordre de 46,7 milliards d'euros grâce aux activités induites comme les matériaux utilisés, les loyers, l'électricité etc... Au total, l'apport de la culture à l'économie, y compris ces effets d'entraînement, atteint donc les 104,5 milliards d'euros, selon l'étude. Soit 5,8% de la somme de toutes les valeurs ajoutées (ce qu'est, par définition, le PIB).

Le rapport établit en outre "une corrélation positive" entre la présence d'une implantation culturelle et le développement socio-économique d'un territoire.

Fin de la parenthèse
]

Mais, revenons plutôt à nos mous thons : sans "nous", les artistes, que serait donc ce secteur d'activités si florissant ?
Hé ben... rien du tout ! Ou plutôt si... ce qu'il est en train de devenir de plus en plus : un secteur où le divertissement creux se doit de l'emporter sur toute autre considération, puisque ce que veut le pouvoir (qui, rappelons-le, n'est que le médiateur qui détient les cordons de la bourse commune), c'est avoir à sa botte une masse informe d'électeurs qui suit le mouvement impulsé par l'oligarchie dominante qui, elle, n'a plus qu'un objectif, maintenir une société peureuse sous pression pour mieux pouvoir la dominer.

Et notre activité d'artiste est donc le centre d'un cercle qui fait vivre des administratifs, des techniciens, des directeurs, des chargés de com', tout un tas de ministères, des zones géographiques entières, dont l'activité est plutôt plus florissante quand nous exerçons notre métier d'artiste que quand nous n'y sommes point.

Arrivé à ce point de mon argumentaire (je vous félicite de ne pas avoir décroché), vous êtes en droit de vous demander "mais, pourquoi donc Franck de Bourgogne repart-il, une fois encore, dans ses obsessions de droits sociaux collectifs et de la place de l'artiste dans la société ?" 

Hé ben... parce que je trouve que ça a justement fondamentalement à voir avec les échanges de Jacques et Pascal (alimentés par Bouèb).

Je disais donc que nous, artistes, sommes la pierre angulaire (ô combien friable) d'un système florissant qui, tel un parasite magnifique, nous bouffe la laine sur le dos et vit socialement bien mieux que nous. En effet, toute une structuration institutionnelle s'est mise en place depuis plus de 30 ans, avec des formations en management de la Culture, des DRAC (dépôts régionaux du Ministère de la Culture), des services culturels (des régions, des départements, des communautés de communes ou d'agglos, des villes,...), des institutions en mesure de délivrer subventions et budgets, jusqu'au sein-même de nos compagnies (où, pour des raisons économiques, on va préférer solidifier un poste administratif et laisser l'artiste à sa précarité sociale : c'est aussi l'une des raisons pour lesquelles je me suis autant investi la lutte des Coordinations d'Intermittents et Précaires - CIP),... bref toute une pyramide décisionnelle qui a droit de vie ou de mort sur nous, les artistes. Et qui, pour un dossier A4 mal rempli  (spaciale Deady Cast à Jacques L)  peut nous affamer, alors que c'est nous qui la faisons bouffer.

Il y a donc là une véritable mascarade et un putain de scandale : la pierre angulaire sur laquelle repose tout cette organisation est celle que l'on n'a de cesse d'attaquer et de maltraiter à tout bout de champ.

Alors, moi Franck de Bourgogne, je dis : "avant que de crever chacun dans son coin, on arrête tout, tous ensemble ! En effet, la liberté n'existe que si elle a l'occasion de s'exprimer. Et l'_expression_ de notre liberté, si elle est encore bel et bien réelle et actée dans nombre de nos spectacles, elle serait aujourd'hui bien plus efficiente ("effichiante", devrais-je écrire) si on l'exerçait vraiment en arrêtant tout."

Et c'est là que je raccroche ma remorque avec l'échange Jacques <=> Pascal : si, par le passé, La Rue a su se montrer créative, subversive, précurseuse, symbolique, miroir, ambitieuse, bousculante, ancrée dans le réel tout en s'imaginactivant dans des univers chimériques,... bref, si les artistes ont su, à une époque et dans un périmètre hors-les-murs, exprimer une liberté totale, faisant ainsi bouger les lignes de ce que pouvait représenter un spectacle et la perception qu'on pouvait alors en avoir, aujourd'hui, il en va tout autrement.

Et s'il en va tout autrement, c'est parce que les différents pouvoirs successivement en place (qui ne sont, en réalité, que des pions interchangeables, qui jouent tous la même partie pour le même maître) ont réussi à faire accroire au plus grand nombre qu'il y avait des enjeux qui dépassaient, et de loin, ceux de la liberté d'_expression_. Là où ils sont, Benjamin Franklin, Victor Hugo, Oscar Wilde, Franz Kafka, Alfred Jarry, George Orwell, Orson Welles, Richard Fleischer et consorts doivent se régaler (ou souffrir) d'avoir eu la vision des choses qui était la leur !

Aussi, pour pouvoir reprendre la main sur nos existences et sur ce qu'on a envie qu'elles soient, il ne tient qu'à nous de le faire. Mais, pour y parvenir, il va falloir qu'on soit prêt à sacrifier nos crédulités -devenues des croyances-, notre pensée à la papa -devenue un confort d'esprit-, et notre nombril -devenu le centre d'un monde perdu-, pour pouvoir actionner de nouvelles fonctionnalités (non alitées) de notre esprit d'artiste libre. Mais, surtout, être convaincus du besoin de croiser nos intelligences pour pouvoir "révolutionner" notre pensée, notre façon d'être et notre activité ("révolutionner" dans tous les sens du terme).

Pour pouvoir juste être nous-mêmes.

Voili.

Ami calmant.

@+ Franck de B.
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Le 9 juin 2018 à 17:16, Boueb < " target="_blank"> > a écrit :
Ah, mes amours de tontons du théâtre de rue !
La paire des pères de mes pairs, mes grands-pairs en somme !
J'espère que l'on se verra cet été, car je ne saurais attendre noël pour entendre à nouveau vos histoires.

La colère et l'espoir font vivre. C'est vraiment un beau cadeau que vous soyez en désaccord et qu'aucun des deux n'ait tort. La mort des arts de la rue... pourquoi pas, mais qu'est ce qui les tue ?

Et salularue !

J'ai observé et écrit les deux années passées sur ce sujet, me demandant si le renforcement sécuritaire tuait les arts de la rue. J'avais prévu d'en faire un résumé en mai-juin, mais me voilà tout nouvellement bien occupé à la coordination des Ateliers du Vent à Rennes, un lieu collectif d 'arts et de convivialité (création et expérimentation pluridisciplinaires, y compris politique ! ... euh, pardon "citoyenne" dit on poliment).

Je vous propose un bout de conclusion de mes écrits qui me semble faire écho aux deux tontons :

"La peur continue d’émousser la spontanéité sauvage et la féroce liberté des arts de la rue. Leur domestication est en cours depuis leurs premiers éclats contemporains. Professionnalisation, institutionnalisation et spécialisation ont structuré le secteur. Une évolution qui s’est traduite par une amélioration sous certains aspects et par une perte sous d’autres, effets ressentis différemment selon les personnes.

Mais alors, est-ce que ça meurt les arts de la rue ? Un des trois brins constitutifs s’amenuise : le théâtre contestataire, de fond et de forme, n’a plus sa légendaire et incontrôlable vigueur et le théâtre populaire n’a plus le sens émancipateur qu’il portait.

Pour les deux autres brins de l’identité plurielles des arts de la rue, il n’en est pas de même. Les grandes fêtes populaires évoluent encore et les héritiers modernes des saltimbanques et des forains circulent toujours.

Les arts de la rue répondent à la demande publique et privée : créer une unité autour d’un rituel rassembleur
spectaculaire d’un côté et, de l’autre, colporter illusion et espérance de manière divertissante et attractive.

Pour subvertir professionnellement, les arts de la rue ont besoin paradoxalement d’être capable d’une critique sociale qui propose une alternative à un État dur et répressif, et, que ce même État soit suffisamment démocratique pour accepter et financer l’opposition qu’ils expriment. La position est difficile à tenir. Que l’art contestataire se soit effacé ou qu’il ait été écarté, peu importe. Il n’a pas sa place dans l’institution puisqu’il ne peut pas être en même temps institué et continuer d’exister.

[...]

Les acteurs de arts de la rue doivent-ils choisir d’être libéral en composant avec la privatisation et la marchandisation de l’espace public, dont le processus n’est qu’aggravé par la conjoncture sécuritaire ? Doivent-ils faire le choix de répondre à la commande, publique ou privée, d’en être redevable et de se plier aux impératifs, politiques, publicitaires et sécuritaires ? Ce que nous enseigne la longue histoire du théâtre en extérieur, c’est que l’art a toujours dû négocier la survie de l’artiste, sa liberté de création et ses modes d’_expression_ : avec les intérêts des puissants, des religieux ou des marchands, avec les désirs de la bourgeoisie ou les besoins du peuple."

Si la lecture des 90 pages imparfaites de mon mémoire "Liberté extrême des arts de la rue et sécurisation sous état d’urgence - Penser et agir dans l’ambiance sécuritaire du festival d’Aurillac" vous intéresse, faites-moi signe.

Je vous embrasse les tontons, on se voit à Chalon !?
La bise aux cousines et aux cousins.

Bouèb

ps : merci Jacques de nous délivrer vos échanges, on voit bien que Pascal explique plus et explose moins quand il écrit à une personne et pas à une masse indéfinie d'environ 1664 lectrices et lecteurs.

Le 09/06/2018 à 14:25, Jacques livchine ( " target="_blank"> via rue Mailing List) a écrit :


J’écris à pascal Larderet en privé , puisqu’il n’est plus sur cette liste




 j’ai   l’impression Pascal que tu fais une confusion  parce que tu dis : 

je ne joue plus, je ne suis plus programmé 

donc le théâtre de rue est mort dans son entier,   comme si le théatre de rue ne pouvait pas exister sans Cacahuètes 

et tu mets la faute sur Crespin et Aurillac, là c’est un peu injuste , et puis tu t’en prends aux Cnars. 

Alors moi je ne suis pas plus scientifique  que toi, je suis autant de mauvaise foi que toi, je suis comme toi dans le brouillard le plus complet,  tous les jours je me demande 

à quoi cela sert tout ça, j’ai l’impression que plus rien ne s’imprime dans la tête des gens. 

Attention, tu sais pour moi le théâtre de rue est au théâtre ce que la psychiatrie  est à la médecine, c’est une des spécialités de la médecine  une des branches. 

Je regarde  les Molières, parce qu’ils se présentent sous la bannière théâtre, ils ne veulent pas de nous  parce que nous sommes comme les ostéopathes, nous ne  

sommes  pas reconnus, nous sommes des usurpateurs avec notre gratuité et notre côté Hors les murs. 

T’as l’air de dire la festivalisation a tué le théâtre de rue. 

Et je te dis moi que le théâtre de rue a prospéré  et grandi grâce aux festivals. 

Souviens toi, Peter Bu, qui a vraiment été un des grands connaisseurs du théâtre, il ne pensait pas RUE, ce n’était pas un intégriste  Rue, il pensait théâtre, et il a vite 

répéré  un nouveau souffle dans le théâtre et il a fait son festival “dehors dedans “ à Tours, et tu sais comme c’était magnifique.  Nous faisions partie du théatre pour lui. 

Nous en étions une des composantes 

 Un des plus grands souvenirs,  Tours, parce que justement il n’y avait pas que de la rue, mais plein d’autres expériences de théâtre. 

Notre mariage avec final dans la Loire , où l’on croisait aussi Léo Bassi  et mille personnes qui suivaient dans l’avenue principale 

et notre guillotine devant le palais de justice,  tout Tours croyait que c’était vrai. 

Pas de barrières, on n’arrêtait pas la circulation, on perturbait carrément la ville. 

et quand on jouait  on n‘avait pas de public mais des gens, c’est important les gens. 

Maintenant  on se gargarise d’espace public, alors que les rues sont barrièrées qu’il n’y a plus de circulation etc  et que les festivals deviennent de fait des espaces privés

avec du public de rue son programme à la main. 

donc oui, je le reconnais à l’époque,   on jouait pour de vrai dans la rue. 

C’était spontané, sauvage, enivrant. On ne cherchait pas du regard combien de programmateurs étaient présents. 

Très vite, l’international nous  a sauté dessus, toi grâce à Peter Bu, nous grâce à Gintz.   Nous étions innovateurs sans le savoir,  

et nous avons tourné comme des  toupies dans le monde entier. 

Nous étions  les seuls, nous étions donc les meilleurs. 

Des souvenirs incroyables,  l’Italie dans des petits villages autour de Genova, le port de Copenhague, la Corée , Houston, Amsterdam, le festival of tools, 

alors ce n’était pas de la programmation avec 100 propositions mais seulement une petite  douzaine ou même pas du tout.

Et ce qui est fou, nous commençons en 72,  en 1973 Digne sent la chose à Aix et les festivals vont naitre plus de dix ans plus tard. 

Pascal , ce sera ma lettre N° 1,  tu me réponds et on continue dans le désordre, et moi je publie sur la liste rue,   
Je crois bien qu’à deux, on va cerner les problèmes d’un peu plus près 


Pas de bises aux garçons 

 


 
Pascal me répond dans l’heure qui suit, toujours aussi excité d’ailleurs 



D’abord t’affirmer que Cacahuete doit tout à Peter Bu , je ne l'ai jamais oublié et il le sait .
Nous les avions invités plusieurs fois à venir passer quelques jours chez nous à Sete quand ils étaient à Strasbourg . Ils devaient venir il y a 3 ans une semaine et patatrac Daniella est tombé malade visite annulée. 
Te dire qu’il est revenu aussi à Maisons Lafitte dans leur ancien appart de la rue Pascal depuis 1 an.
Peter ne nous voit pas , juste il entend parler de nous après notre première sortie au festival d’humour de Vienne en 84 , à Avignon on apprend qu’il nous cherche , on lui montre 3/4 images et on discute un peu. 
Bingo il nous programme à Tours en 85 pour voir... on cartonne l’affaire du camping devant la mairie tenue alors par le censeur du X jean Royer on débute on tâtonne et 3 mois plus tard on se retrouve à Perspectives à Sarrebruck avec 4litres12, Bouvier Obadia etc.. le délire , on y croit même pas cette chance inouï aucun effort et on fait le buzz partout ou on passe commissariat à Sarrebruck et on enchaine festival de clowns en salle on joue dans la rue Chateauroux rebuzz . le Mariage à l’eau inspiré d'Ilotopie, les bains douches , puis L’enterrement  en 89 inspiré du mariage de l’Unité on se cherche encore.
On est lancé Peter nous prend dans son écurie. 
Polar Grenoble, bd Moulins, puis le forum des halles en 89 programmé par Peter avec tous les grands noms de la rue européen de l’époque on tire notre épingle du jeu en première partie du Roman Photo de Royal au fond du forum et un scandale avec la police pour les campeurs.

 
Le Zigom en 88 à grenoble ou je suis directeur artistique j’invente aussi à ma façon le grand rassemblement de rue sous couvert d’un festival d’Humour mi salle Mi rue très recopié sur Dehors Dedans en fait Peter est dans le comité de sélection. 
J’impose la coproduction de plusieurs spectacles 1 Les Squames de Kumulus son premier spectacle ,
 le Bivouac et café gasoil de Generik Vapeur leur premier spectacle d’envergure avant c’était un duo 

On sait aujourd’hui l’impact de ses 2 créations sur l’histoire de la Rue , aujourd’hui je peux le dire, quand en 87 Pierre et Cathy  étaient à Malakoff aux rencontres d’octobre, chez Edith,  je vois Pierre avec sa pompe à essence et Barth avec ses dessins de squames et de cage je dis bingo. 


Au Zigom en 88 j’ai un budget artistique de  2,5 millions de francs 350 000 euros pour la salle et la rue je fais 50 /50 ce qui met ce budget au double de celui d’Aurillac et Chalon et de fait selon les observateurs Peter, Gintz je fais le plus grand rassemblement de l’histoire de la rue avec les créations des squames de Bivouac Café gasoil , la première française de la mousse en cage et des gens de couleurs, Bassi, Roman Photo, Malabar avec le face à face évidement les grands oubliés de l’histoire, Gustave Parking créa , et l’Unité joue en meme temps au festival de Renata du théâtre européen la Guillotine.

250 appels à la mairie pour les squames le scandale réussi le débat sur l'autre . 

Puis un sponsor se désengage un mois avant la BNP et Elf réduit ses promesses et on se retrouve avec un trou important en gros il manque 1,2 million de francs sur le budget total du festival. 
Carrignon président de l’asso comble en partie le trou grâce à la lyonnaise qui envoie un cheque la veille du festival il manque grosso modo 250 000 francs au final 
La suite tu la connais, je suis mis au ban parce que jalousie des autres en particulier de Michel normal j’arrive j’ai 29 ans j’ai tout le double de ce qui l’a à Aurillac la meme année, je suis un gosse gâté . 
Et encore je loupe d’un poil la venue de Licedei avec Catastroph pour la première fois en Europe au Zigom , ils n’obtiennent pas les visas dans les délais et iront 45 jours plus tard à Aurillac. Et je tente sans succès de faire la première du PLM  d’Ilotopie.
On se fait la main à St Georges de Didonne festival d’humour et Eau salée ou le programmateur Michel Mandeau nous prend chaque année avec une carte blanche pendant 4 jours , on fait ce qu’on veut on essaye on garde on jette à l’époque on joue 3 voir 4 expériences par jour. 
Après avoir comme vous écumé les villes cocos auxquelles nous devons d’avoir réellement accompagnées les débuts de la Rue Aubagne Montlucon Nanterre Ivry St Denis Gentilly Oissel Dieppe et la banlieue parisienne pendant ce temps histoire de se faire la main. 

En 92 le grand départ, l’envol celui de la maturité 7 ans après notre création c’est à Perigueux MIMOS dirigé par Peter Bu qui nous offre une carte blanche sur 6 jours sur le thème le corps dans tous ses états , on développe et on créé plusieurs spectacles les vitrines, la vente des femmes , les sanimobiles, le cocktail cannibale, les Integristes qui deviendra plus tard la manie de droite. on cartonne télé nationale 5 fois la une consécutive de Sud ouest du jamais vu. 
Puis Tarrega Gent 92 dans la foulée et 93 à Chalon l’envol international.

Jacques un directeur de festival me propose depuis 1 an ou 2 d’organiser une rencontre réflexion à quelques uns sur le devenir des arts de la rue à Sete . 
Il s’agit de Renzo Barsotti Imaginarius Portugal le seul qui a programmé Market Platz après l’avoir vu résultat pétition contre nous avec 250 000 signatures déposé à l’ambassade de france à Lisbonne et démission de l’adjoint à la culture , Renzo sera remplacé l’année suivante.
Manuel Villanova Xarxa fiesta cultura accepte de participer , j’inviterai volontiers 1 ou 2 retraités fabien Gent , Diana brus de Graz qui depuis son départ de Stradda le festival est devenu insipide.
Et toi bien évidement peut être Jean Marie . je vous loge on discute 2 ou 3 jours tu en serais à l’automne la bise
Pascal



Je réponds


Dis donc, tu as une mémoire impeccable, je savais un peu de tout cela mais pas tout. 
C’est un excellent document pour qui aurait envie de raconter la grande saga des arts de la rue.  
Je comprends mieux  que tu aies de la haine pour tout ce qui se passe de nos jours, puisque peu à peu tu as été jeté  hors de l’histoire

Nous sommes d’un autre monde, nous aimions créer le scandale, irriter la société. Nous évoquons souvent nos heures de gloire  : c’était quand la police nous emmenait. 
Nous sommes fiers de toutes les interdictions que nous avons vécues. Nous étions des terroristes de l’art,  or les sensibilités ont changé, on n’y peut rien, le théâtre se vit dans le présent.   

Je me revois en 1980 devant un super marché à Elancourt., l’ASECO.  J’avais formé une bande de jeunes  que nous avions déguisé en super voyous, habillés de cuir noir  bardés de chaine et de tatouages. Ils se plaçaient sur l’esplanade et tapaient leurs chaines sur le sol en guise de chorégraphie. A l’époque personne n’appelait les flics. Les gens se disaient, c’est un peu trop exagéré pour que cela soit vrai. 

Aujourd’hui la France a peur, alors que le terrorisme est la plus petite cause de mortalité,  la probabilité de mourir dans un attentat est infime. 

Quand tu prétends que le théâtre va mourir, mais non, il va changer. Il doit changer. Le théâtre depuis les grecs subit  des mutations constantes, la plus importante c’est 

que d’abord très populaire, il va s’enfermer entre 4 murs vers 1500, et depuis 500 ans tout le monde croit que le théâtre c’est de l ‘indoor. 

A l’Unité nous ne sommes pas des intégristes de la rue, on cherche le meilleur des lieux pour jouer, nos kapouchniks c’est dans  une  petite salle pour 400 personnes, les boulons c’était dehors dans le froid pour 20 000 personnes, Macbeth c’est dans une forêt pour 160 personnes, la Nuit Unique ce sera pour spectateurs  couchés à la Belle étoile dans une prairie,  le parlement c’est vraiment pour place  publique et jauge de 1000 personnes maxi.





Réponse de pascal Larderet Cacahuètes 



Jacques  


Pour répondre à ta question un peu piquante pour me faire réagir.
Alors oui je considère que le theatre de rue est mort si une cie comme cacahuète ne peut plus jouer .

La raison en est simple, la rue a été supprimé des festivals de rue. 
Cacahuete refuse de jouer enfermée par des barrières , encadrée par des policiers ou des véhicules de sécurité.
Plus de rue aujourd’hui que des parc d’attractions, rues closes ou jardins parcs et autres cours ou autres ersatz de rue.
La rue la vraie celle que l’on a connu que tu décris ci-dessous on nous l’a prise, volée . 
Pour les raisons x, y ou z mais surtout parce qu’on a souhaité parquer le discours des arts de la rue. 
Etouffer la voix des rues . Cela a pris quelques années dorénavant l’opération est terminée. 
On a aseptisé toutes les formes.
On réunit 100% de gens qui adherent à ce discours écolo, bab’s, alternos, gauchos socialos et il n’y a pas de problème, plus aucun risque de débat passionné c’est mort tout le monde est d’accord. Par rapport à ça il y a beaucoup de spectacle qui me font carrément marrer pseudo engagé mes couilles.
Fiction de démocratie. 

Et surtout leurre miroir aux alouettes appelons ça comme on veut, foutu, terminé, ça me rappelle la nudité dans le theatre en salle à l’origine issue des mouvements performances et récupérés par le système de nettoyage culturel programmé par l’institution, aujourd’hui le nu oui mais pour la part de la population qualifié d’intelligentsia capable de comprendre par pour tous bien entendu.

La rue oui mais pour ceux qui sont capables de la comprendre.
Puisque la population a laquelle notre engagement initial s’adressait ne peut plus y accéder.
Alors la rue est morte.
Définitivement morte.
La mémée avec son panier sur le marché ne voit plus de spectacle de rue.
Le gars qui sort de son bureau non plus . 
J’en réfère à mon manifeste du theatre de rue que j’ai écrit en 88 déjà je pressentais que cela ne durerait pas  (voir dans le bouquin cacahuète)
On peut qualifier de néo-télérama le public de la rue comme celui des scènes nat. Avec 10/15 ans moins peut -etre pas plus.

Si Cacahuete en 2018 a 4 dates toutes en Espagne le pays qui a légalisé la marijuana en 1983 faut pas s’étonner.
L’allemagne Merkel terminé,  le marché de Berlin est passé par là,  4 annulations en Allemagne depuis le camion,  refus des autorités.
Tu veux que je continue à me battre mais contre qu ? i contre Daesh qui fait le jeu de la répression et allié de nos gouvernants qui en profitent pour réduire toujours plus nos libertés .
Non je préfère ma recycler dans autre chose. du plus local dans notre rue la rue de Tunis nous y passons beaucoup de temps nous y organisons plein de choses.
C’est un travail de terrain de fourmis qui nous va bien avec josy.
On a meme fait une page Facebook aller voir.

J’ai envie de proposer une conférence plutôt sous forme de discussion questions sur les 30 glorieuses des arts de la rue 1973/ 2003
Mais je pense que ça n’intéressera absolument personne aujourd’hui .
Tout le monde suce les cnars ,engage des frais (ches) administrateurs (trices) sortis de formation culturelles à la con pour faire de beaux dossiers et à peur de perdre l’amour des diffuseurs qui restent.


 
La prochaine sera sur le temps de la création comme outil de destruction de la profession et la dictature des résidences.

Bye
Merci de me réveiller.

Pascal 

 

  





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