Condamné à 18 mois de prison dont 12 ferme, le vidéaste Stéphane Trouille s’explique et fait appel28 décembre 2018
Maria. Commentaire de Jean-Pierre Charles, qui publie la photo : « TROIS MOIS de prison ferme pour Maria, femme, salariée, militante PCF, gilet jaune et casier judiciaire vierge ! C’est plus que ne peut supporter cette justice de classe. C’est plus que Cahuzac, c’est ce que n’a jamais eu Dassault, Balkany et Benalla réunis. » "Je n’ai jamais donné de coup à qui que ce soit", a rétorqué à la barre la militante du PCF, une boulangère de 37 ans condamnée à trois mois ferme. un cordiste en formation de 22 ans admet avoir porté un coup de pied. Mais s’il est intervenu, dit-il, c’est pour tenter de mettre fin à une bagarre, sans savoir qu’il s’agissait de policiers. De même pour un autre prévenu. Dans un communiqué, Stéphane Trouille s’explique. Nous publions son texte ci-dessous : « Le verdict de notre procès du mercredi 26 décembre où j’ai été condamné à 18 mois de prison dont 6 avec sursis plus une interdiction de manifester pendant 3 ans a été un nouveau choc, après le choc carcéral que j’ai vécu pendant les 12 jours de détention provisoire. De même pour les trois autres Gilets jaunes, Tom, Dylan et Maria qui ont également été condamnés à de la prison ferme et à une interdiction de manifester. Je reprends du poil de la bête, de nouveau porté par l’élan massif de soutien qui me parvient, lors du rassemblement pendant le procès, par le courrier, par les mails, par les réseaux, par les coups de téléphone, les SMS, ça n’arrête pas ! » « J’aimerais resituer le contexte qui nous a amené.es à être condamné.es si lourdement. Le samedi 8 décembre je me rends vers 9 h sur le Plateau des Couleures, zone commerciale de Valence (Drôme), pour manifester avec d’autres Gilets jaunes et exprimer mon mécontentement, ma soif de liberté, de solidarité, de justice, de démocratie. Alors que je quitte la zone commerciale avec une centaine de personnes, vers 13h15, je suis confronté à une scène d’agression dont sont victimes des Gilets jaunes. Je décide, comme d’autres, d’intervenir pour leur porter assistance, les protéger et porte trois coups de pied à un des agresseurs pour le repousser. Après ces trois coups, je me rends compte, à la vue d’un pistolet qu’un autre homme sort, qu’il s’agit de policiers en civil et je décide de quitter les lieux. Durant toute cette scène, qui dure environ 22 secondes, je n’ai à aucun moment entendu les policiers s’identifier et je n’ai à aucun moment vu leur brassard, pour le moins discret et difficilement décelable. Alors OUI, j’ai bien exercé une violence sur un individu, pour protéger des Gilets jaunes, pour faire fuir des personnes que j’avais identifiées comme des agresseurs. NON, je n’ai pas, nous n’avons pas « cassé du flic », « bouffé du flic », « foutu en l’air du flic », comme les mass-médias le martèlent depuis le rendu du jugement, reprenant largement les termes dramatiques du procureur. Un procureur qui fera allusion, dans ses prises de paroles, à la violence des Gilets jaunes en général, ne parlant pas des quatre personnes qui ont perdu une main suite à des tirs de grenades explosives GLI-F4 dans des manifestations, des douze personnes qui ont perdu un œil suite à des tirs de flashball, de la mamie morte à Marseille des suites d’un tir de grenade lacrymogène à sa fenêtre. De même, il ne mentionnera pas les Gilets jaunes morts sur les rond-points. Un procureur dont les réquisitions ont été reprises quasiment à l’identique par le juge. Un procureur qui, comme tou.te.s les autres, a reçu de la ministre de la justice, des consignes de grande fermeté dans une circulaire datée du 22 novembre « relative au traitement judiciaire des infractions commises en lien avec le mouvement de contestation "dit des Gilets jaunes" ». Dans cette circulaire, il est par exemple proposé aux procureur.e.s d’alourdir les peines prononcées en y ajoutant l’« interdiction de participer à des manifestations sur la voie publique […] pour une durée ne pouvant excéder 3 ans ». Voilà qui en dit long sur la liberté d’_expression_ et de manifestation et sur le souhait de museler les colères et les revendications des gouverné.e.s, sommé.e.s de rester à leur place. On coupe tout ce qui dépasse. » « Je voudrais ici remercier les médias libres et indépendants qui permettent d’avoir un autre prisme que celui des médias « mainstream », dont le traitement est pour le moins orienté et sensationnaliste. Un traitement qui est la plupart du temps basé sur une dépêche AFP à charge, mentionnant des prévenus qui voulaient « bouffer du flic », « des actes dégueulasses » et qui cite en grande majorité les paroles du procureur et du commissaire divisionnaire. Sur France Inter, dans le journal de 18 heures du jour du procès, mercredi 26 décembre, la journaliste présente sur place annonce, après avoir repris le réquisitoire du procureur, que je me suis excusé, ce qui est faux. Une manière de laisser penser que je reconnais que j’ai exercé des violences sur des forces de l’ordre, ce qui n’est pas le cas. Autre exemple local de détournement de l’information, le jour du procès, le Dauphiné Libéré, journal de la région, parle d’une ITT [incapacité totale de travail] « d’au moins 8 jours » pour le directeur départemental de la police, alors qu’il n’a eu en réalité que 3 jours d’ITT (pour info son collègue a eu une ITT de 2 jours). » « Avec mon avocat, nous allons faire appel. La décision du tribunal nous paraît complètement démesurée par rapport aux faits réels, ne prenant aucunement en compte la plaidoirie de la défense malgré quatre heures d’audience. Il est difficile de ne pas la considérer comme une sanction pour l’exemple, pour étouffer l’ardeur et les contestations actuelles contre l’État et les politiques menées par le gouvernement. La sentence est donc suspendue jusqu’au nouveau procès. Je tiens ici à avoir une pensée pour toutes les personnes qui sont derrière des barreaux, de par leur engagement, leur quête de liberté, leur énergie, leur engouement à ne pas laisser l’injustice prévaloir. Comme les Gilets jaunes, de nombreuses personnes en lutte sur d’autres fronts sont visées, que ce soit en France ou sur les routes migratoires vers l’Europe, en Libye, en Italie... Une pensée spéciale pour les « sept de Briançon », injustement condamnés pour certains à de la prison ferme pour aide à l’entrée sur le territoire d’une personne en situation irrégulière. Les ami.e.s, ne soyons pas tristes, résigné.e.s, abattu.e.s, nos villes, nos campagnes, nos ronds-points, nos places sont vivant.e.s comme jamais. Les pensées se politisent, les réflexions et les idées fleurissent, les actions s’enchaînent, les rencontres se multiplient, ça n’a pas de prix. La stratégie des gouvernant.e.s, en plus de nous faire peur, consiste à nous diviser, faisant porter la cause des souffrances sur le/la voisin.e, l’étranger.e, le/la marginal.e. Faisons grandir partout l’émancipation, la prise de conscience, la solidarité, la fête, la rencontre, le débat, l’amour. Les manières de s’engager sont multiples, tout le monde peut apporter sa pierre, ses bras, ses débats, son esprit critique, ses poésies, sa créativité, ses rêves... La pluralité des modes d’action et de pensée est notre richesse, il y a de la place pour chacun.e à sa manière et à son échelle… Adelante ! Ya basta ! Fêtons comme il faut cette fin d’année, 2019 n’en sera que plus vivante ! Ensemble on est nombreux.ses ! »
Quatre personnes, trois hommes et une femme, ont été interpellé-es, à Valence, lors du rassemblement des Gilets Jaunes et de la manifestation pour le climat du samedi 8 décembre. Ces quatre personnes ne se connaissent pas, alors qu’elles sont jugées pour violence en réunion, et ont été interpellées dans différents endroits de la ville et à différents moments de la journée. En attendant le procès qui va se dérouler le mercredi 26 décembre au tribunal de Valence, tous les quatre sont actuellement en prison (détention provisoire) et cela malgré toutes les garanties qu’elle et ils ont présentées (travail, logement, famille). La journée du 8 décembre a été marquée par une grande violence de la part des forces de l’ordre comme le montrent les vidéos publiées sur internet. On a dénombré pas moins d’une quinzaine d’interpellations. Nous citoyen-es, ami-es, voisin-es, familles, dénonçons ces actes de violence, cette incarcération illégitime et revendiquons notre liberté de penser et notre droit de manifester. »
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