D’emblée je le dis, je ne suis pas un spectateur normal, J’ai une compagnie qui a quasiment 54 ans d’âge, donc ça fait quasiment soixante ans que je vais au théâtre, alors faut bien comprendre qu’avant que j’apprécie quoique ce soit, il faut vraiment un ingrédient spécial, nouveau, une singularité, un étonnement Les spectacles sympas ne m’intéressent pas du tout, les spectacles où tu passes un bon moment non plus, Les solos de femmes, les seuls en scène, les duos de clowns ne sont pas ma priorité. Et puis je ne fréquente pas que la rue, j’arrive d’Avignon. Je suis un tantinet énervé, parce que la presse du monde entier est à Avignon, là- bas il y a un bar du IN auquel je n’ai pas accès, car le bar du IN est le rendez -vous de l’aristocratie théâtrale et même si j’ai fait parti du IN en 1982, je n’ai plus le droit au badge “bar du In “: On dit que c’est comme le palais de l’Allhambra avec des fontaines lumineuses, des bars gratuits des barbecues permanents, et de belles toilettes et des metteurs en scène bronzés sous leur costume en lin. Alors quand on va à Chalon on va vers le pouilleux, la plèbe, adieu la distinction, et même si Chalon fait environ 200 000 spectateurs, l’observatoire des politiques culturelles qui fait un bilan tous les 3 ans ne fait pas rentrer dans ses statistiques le théâtre de rue. C’est du théâtre sans billetterie alors on n’existe pas. je n’en finirai jamais d’être énervé. Pourquoi viens- je à Chalon dans la Rue ? Parce qu’il y a deux noms que je connais et que j’ai vus dans le programme et aussi j’essaye de comprendre les évolutions dans le théâtre, sachant que j’y étais en 1987, quatorze compagnies à l’époque et pas de off. J’y ai tout joué ou quasiment, et peu à peu extra-muros pour Macbeth en forêt et Oncle Vania à la campagne. Le festival affrétait quatre autocars. Même la Nuit Unique... Jusqu’en 2000 on n’ avait pas internet on recevait la plaquette par courrier là il y a un site auquel je ne comprends rien, moi en tant qu’ancien je fonce vers le Carmel, le quartier général. .Les festivaliers ont tous la même dégaine, plus tatoués qu’à Avignon et festival de piercings divers. Maintenant il faut avoir sa gourde, montrer qu’on hait le plastique. Tout a changé, plus de Carmel, fait chier, évidemment, on me parle du square Chabas. Horreur, le square poussiéreux du côté de la gare. Des toilettes dont le tiers -monde ne voudrait pas. Pas d’ombre je fuis. La plaquette est à vendre 4 €, celle du off d’Avignon de 1500 spectacles était gratuite mais style annuaire téléphonique à l’ancienne au poids de 500 grammes Faut se trouver un banc ombragé pour l’étudier. Car l’impro c’est fini, ça se prépare, Etre spectateur ce n’est plus je me ballade et je fais des rencontres, c’est un métier Mais moi qui ne suis pas du tout motivé, qui ai la phobie des spectacles ratés, moi qui suis fatigué de 4 jours d’Avignon, je’ lis de travers, rien n’est comme avant. Putain de désir il est parti. Le festival a ses zones réservées dans la ville. Se munir du plan Aube de la création : 15 compagnies, en 5 parcours. On ne sait pas ce qu’on va voir. Rendez -vous dans le haut de l’avenue Monnot, un centre socio culturel. Dans le public, ma grosse surprise, il y a ce qu’on appelle pudiquement la diversité ; des femmes voilées, des femmes à boubous, des mères de famille, alors là je suis sous l’étonnement le plus complet . Moi qui me plains sans arrêt du public TLM (Toujours les mêmes ) voici qu’un pan de la société qui ne fréquente aucun lieu culturel est présent. Ma curiosité me pousse à parler à l’une des femmes. `Vous venez au festival ? Ben oui Monsieur vous êtes du quartier ? Ben oui Monsieur les festival ça vous intéresse? Ben oui Monsieur vous voyez Et la pièce commence, esquisse d’un futur spectacle ça parle effectivement d’un jeune arrêté par la police etc. et je me suis fait bien avoir : tout ce groupe de femmes fait partie du spectacle, elles sont arrivées par bus de St Etienne, et jouent le choeur. c’est donc un futur projet en cours de création. Au moins comme cela ne se joue qu’une fois je n’ai pas besoin de faire le trieur ou l’aiguilleur Je dis à la compagnie : ça parle des quartiers, c’est important. Mais je sais, il faut du bouche à oreille, c’est le sport national t’as vu quoi de bon ? quelle heure etc ? tout le monde conseille tout le monde. Des listes circulent, espèces de tableaux d’honneur mais tout semble plein à craquer partout, il faut arriver en avance, il y a de la demande Je veux comprendre le catalogue, comment repérer un iN En minuscule chaque spectacle est estampillé sélection off ou Parti-pris de création même place dans le catalogue la différence : l’un est payé , ils sont seize les autres sont nourris, ils sont plus de 140 nulle part je ne trouverai la liste du IN qui n’est plus le IN mais parti -pris de la création. IN et Off mélangés, c’est justice. La compagnie qui est off offre gratuitement son spectacle à Chalon, mais elle fait partie du festival. Elle n’est pas sur une liste à part. J’ai le cerveau trop mou pour dire que c’est intéressant de présenter un bout de 20 mn d'un spectacle pas prêt devant des professionnels c’est pareil que les panoramas de la FAIAR La nouvelle directrice est en place : Nathalie Cixous. Quel chantier ! A sa place je constituerai un groupe de réflexion avec les artistes et les professionnels pour tenter de dégager quelques axes. Madame Monsieur, je vous remercie de m’avoir écouté. Il est un peu trop tôt pour voir clair , faut que cela se décante Jacques LIvchine Metteur en songe Le théâtre de l’unité c’est toujours autre chose ! |
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