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RE: [rue] Fumés au hêtre


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  • From: François Mary < >
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  • Subject: RE: [rue] Fumés au hêtre
  • Date: Mon, 28 Aug 2023 10:59:45 +0200
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L’article de Libé pour les non-abonné.es.

 

Le festival de théâtre de rue dans la petite ville du Cantal, sorte d’utopie entre folie douce et gros bordel, a été marqué par la manifestation samedi de plusieurs centaines de personnes en soutien à une femme visée par la justice pour s’être baladée seins nus.

 

Peut-être que les seins nus interloqueraient un dimanche de novembre à Strasbourg, mais pendant le festival d’Aurillac, c'est une banalité. (Pascal Aimar/Tendance Floue)

par Marie Klock

publié le 27 août 2023 à 16h19

Se réveiller dans une veste de survêtement qui ne nous appartient pas. Découvrir dans nos chaussures, au moment de les enfiler, de la tourbe et des plumes roses. Tenter de redessiner l’itinéraire des jours passés en suivant une cartographie faite de taches – boue, cendre, pisse, café (prix libre) – sur notre pantalon blanc. Peiner, parfois, à recoller certains morceaux. Peiner aussi à distinguer le réel de la performance. Ces souffleurs de feuilles aux gestes parfaitement synchronisés, dans une lumière surnaturelle à 4 heures du mat, sont-ils des agents d’entretien ou des danseurs ? Ces quelques personnes attablées, là, devant un hôtel particulier XVIIe, sont-elles en train de prendre le thé ou de performer le fait de prendre le thé ? Peut-être que ce clown au nez noir et son chien qui éternue peuvent nous donner un indice (au temps pour nous, une pancarte indique «Poetic tea time»). Au bout de trois jours d’errances à travers Aurillac, petite ville du Cantal prise d’assaut et transfigurée, le temps d’un festival, par les artistes de rue, on finit par trouver normal de voir sa route soudain barrée par un enfant de sept mètres de haut qui poursuit au ralenti un paquet cadeau en lévitation, de devoir enjamber des gens couchés par terre (ils ne dorment pas, ils jouent), de tomber sur un attroupement devant notre hôtel parce qu’un homme-mésange vindicatif est perché dans l’arbre d’en face, cerné par des «policiers».

Quelques chiffres purs et durs pour tenter d’agripper les contours de cet énorme organisme vivant qui échappe évidemment à son cadre théorique : outre les 18 spectacles de la programmation officielle, plus de 700 compagnies de passage ont été accueillies cette année dans la ville, disséminées dans 132 lieux différents. Frédéric Rémy, croisé en fin de festival, nous confirme une augmentation tangible de la fréquentation depuis la «vraie» reprise post-Covid, en 2022. Visiblement éreinté, il a dû donner de sa personne un peu plus tôt dans la journée de samedi 26 août pour apaiser des manifestants dont certains commençaient à s’en prendre au tribunal, après un rassemblement de soutien à Marina, interpellée pour s’être promenée seins nus.

Bien plus grave, un incendie survenu la nuit précédente a fait deux morts, un drame qui, bien que sans lien avec le festival, a beaucoup affecté son directeur artistique. Pour autant, lui qui connaît intimement Aurillac pour s’être formé dès 1993 auprès de Michel Crespin, le fondateur du festival, avant d’en prendre la direction artistique fin 2018, constate qu’il y a «de moins en moins de problèmes» et dit assister depuis quelques années à une «responsabilisation croissante», tant du côté des compagnies que des nombreux festivaliers qui viennent en camion : «Les gens sont beaucoup plus respectueux des lieux, font plus attention à récupérer leurs déchets», assure-t-il.

Fumés au hêtre

Les 132 lieux de performances répertoriés par le festival, du complexe sportif au petit bout de parking, sont identifiés par autant de pastilles. Rapidement, on parle en pastilles, on retrouve les copains «en 123» pour les cascades à moto, on sait qu’après 22 heures, c’est «pastille 114» qu’on entendra des bons concerts, programmés par les Radis noirs. Mais oui, la tourbe dans la chaussure, c’était un reste de motte tirée au canon par les bricoleurs fous du Piston errant en 123 au cours du Grand 49,9, road trip musical et mécanique qui n’hésite pas à catapulter diverses choses (terre, eau, mousse, papier journal) à la gueule de ses spectateurs. Et les plumes roses ont peut-être quelque chose à voir avec l’Acid Karaoké qui a déchaîné la 114 l’autre nuit, défonçant Dutronc ou Brel à coup de glitch, parfois survolé par une tranche de pastèque gonflable ou brièvement interrompu par un chasseur alpin à ski (mais non, pas un vrai, enfin). L’odeur tenace sur nos vêtements, comme s’ils avaient tous été fumés au hêtre ? Souvenir du finale étourdissant de la compagnie Titanos, quartier Peyrolles : là se joue un spectacle comme on n’en avait encore jamais vu, récit immersif pour un public de plusieurs centaines de personnes articulé autour d’un parc d’attractions maudit, truffé de manèges étranges et de tableaux vivants, fruit de plus de dix ans de travail, et qui s’achève dans une débauche de machins enflammés, mouvants, rotatifs, animés par des créatures en combinaisons qui iront jusqu’à foutre le feu à leurs propres chapeaux.

On s’habitue étonnamment vite à cette utopie qui oscille entre folie douce et zbeul, où l’état second est la norme, où des recommandations cryptiques circulent de bouche à oreille, où le saltimbanque se fout de la gueule de ses semblables («Toi, t’as pas l’air de travailler beaucoup» lance la très acerbe clownesse Hélène Vieilletoile à un festivalier défoncé avant d’improviser un ragga, dans une savoureuse séance de psychanalyse collective proposée par les Humains gauches). Il faut donc imaginer la virulence de la friction quand les forces de l’ordre tentent de mettre leur grain de sel dans ce royaume du bordel. Absurdité totale, bêtise confondante de l’intervention qui a eu lieu mercredi : alors que règne une canicule à faire frire des œufs sur le bitume, parmi les festivaliers prompts à se mettre torse nu, de rares femmes jugent qu’il n’y a pas de raison et font pareil.

Blaireau empaillé

Peut-être que les seins nus interloqueraient un dimanche de novembre sur le parvis de la cathédrale de Strasbourg, mais pendant le festival d’Aurillac, Eden anarchiste, safe space féministe ? Une banalité. Pas pour les policiers qui somment Marina de remettre son tee-shirt. Elle refuse et fera l’objet d’une ordonnance pénale pour exhibition sexuelle. L’info se propage rapidement, pour notre part on l’apprend jeudi soir durant le spectacle de la compagnie Chris Cadillac où une jeune femme vient faire passer le message au micro : rendez-vous samedi midi devant la mairie pour une manif de soutien, dress code torse nu pour les femmes, soutien-gorge pour les hommes. La manifestation s’est déroulée paisiblement, jusqu’à ce que quelques drapeaux français soient brûlés devant le tribunal, galvanisant une petite dizaine de personnes à s’introduire dans le bâtiment pour y poursuivre le brasier. L’intervention de Frédéric Rémy, venu implorer le calme sur place, inquiet pour l’avenir du festival si la situation dégénérait, a fait retomber progressivement la tension. Tout le reste de la journée, la foule des festivaliers est restée constellée de tétons en goguette, libres sous le soleil.

La veille déjà, place des Carmes, on ne pouvait s’empêcher de penser à Marina : là, à midi, les agitateurs magnifiques de la compagnie du Zerep jouaient Ecarte la gardine, tu verras le proscenium, séquence extraite de leur précédente pièce El coup du cric andalou et étirée jusqu’aux limites du supportable, où quatre comédiens bien mis composent des tableaux de quelques secondes, d’abord dîner mondain puis débordements grotesques, chapeaux rigolos, jaillissements de seins, culs nus, trucs dans des culs, bite sur le nez, vomi dans les chapeaux – à partir d’un certain point, Stéphane Roger ne prend même plus la peine de remettre son pantalon, cul et bite deviennent des accessoires au même titre qu’une perruque ou un blaireau empaillé. Normaux, banals, déchargés de leur aura sexuelle à force d’être montrés. Et tout ça sur une estrade en plein espace public, à l’heure du déjeuner, sous le regard, peut-être, d’enfants ! Stéphane Roger n’a évidemment et heureusement pas été interpellé. Marina n’aurait pas dû l’être.

 

 

De : Annabelle Piery < >
Envoyé : dimanche 27 août 2023 22:37
À : François Mary < >
Objet : Re: [rue] Fumés au hêtre

 

Bonjour François,

 

Merci pour les partages d'articles

 

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Merci d'avance 

Annabelle 

 

Le dim. 27 août 2023 à 17:43, François Mary < > a écrit :

« Stéphane Roger n’a évidemment et heureusement pas été interpellé. Marina n’aurait pas dû l’être. »

 

Reportage de Marie Klock pour Libération - A Aurillac, un festival seins dessus dessous

https://www.liberation.fr/culture/scenes/a-aurillac-un-festival-seins-dessus-dessous-20230827_GHET7RBCFRHZBKYWOECF277XAU/

 

 

Bien à vous,

François


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  • [rue] Fumés au hêtre, François Mary, 27/08/2023
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