Amis, citoyens, camarades, artistes dramatiques et comiques Tant pis je me jette dans le brasier, je me suicide je serai fusillé sur la place de grève mais là tout devient trop de chez trop et je ne supporte pas d’avoir toute l’opinion publique contre nous je ne supporte pas nos discours de bien- pensance bref j’étouffe et je disside je ne supporte pas le regard de mon père, je ne supporte pas la pitié. Mon père est mort bien- sûr mais toute ma vie il m’a traité de “raté”, de type vivant à ses crochets, bref toute ma vie, je n’ai été pour lui qu’un intermiteux un handicapé incapable de gagner sa vie tout seul Alors que mes cousins ingénieurs, docteurs, avocats, entrepreneurs achetaient leurs baraques moi je squattais des petits bouts dans son usine, je vendais les copeaux de cuivre que je volais la nuit Je volais aussi l’argent des bouchers charcutiers, des travailleurs de l’automobile, des caissières de supermarché (mes indemnités d’intermittents) et je ne le rendais qu’à une petite élite de spectateurs de théâtre, professeurs et autres diplômés Et puis surtout, je n’étais pas connu. Ma légitimité eut été d’être connu. ou bien d’avoir une utilité sociale. Bref jusqu’à 40 ans, je n’ai entendu que ça , “espèce d’assisté, espèce de raté" Sur la tombe de mon père, en 1982, je me suis dit “ça y est jacques, te voilà libre, à toi le théâtre”. J’étais trop content de le voir mort et de ne plus avoir son regard réprobateur et méprisant. Mais voilà mon père est revenu, mon père c’est le medef, c’est FO, c’est la CFDT, c’est Sarkozy, c’est le libéralisme. “Pas de pitié pour ceux qui sont incapables de rapporter du vrai blé qu’ils ont gagné eux -mêmes" Je les calcule ces gens là, je les connais bien, et qu’ils souhaitent ma mort, c’est normal. Alors je réfléchis, et je me dis, nous avons crié en 2003, que le nouveau protocole était meurtrier, que nous allions tous mourir, que la France allait devenir un désert culturel, et qu’une France sans culture, c’était un jardin sans herbe ni fleurs. Dix ans plus tard : le nouveau protocole n’a résorbé aucun déficit, et le nombre des intermittents n’a pas diminué, et il y a encore 1000 compagnies en Avignon, qui vont jouer 20 fois, et déclarer 5 cachets, et il y a encore à Chalon et Aurillac des centaines de compagnies dont les répétitions ont été payées par l’Unedic. Et nous on recommence le même laïus “ vous tuez l’Art, vous nous tuez”. J’en ai marre de ces fausses prophéties. Et on recommence, on va faire la grève,on va les faire plier, ils ne vont pas signer ! Bravo Montpellier et tous les autres, je voudrais juste que votre mort serve à quelque chose. Je suis troublé, j’ai l’impression que la guerre de 14 recommence, on part tous la fleur au fusil faire la grève dans tous les festivals, mais moi je n’ai pas envie de redevenir comme en 1914 et 2003 de la chair à canon. Que le IN d’Avignon fasse grève, oui, les contrats sont signés et les comédiens seront payés. Oui, et tant mieux, qu’Aix en provence saute, oui, tant mieux, le OFF d’Avignon fera comme en 2003, 90% des compagnies joueront. Ils feront une journée de grève symbolique, c’est tout, le 14 juillet. C’est obligé. Parce que les loueurs de salle, s’empressent de toucher l’argent avant le festival, pour eux c’est tout bénef. Moi c’est viscéral, je ne referai pas la copie conforme de 2003. je ne ferai la grève qu’uniquement si elle se politise, oui, avec une demande de dissolution de l’assemblée, une démission de Hollande qui a trahi comme tous ses ministres oui. Alors oui, si un vrai courant se dessine en France, et que des entreprises nous rejoignent, et qu’une solidarité fasse tâche d’huile , oui. Mais tous seuls, comme ça entre nous, pour la correction de 4 lignes sur délai de carence, je dis non. Ce que je ne comprends pas c’est cet article de merde de délai de carence qui mettrait 20 000 intermittents en danger de mort, si Filipetti veut payer, pourquoi refuse t-on ? Là je ne comprends plus rien à ce mot d’ordre que j’ai lu “non à la caisse de bienfaisance”. En conclusion, chers camarades , je ne veux pas crever pour un avenant à un protocole, mais si c’est pour renverser le pouvoir, et faire la révolution , oui, comptez sur moi, c’est un combat classe contre classe, que nous devons livrer, ils ont décidé de nous tuer, alors Prenons le pouvoir, nous en sommes capables, il est insupportable d’être dirigé par des incapables, Le PS s’est jeté dans les bras du Medef, il n’a plus de légitimité les gens ne veulent même plus voter donc Artistes, nous possédons les armes de l’esprit Tous en grève pour la révolution culturelle d’abord, économique ensuite avec un nouveau partage des richesses. On n’en peut plus
Jacques LIVCHINE
Metteur en songe Le théâtre de l’Unité, c’est toujours autre chose… |
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