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- Subject: [rue] Le "rater mieux" & le "mieux disant" (suite)
- Date: Tue, 05 Jun 2012 18:00:50 +0200
Raté
Trop sensible, le sujet. La douleur afflue.
Et puis le procès inutile des programmateurs
c'était pas l'objectif.
L'objectif était de nous apprivoiser au raté, pouvoir le respirer, le
gérer et donc le réfléchir.
Au tennis, tu perds d'abord beaucoup plus de matchs que tu n'en gagnes.
Le raté de Steph n'a rien à voir avec celui d'autres compagnies qui sont
reconnues, tournent néanmoins fort peu, en souffrent mais s'y sont
habituées.
Le raté de Steph, ce n'est pas un calendrier de tournées que nous
serions par ailleurs nombreux à vouloir signer.
Le raté de Steph c'est peut-être qu'il voulait, qu'il veut toujours, se
dépasser -aspiration fondamentale de tout artiste digne de ce nom- et
que le métier n'est pas parvenu à l'accompagner de telle sorte qu'il y
parvienne.
Personnellement, je ne pense absolument pas qu'il y aient des coupables.
Le boulot il doit se faire essentiellement dans nos têtes.
Parce que parfois, souvent, et ce fut mon cas tout récemment, on n'y
arrive pas tout seul
Parce que "ça ne va pas de soi, sortir de soi"
il faut un cicérone, un mentor, un copain qui te tienne la main. Et
c'est ce qu'on attend comme des cons des programmateurs qui n'en peuvent
mais. La programmateur n'est qu'un homme, comme vous le savez, même s'il
est parfois une femme, ce qui nous fait des vacances. Donc il n'est pas
toujours dispo pour ça.
Il n'est jamais bon de mariner dans son jus tout seul.
Parfois on s'est trompé de projet. Parfois on n'est pas à la hauteur, ce
qui veut dire qu'il nous faut impérativement grandir pour le réaliser.
Parfois il manque une critique, une vraie qui ne lâche rien. Parfois ce
n'est pas une question de qualité mais de pertinence dans un temps, dans
un lieu, face à un milieu. Parfois, c'est franchement mauvais et nous
n'en sommes jamais très loin: nous ne vivons pas sur des garanties.
Tout ça n'est pas réthorie. C'est vrai. On le vit. On peut se rendre
malade, littéralement, à créer. C'est pour ça qu'il est intimement
douloureux d'en parler.
Nos productions nous ressemblent, elles parlent de nous, et nous sommes
rarement satisfaits de ce "nous", nous poussons le bouchon plus loin,
encore plus loin. Boulot de Sysiphes.
Mais je crois que ça vaut le coup de se battre. Je crois que l'ardeur et
la conviction peut finir par l'emporter. Que le chemin est plus
enrichissant que le but. Qu'il faut parfois persister.
Une vraie galère comme chacun sait.
Mais sinon, c'est se renier, se rogner, mourir.
Pas de réponse donc ni de solution. Juste un choix, parmi d'autres.
La lotta continua
Bien à vous
Pierre
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