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Re: [rue] Artonic : The color of time. Colonialisme refoulé et arts de la rue


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  • From: Frédéric Roucheray < >
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  • Subject: Re: [rue] Artonic : The color of time. Colonialisme refoulé et arts de la rue
  • Date: Fri, 11 Sep 2015 23:34:49 +0200

Merci Jean Jacques Delfour pour votre critique assumée, résolument ouverte à la réflexion dont la profondeur d'une oeuvre artistique est supposée nous convoquer, ainsi qu'au débat dont on s'empare avec passion.

Effectivement, après relecture, entre les lignes, on peut constater dans l'article de S. Ruffier une argumentation distante et une certaine condescendance frileuse (chacun sa croix) non sans un véritable accès de fraternité et une méditation bienheureuse

Cependant, sommes-nous au fond du fond? 

Comme l'a dit si justement Nicolas des Anthropologues, cette critique ne nie, ni la volonté de bien faire de l'artiste, ni la qualité de son savoir-faire. Mise à part peut-être une petite différence de goût pour la musique avec Jean Jacques? Ça c'était juste pour taquiner un peu. 

On s'accordera certainement à dire que les batucadas sont culturelles au Brésil -anthropologiquement parlant- (Nicolas?). Il n'en demeure pas moins qu'une transposition en Europe par un troupeau de blancs-becs ne suscite pas le même engouement dans un festival artistique, au-delà de l'aspect purement festif. (Ens'batucada si vous me lisez, j'adoooore ce que vous faites). Enfin, je dis ça, mais je me suis tout de même très volontiers laissé gouroutiser par la pratique de l'aïkido et pourtant je n’ai pas les yeux bridés. 

Par ailleurs, mon voisin, 17 ans, m'affirme que David Guetta est un artiste. Je n’ai pas essayé discuter, je serais passé pour un con. (Quoique ce n’est pas une nouvelle. Fut un temps j'en ai même fait mon métier, non sans une petite pointe de fierté passagère). Tout le monde bouge sur le même beat, tu réfléchis plus, tu te lâches, c'est trop la teuf, c'est de la bombe Guetta! (sic) Alors Nicolas, je te le demande, que puis-je lui répondre quant à son ressentiment émotionnel sans passer pour un partisan de la Culture? La fête, la liesse collective, le bonheur partagé, ce sentiment d'unicité... peuvent-ils suffire à nous donner un peu d' à propos? 

Rien de très irréprochable à s'inspirer du carnaval, des fêtes foraines, ou de n'importe quelles fêtes votives à condition de savoir où l'on met les pieds, car dans notre société de mixité culturelle, où tout vaut à peu près n'importe quoi, les références et les critères sont devenus totalement flous. Ça existe les vrais maîtres à penser (mais des bons hein) ou on est toujours obliger de tout faire par soi-même? Le jour où les majorettes (s'il en reste des vivantes) viendront demander des sub à la création artistique, avec un peu de recul, ça risque peut-être de nous faire marrer. Là au moins, il ne sera pas question de pillage? Parce que je me demandais comme ça, si ça avait été de véritables Hindis qui avait fait Color of time cela aurait-il changé quelque chose à nos échanges? Mais je m'égare sans doute. D'un autre côté, cet été à Paris on a eu le plaisir d'avoir Tel-Haviv sur seine comme manifestation culturelle. (Je ne sais pas trop si je dois mettre un point d'interrogation à la fin de cette phrase)

Quoi qu'il en soit, force est de constater que dans notre secteur l'emploi du terme "esthétique" s'est largement répandu ces dernières années. Sommes-nous certains d'en avoir tous la même signification dans nos usages? Car pourtant, il existe bien une nette différence entre les réflexions platoniciennes et celles de n'importe quelle esthéticienne. Une sorte de distinguo entre le joli et le Beau, qui selon le bonhomme, n'est pas de l'ordre du sensible, mais de l'ordre de l'intelligible. Se peut-il que cet argumentaire relève uniquement de la forme? Vaste sujet...

Un certain Michel Onfray invite le peuple à s'interroger sur ses propres faiblesses plutôt que la force des autres. Selon lui, la religion (les nouveaux fascistes) vient combler un manque là où la pensée est faible. 

Une dernière question subsidiaire, y a-t-il une différence entre une foule et un public?

Il me semble qu'il était question de politique à un moment... Au risque de me tromper, si l'on avait les idées plus claires, cela nous aiderait-il à voter pour au lieu de voter contre?

Ce n'est pas facile de s'en apercevoir quand on à la tête dans le guidon, mais malgré le marasme ambiant notre secteur évolue. Il y avait trois générations autour de la table lors de la journée de réflexion de la fédé idf en cette rentrée. 

Chaque artiste n'est pas à l'abri de faire une couillade sur l'un de ces opus. Ce qui ne remet pas en cause la qualité des personnes.

Je n'ai toujours pas eu l'occasion de voir Color of time. Alors à dimanche à Cergy pour s'en mettre plein la tête...

VIVA ARTONIK!

PS à Philippe Capitani: Ce n’est pas si détestable la masturbation (cérébrale pour pas dire intellectuelle) et ça peut même se pratiquer en collectif (?) ;-)

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Mr Frédéric Roucheray


Le 11 septembre 2015 10:18, cie Kartoffeln < " target="_blank"> > a écrit :
Bonjour

Ce qui ce dit autour de "Color of Time" me fait penser à un autre spectacle, "Place des anges" des Studios de Cirque. L'intérêt de la proposition ne venait pas pour moi du spectacle mais du final, un déluge pharaonique de plumes virevoltant dans les airs, une merveille en pleine ville, et je me souviens m'être éclaté après le spectacle à balancer de pleines brassées de plumes sur des inconnus vite devenus compagnons de jeu.
La critique est à sa place dans son questionnement esthétique, voire sociopolitique dans le cas de JJ Delfour, mais peut être que ce type de proposition de rue procède d'autre chose qu'une oeuvre d'art. J'emploierais le mot "animation" et je n'y voit là rien d'infamant, bien au contraire. L'animation c'est mettre en mouvement (le spectateur), en lui donnant de quoi jouer avec ses voisins et susciter ainsi sa créativité, lui faire quitter un moment nos conventions sociales. Les rencontres que cela provoque sont certes éphémères, sans doute illusoires et superficielles mais elles font du bien. Régressif ? Oui, dans le sens qu'on y retrouve le plaisir et la jubilation des récréations et des batailles de polochons de notre enfance. Un élan précieux de vitalité dans une société quelque peu figée.

Denis Barré
______________________________________________________

CIE KARTOFFELN
www.karto.fr


Le 10/09/2015 23:06, SOLOY a écrit :
Lorsqu’associés aux producteurs dédites œuvres, des journalistes s’extasient devant le phénoménal et populaire succès d’un « Trois hommes et un couffin », « D’un bienvenue chez les Cht’is » ou d’un « Intouchables », cela fait-il pour autant de ces films des chefs d’œuvre du cinéma, alors qu’ils sont, à tout le moins, des expériences sympathiques et consensuelles?
Lorsque ces mêmes journalistes n’en peuvent mais de programmer à l'antenne, telle icône de cinéma associée à ces films, qu’ils dégoulinent de condescendance, forts d’une croyance étrange qui consiste à imaginer que côtoyer la notoriété fait briller, cela fait-il de ces programmateurs des génies, qui ne réussissent au final qu’à hériter de quelque anecdote de tournage, d’une banalité consternante?

Bref, et je n’énoncerai moi-même qu’une banalité, le succès populaire d’un film ne fait a priori pas la qualité d’une œuvre.
Et une critique négative n’en atténue pas a posteriori la diffusion.

Pourquoi en serait-il autrement des arts de la rue?
Là où les arts de la rue risquent de crever, c’est de l’absence d’une critique de fond, et non pas de sa présence, qui ne nie, ni la volonté du bien-faire de l'artiste, ni la qualité de son savoir-faire.

Car, en effet, le méta-discours qu’est la critique est nécessaire pour placer une œuvre dans le flux de l’Histoire, et la sortir du jeu anecdotique des engouements séculaires. En ce sens, ce n’est surtout pas aux artistes de répondre aux critiques de leurs œuvres: l’œuvre est la réponse préalable, dans sa force, son identité, en un mot, sa pérennité. Et de ce même artiste, les œuvres qui précèdent et qui suivent, comme l’affirmation d’une démarche. Je rejoins en ce sens JLivch. dans sa lecture du présent débat. Artiste et critique œuvrent au final, dans un seul et unique objectif: la survie du secteur artistique qui les nourrit.

Cependant, l’œuvre du critique est elle-même sa critique. Il n’a pas non plus à la justifier, seulement à la diffuser. Et puis à affiner sa plume pour la suivante.

C’est pourquoi, en attendant, ce que je regrette de ta critique, JJ Delfour, comme je te l’ai signifié en commentaire sur ton blog, c’est son manque d’empathie dans la visite préalable du spectacle: tu nous dois de décrire émotionnellement ton ressenti pour nous, lecteurs, si tu ne veux pas passer pour partisan (trivialement: « Baisse d’abord ton froc si tu veux bien donner la fessée »). Je m’explique: je n’ai pas vu "Color of time », et en lisant la critique, il me manque une immersion plus concrète dans l’univers et sa temporalité, avant l’analyse critique que tu en fait. Ma propre critique va donc à l’encontre de la structure de ta critique. Pour éviter l’écueil des inepties que Fabienne Pascaud réserve au cinéma depuis des années, dotons-nous d’outils critiques solides: primo, une restitution sensible de l’œuvre, deuxio, son analyse architecturale. Et puis le silence.

D’ici là, Artonik, et JJD, je vous jette mon chapeau, pour vos engagements, conjoints.
Ne débandez pas, il en va de nous touTEs!

Bien des amitiés,
Nicolas Soloy


merci, merci de ce long message
qui permet de repositionner l'art, la critique et notre pauvre démocratie
on a besoin de ces réflexions pour avancer, pour se parler et réfléchir à nos pratiques
allons-y, commençons par débattre mais sans bâtons rompus, sans menace, sans clan
quelles sont nos armes ? notre force au-delà du conflit apparent ?
les arts de rue doivent se nourrir d'une telle critique et assumer le débat

bise du soir

marie do Fréval


<logo_pour_signature_137x82px.jpg> Marie-Do Fréval
Directrice artistique
www.cieboucheabouche.com
01 45 39 55 38
06 87 27 48 47

Le 10/09/2015 18:42, jean-jacques delfour a écrit :

Bonsoir

 

Je remercie d’abord Alain Beauchet d’avoir pris la peine de répondre à ma critique et d’avoir donc reconnu son intérêt. Si elle était sans intérêt, pourquoi se fendre d’une réponse détaillée ? Parce qu’il est possible que mes remarques recèlent une vérité, confirmée involontairement par Stéphanie Ruffié qui réduit votre spectacle à sa dernière partie ; mais vous vous gardez bien de lui faire grief de cette réduction puisque son discours vous arrange. La vérité sous-jacente est celle-ci : le vrai point excitant de ce spectacle n’est pas la démocratie, la critique de la xénophobie, la fraternité ; tout cela, plein de spectacles l’évoquent et ça constitue un sol commun, presque un conformisme politique ou moral dans les arts de la rue (un point de ralliement et l’objet d’un consensus bien-pensant). Non, le vrai point excitant, ce qui attire le public, c’est la poudre de couleur, qui est un vrai point distinctif, un marqueur (c’est le cas de le dire) qui différencie votre spectacle des autres.

[…]

Jean-Jacques Delfour

 


[1] Un lecteur me dit que rapprocher Holi et Carnaval est une insulte (et vous aussi Alain Beauchet, une erreur de ma part) ; je réponds que je ne confonds pas Holi et Carnaval, je fais juste une analogie (j'ai lu que les différences entre les castes passaient au second plan dans la Holi tout comme était renversée la domination de classe dans le carnaval médiéval). Carnaval n'est aucunement une insulte, mais un terme désignant une pratique médiévale bien documentée (cf. par exemple le fameux livre de Le Roy Ladurie).




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